De la société et de la conversation, Les Caractères, Labruyère

Fragment 12 chapitre V de la société et de la conversation

Jean de La Bruyère est un moraliste français du 17 eme siècle, célèbre pour une œuvre unique intitulée "les Caractères ou les Mœurs de ce siècle" sur la quelle il a travaillé pendant 17 ans. Par différents procédés (maximes, réflexions et portraits à clef), cette œuvre nous dévoile tous les travers de la cour de Louis XIV. Ce livre est publié pendant la querelle des Anciens et des Modernes; polémique qui oppose des écrivains respectueux de l'héritage de l'Antiquité(parmi Boileau, Racine, La Fontaine, La Bruyère), et d'autres qui sont pour une refonte complète des styles d'écriture pensant que les œuvres en faveur du roi et de la chrétienté sont forcément supérieures à tout ce qu'ont produit les siècles passés (menés par Charles Perrault).

[ les Anciens reconnaissent la dimension cumulative de la culture. La métaphore des nains sur des épaules de géants illustre ce principe: en étudiant les travaux des grands hommes du passé, il est possible de les surpasser.]

Le texte étudié est un fragment du livre "de la Société et de la Conversation". Il s'agit d'un portrait à clef  présentant un personnage du nom de Théodecte, dans une situation précise de sa vie sociale celle de sa réception chez un hôte en suivant la progression chronologique, de son entrée jusqu'au moment où le locuteur témoin quitte les lieux.

Comment le moraliste La Bruyère démasque-t-il l'imposture en nous donnant à voir le manège d'un importun?

On peut distinguer ce plan de narration:

Du début à la ligne 3 l'arrivée du personnage dans la maison où il est reçu

De la ligne 3 à la ligne 9 son bavardage dans l'antichambre

De la ligne 9 à la ligne 15 le moment du repas et la démonstration de sans gène de Théodecte

De la ligne 16 à la ligne 18 un commentaire plus général de son attitude après-diner

Et de la ligne 18 à la fin l'abandon de son sujet d'observation par le moraliste dégouté

Dans le premier mouvement, le premier verbe de perception auditive à la première personne place le moraliste parmi les visiteurs qui attendent d'être introduits. Le présent réunit les valeurs de narration c’est-à-dire une anecdote passée et d'habitude pour souligner le fait que Théodecte se comporte toujours ainsi.

Le parataxe et le tour présentatif condensé accentuent l'effet de rapidité : une personne sans-gêne déboule dans la pièce, sur de ses droits et sans égards pour autrui.

Le groupe verbale ternaire ménage une graduation burlesque; le geste démonstratif qui est la consequence du bruit est comique.  

Une méthaphore hyperbolique clôt cette entrée bruyante.

Ainsi, le bruit est le signe annonciateur du personnage et met en exergue son inconvenance; l'amplification prépare la satire.

Dans le second mouvement, la comparaison forme une litote et met en valeur l'adjectif redoutable: un tel individu est à fuir!

La périphrase 'les choses qu'il dit" laisse entendre que ses sujets de conversation sont insignifiants; l'allusion à son "ton" souligne l'artifice des effets recherchés pour imposer sa parole.

La négation restrictive renforce l'antithèse ironique fracas/bredouiller pour dénoncer son discours creux.

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