Dissertation Malade Imaginaire

Sujet: Quelle est la nature du plaisir du spectateur dans Le Malade Imaginaire?

Intro: "Je voudrais bien savoir si la grande règle de toutes les règles n'est pas de plaire" écrit Molière dans sa comédie La Critique de l'Ecole des femmes. Ainsi, depuis l'Antiquité, toutes représentations théâtrales poursuivent le même but qui est celui de divertir les spectateurs. Au XVIIè siècle, siècle appartenant au mouvement littéraire et culturel du classicisme qui vise à respecter les règles de bienséance et de vraisemblance, le dramaturge et comédien Molière, de son vrai nom Jean Baptiste Poquelin, réinvente le genre théâtral de la comédie. Celle-ci s'est développée en Grèce au Ve siècle av J-C et visait à faire rire le spectateur en mettant en scène des personnages auxquels il pouvait s'identifier contrairement à la tragédie, qui suscitait la "pitié" et la "terreur". Dans le théâtre classique français, la comédie est considérée comme un genre bas et vulgaire. Molière lui rend son prestige en affirmant sa visée morale qui est de plaire et d'instruire. Il crée ainsi Le Malade imaginaire, sa dernière pièce, en 1673. C'est une comédie-ballet composée de trois actes qui met en scène Argan, un hypocondriaque obnubilé par les prescriptions des mèdecins et qui a pour projet de marier sa fille à un homme qu'elle n'aime pas. Quelle est la nature du plaisir du spectateur dans Le Malade imaginaire ? Autrement dit, quelle est l'origine du divertissement du public dans la pièce ? Quelles en sont ses caractéristiques ? Nous montrerons dans un premier temps que la comédie est un plaisir qui entraîne le rire et, dans un second temps, que le divertissement procuré est aussi lié à la richesse théâtrale. Enfin, nous montrerons que la réflexion portée par la pièce peut également susciter une forme de plaisir.

I) La comédie, une forme de plaisir qui entraîne le rire:

a) Les différents types de comiques dans la pièce

Depuis l'Antiquité, une des principales vocations de la comédie est de faire rire le spectateur pour l'éloigner de ses ennuis et lui faire partager un moment agréable. C'est un des plaisirs essentiels de ce genre théatrâl qui met majoritairement en scène des personnages ordinaires vivant des situations improbables du quotidien comme des projets de mariage, des problèmes conjugaux ou financiers. Dans Le Malade Imaginaire, on retrouve ainsi plusieurs types de comiques à travers différentes scènes. On a tout d'abord le comique de caractère qui est très marqué à travers le personnage principal d'Argan. Il est malade de se croire malade et se fie aveuglément aux traitements des médecins. C'est un hypocondriaque égocentrique et égoïste, qui veut marier sa fille à Thomas Dafoirus, fils d'un médecin qu'elle n'aime pas, et qui malmène sa servante Toinette : "Ah chienne! ah, carogne...!" (Acte I, scène 2). Un autre personnage démesuré est aussi le fils du docteur Dafoirus, Thomas. C'est un "grand benêt" qui vient tout juste de sortir des universités de médecine et qui "fait toutes choses de mauvaise grâce et à contretemps". Il ne sait point se présenter auprès de Béline, seconde épouse d'Argan : " puisque l'on voit sur votre visage...Madame, vous m'avez interrompu dans ma période, et cela m'a troublé la mémoire"(Acte II, scène 6) et il propose à Angélique d'assister à la dissection d'une femme en guise de rendez-vous galant, ce qui est très maladroit. Un autre type de comique beaucoup utilisé dans la pièce est le comique de situation. Il met souvent en scène des quiproquos, que seul le public perçoit. C'est le cas dans la scène 5 de l'acte I, lorsque Argan vante les soi-disantes qualités de Thomas à Angélique,qui elle pense que cette louange est destinée à son amant Cléante.Enfin, le comique de mots qui repose sur le mélange de plusieurs registres de langues ou encore sur divers jeux de mots, est un élément très utilisé dans la pièce. On le rencontre ainsi à travers le nom du docteur, Mr Purgon. En effet, il peut renvoyer au terme de "purgation", rappelant alors le phénomène de catharsis qui signifie la purification, le nettoyage des passions. On a également un jeu de mot dans la scène 2 de l'acte I à travers la phrase: "c'est à Mr Fleurant à y mettre le nez".En effet, le nom de famille du médecin vient du verbe "fleurer", forme ancienne du verbe "flairer".Tous ces comiques ont donc pour fonction de provoquer la moquerie des spectateurs.

b) Le lien avec la farce

Molière s'inspire aussi du genre théatrâl de la farce dans ses comédies pour divertir le public. Elle est née au Moyen-âge et sa première intention est de faire rire par le biais de caractéristiques grossières en mettant en scène des personnages ridicules,souvent en proie aux tromperies, à l'équivoque, à la ruse ou à la mystification. Au XVIIe siècle, la farce française est fortement influencée par la comedia dell'arte, genre de théâtre populaire italien né au XVIe siècle, où des comédiens masqués improvisent des comédies s'adonnant à la naïveté, la ruse et l'ingéniosité. Molière s'inspire donc de ces deux genres dans sa pièce . Il utilise par exemple des noms de personnages très ressemblants à ceux issus de la comedia dell'arte tels que "Polichinelle", l'amant usurier de Toinette. Le dramaturge emploie aussi différents procédés littéraires tels que l'humour bouffon, les quiproquos ou encore le lazzi, désignant toutes formes de plaisanteries burlesques. Ce dispositif relève de ce que l'on pourrait appeler le comique "bas" et vulgaire qu'apprécient notamment les spectateurs. Il se distingue par exemple dans les traitements infligés à Argan tels que le "clystère", "le lavement", "la saignée" et "la prise de laxatif"ou encore dans l'acte I scène 5 quand Argan court, enragé et un bâton dans la main, après Toinette. Aussi, la farce contre tout ce qui pourrait se ramener au pathétique. En effet, le titre de Malade Imaginaire renvoie à tout ce qui concerne la médecine et la maladie mais la pièce regorge en réalité de ruses, de déguisements et de mascarades. La mort, qui est représentée à trois reprises lors de la fausse mort de Louison dans l'acte II scène 8 et de celle d'Argan dans l'acte III scènes 12 et 13 est ainsi exorcisée par le rire et rend le spectateur euphorique.

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