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Nos peurs sont-elles contemporaines ou intemporelles ?

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Par   •  24 Janvier 2023  •  Dissertation  •  1 732 Mots (7 Pages)  •  369 Vues

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Nos peurs sont-elles contemporaines ou intemporelles ?

Soucieux d’établir des ponts entre notre société et celle d’hier et d’éclairer le présent par le passé, l’historien Georges Duby écrit dans un essai intitulé Sur les traces de nos peurs, An 1000, An 2000 : « Toutes les cultures (…) sont dominées par les mêmes angoisses à l’égard du monde » (p.15). Qu’en est-il exactement ? Si la peur se définit comme une émotion suscitée par la présence ou l’imminence d’un danger, nos peurs contemporaines sont-elles les mêmes que celles d’hier ? L’Homme moderne encourt-il les mêmes risques ? Sommes-nous en proie aux mêmes peurs ? Après avoir montré que certaines angoisses sont communes à d’autres périodes et cultures plus anciennes, nous définirons celles qui sont semblent être nées à l’aube du IIIe millénaire.

A dire vrai, certaines peurs sont intemporelles et se retrouvent à toutes les époques et dans toutes les cultures chez une majorité d’individus. Dans la préface de son essai consacré aux peurs (An 1000 an 2000, sur les traces de nos peurs, 1997), l’historien Georges Duby écrit : « Les gens qui vivaient il y a huit ou dix siècles n’étaient ni plus ni moins inquiets que nous ». Si l’on se met dans la peau des hommes d’autrefois, l’on se rend compte en effet que des peurs similaires étaient ressenties.

Aujourd’hui comme hier, existe d’abord une peur toujours très vivace, c’est celle de la misère, de la précarité sociale. L’homme médiéval avait le ventre noué par la crainte de manquer, par la peur de la faim et du lendemain. Mal nourri, il peinait à tirer son pain du sol avec ses outils dérisoires. De nos jours, avec la hausse du coût des biens alimentaires et la raréfaction de certaines ressources, l’homme contemporain n’est pas si éloigné de son ancêtre. Beaucoup vivent avec cette peur de manquer un jour de nourriture. La détresse qui s’est exprimée lors du mouvement des gilets jaunes, en Octobre 2018, en témoigne. Les manifestants vivaient difficilement l'augmentation du prix des carburants et réclamaient une amélioration de leur niveau de vie.

Aujourd’hui comme hier, se fait également toujours ressentir, de manière plus ou moins latente, la peur de l’autre. Les hommes du Moyen-âge vivaient dans la crainte de voir surgir des hordes provoquant terreur et angoisse dans le monde chrétien. C’était une réalité d’autant plus pressante que le risque d’invasion était multiple, on craignait des attaques de Vikings venant du Nord, de Mongols venant d’Asie, de Sarrasins venant du Moyen-Orient. Certes la crainte de telles attaques n’existe plus sous cette forme aujourd’hui, mais la menace de la guerre, elle, est toujours réelle. L’actualité nous l’a rappelée depuis peu avec la guerre qui frappe aux portes de l’Europe, en Ukraine. La

menace d’une attaque nucléaire n’a jamais été si tangible. L’horloge de l’apocalypse est proche de minuit. On craint même l’acheminement possible vers une 3ème guerre mondiale, si l’escalade de la violence n’est pas freinée.

Aujourd’hui comme hier, enfin, l’Homme a toujours craint de mourir, contaminé par une maladie. Les épidémies sont des fléaux cycliques et intemporels. La peste est par exemple un mal qui a provoqué une peur immense au Moyen Âge. Elle a ravagé l’Europe et a fauché le tiers de sa population durant l’été 1348. Récemment, le monde entier a également été tragiquement ébranlé par une épidémie de grande ampleur, la pandémie de covid-19, qui a provoqué plusieurs millions de morts. Les villes se sont repliées sur elles-mêmes. Beaucoup redoutent encore une défaillance totale de leurs défenses immunitaires face à un nouveau variant.

Ainsi de nombreuses peurs demeurent. Il n’y a qu’à se pencher un peu vers les profondeurs de la conscience pour découvrir des attitudes intemporelles. Certaines de nos craintes sont encore très proches de celles de nos ancêtres. Mais de nouveaux dangers n’ont-ils pas émergé ?

A l’évidence, il semble qu’inversement, certaines peurs soient nouvelles, proprement contemporaines. Quelles sont les peurs d’aujourd’hui ? De quoi avons-nous peur ? Que redoutons-nous ? « Notre société est inquiète (…) une inquiétude, une angoisse, est tapie au fonde nous » écrit Georges Duby dans l’introduction de son essai (An 1000 an 2000, sur les traces de nos peurs, 1997, p.13). Si nous tentons d’en décliner les principales, voici celles que nous pouvons nommer : la peur du progrès et des dérives scientifiques, la peur d’une insécurité permanente et d’une menace terrorriste, la peur d’une dégradation de notre environnement.

Notre société a tout d’abord été emportée par un tel progrès fantastique depuis un demi-siècle qu’il cristallise de nouvelles angoisses. Alors que jusqu’au XIXe siècle, l’homme mettait sa confiance dans le progrès scientifique, il était persuadé qu’un décuplant son pouvoir et en augmentant ses capacités, il pourrait améliorer sa condition (le terme « progrès » ne vient-il pas lui-même du latin progressus qui signifie « marche en avant »), aujourd’hui il craint ses excès et ses dérives, transgressant les lois du vivant et menaçant les grands équilibres. La rationalité scientifique semble perdre de son aura à mesure qu’elle transgresse des limites et se montre imprévisible dans ses effets. Les nouvelles technologies, la robotisation, les manipulations génétiques, le nucléaire sont autant de domaines qui génèrent des inquiétudes. De nombreux films ou séries reflètent ces

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