Juste la fin du monde - Dissertation "un drame qui n'advient pas"
Dissertation : Juste la fin du monde - Dissertation "un drame qui n'advient pas". Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Ellana236 • 19 Octobre 2021 • Dissertation • 2 536 Mots (11 Pages) • 10 021 Vues
SUJET : Dans sa préface à Juste la fin du monde, Jean-Pierre Sarrazac présente
la pièce « comme un drame qui n’advient pas, qui restera l’affaire intime d’un seul
en butte à l’impossibilité de se faire entendre – ou celle de s’exprimer ».
Analyse du sujet (au brouillon)
→ « DRAME »
En grec, drama signifie à la fois « action » et « conflit ». Le mot « drame » désigne donc toute forme
d’action théâtrale, celle-ci reposant sur un conflit originel.
Ce n’est qu’à partir du XVIIIe s., avec la création du drame bourgeois, et au XIXe avec le drame
romantique, que ce terme désigne un nouveau genre théâtral, autre que la tragédie et la comédie.
Le terme « Drame » peut désigner donc une pièce de théâtre mais aussi une tonalité pathétique, voire
tragique / ici, le « drame » est lié à l’annonce de la mort de Louis.
→ « N’advient pas » :
Le drame n’a pas lieu, Louis ne dit pas son secret, il n’y a pas d’action véritable, pas de « rencontre »
entre les personnages.
=> Peut-on vraiment dire qu’il ne se passe rien dans la pièce, que le drame n’a pas lieu ?
Les drames ne sont pas seulement ceux de Louis, les autres personnages vivent des crises
individuelles (Suzanne, Antoine = ressentiments liés à l’enfance, drames liés à l’absence de Louis)
=> Le drame n’est-il pas lié aussi au manque de communication, à la difficulté de se comprendre ?
→ « Affaire intime d’un seul » :
Louis, personnage qui demeure seul, isolé par rapport au reste de sa famille, porteur d’un secret intime
=> Il semble qu’il y ait plusieurs « intimités » qui se heurtent dans la pièce, plusieurs personnages en
crise personnelle, en particulier Suzanne et Antoine qui s’expriment à l’occasion du retour de Louis.
Louis est seul, certes, mais chacun (Antoine, Suzanne, La Mère, Catherine) apparaît également seul
par moment ; cependant, La Mère et Suzanne partagent une forme de complicité, et Catherine et
Antoine forment une vraie famille.
→ « Impossibilité de se faire entendre » :
Louis ne peut discuter avec sa famille, il demeure incompris. Il vit un drame de l’incommunicabilité au
sein de sa famille, la difficulté voire l’impossibilité de communiquer avec les siens.
=> Louis essaie-t-il réellement de se « faire entendre » ? On dirait qu’il n’essaie pas, qu’il refuse de
partager son secret (peut-être aussi pour protéger les siens, mais pas exclusivement sans doute).
→ « Impossibilité de s’exprimer » :
Louis ne sait pas comment leur dire son secret : La pièce se construit sur un non-dit, un silence.
=> Louis est pourtant celui qui se trouve du côté des mots, car il est écrivain. Il devrait savoir comment
s’exprimer, contrairement aux autres membres de sa famille qui cherchent toujours leurs mots.
L’impossibilité de s’exprimer n’est donc pas liée à une incapacité, mais bien à une retenue personnelle
ou au manque de place laissée par les autres personnages, qui ne cessent de régler leurs comptes
avec Louis, sans lui laisser un temps de parole disponible. Le silence de Louis est une parole sans
cesse empêchée.
Introduction rédigée :
[Amorce] Le metteur en scène Jean-Charles Mouveaux affirme que « L’histoire de Juste la fin du
monde, c’est celle de toutes les solitudes au milieu des autres. » Selon lui, la pièce met donc avant
tout en scène des solitudes individuelles qui se heurtent les unes aux autres, et qui nous empêchent
de communiquer même avec ceux qui nous sont les plus proches.1
[Reprise et problématisation du sujet] D’une certaine manière, c’est également ce que pense JeanCharles Sarrazac lorsqu’il présente la pièce comme « un drame qui n’advient pas, qui restera l’affaire
intime d’un seul, en butte à l’impossibilité de se faire entendre – ou à celle de s’exprimer […] ». Selon
cet homme de théâtre, le drame est avant tout lié au secret de Louis qui ne sera pas révélé, soit que
le jeune homme ne sache pas se faire entendre, soit parce qu’il ne peut s’exprimer. On peut s’interroger
cependant sur la validité de cette affirmation : le seul drame dans Juste la fin du monde est-il réellement
celui, personnel et intime, de Louis ? Les autres personnages ne vivent-ils pas également un drame
personnel qui « advient » ? Et Louis est-il vraiment « en butte à l’impossibilité de se faire entendre –
ou à celle de s’exprimer » ? Ce silence qui le caractérise n’est-il pas également un choix de sa part ?
[Problématique reformulée] Ainsi, nous pouvons nous interroger sur la signification accordée au terme
de drame. Peut-on vraiment dire que le drame n’advient pas dans la pièce de Lagarce ? Ne serait-elle
pas au contraire l’expression de plusieurs drames individuels qui sont liés à la crise familiale ?
[Annonce des axes] Nous verrons donc dans un premier temps que Louis, en taisant (volontairement
ou non) son secret, empêche en effet le drame d’advenir, avant de nous pencher sur la somme de ces
drames individuels qui trouvent leur expression dans une crise familiale et traduisent, en se
superposant, l’incapacité des êtres à communiquer leurs souffrances, le drame de la parole.
1 Remarque : Si vous n’avez pas de citation à exploiter, il est tout à fait possible de faire une entrée en matière
en s’appuyant sur l’œuvre, en ciblant ce qui vous semble pertinent pour introduire le sujet. Ici par exemple :
La pièce de Lagarce Juste la fin du monde surprend les spectateurs : son héros, Louis, annonce
d’emblée sa mort prochaine et son désir de l’annoncer à sa famille mais cet aveu est empêché et le public est
dans une attente sans cesse déçue. C’est pourquoi Jean-Charles Sarrazac présente cette pièce comme…etc
AXE I – Le secret de Louis empêche le drame d’advenir.
1) Une dramaturgie statique : « un drame qui n’advient pas »
→ Il n’y a pas de véritable action dans la pièce : attente sans cesse déçue du lecteur/spectateur après
l’annonce du prologue.
Louis exprime, à son entrée en scène, sa volonté de « dire / seulement dire / [sa] mort prochaine et
irrémédiable, / l’annoncer moi-même ». Mais la révélation, l’aveu de Louis à sa famille n’a pas lieu.
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