Julien Sorel, un héros
Dissertation : Julien Sorel, un héros. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar popolili • 21 Avril 2020 • Dissertation • 1 636 Mots (7 Pages) • 35 068 Vues
Julien Sorel, protagoniste du célèbre roman Le Rouge et le Noir écrit par Stendhal en 1830, est un héros singulier. Fils de charpentier, il est ambitieux, à la recherche de reconnaissance sociale et de pouvoir. Il prend exemple sur Napoléon Bonaparte, pas toujours apprécié sous la Restauration. Julien est décrit d’apparence fragile néanmoins séduisant et d’un caractère passionné. Dans le roman, il cherche l’amour maternel, dont il a été privé enfant, aux côtés de Mme de Rênal. Il entretient avec elle une liaison amoureuse ainsi qu’avec Mathilde de la Mole. Ces deux femmes sont l’opposé l’une de l’autre : la première, douce et réservée, pour ne pas dire naïve, et la seconce fougueuse, intelligente et orgueilleuse. Dans cette composition, nous allons nous intéresser à quels types de héros Julien Sorel appartient. Nous verrons dans un premier temps qu’il est un héros moderne et romantique, bien loin de l’image du héros antique. Puis qu’il s’apparente plus au genre de l’anti-héros. Enfin nous montrerons qu’il partage des caractéristiques avec les héros négatifs voir même, à certains moments, avec les héros positifs.
Tout d’abord, le mot héros peut prendre, en terme général, différentes définitions : une personne qui se distingue par sa bravoure et ses mérites exceptionnels telle qu’un soldat mort à la guerre. Un héros peut aussi être le personnage principal d’une œuvre littéraire, dramatique ou cinématographique, par exemple Jean Valjean dans Les Misérables de Victor Hugo. Ou encore, une personne à qui est arrivée une aventure, qui a joué le rôle principal dans une certaine situation. Pour héros dans l’actualité, on pourrait prendre le personnel soignant ainsi que toutes les personnes qui se battent contre le Covid-19 et qui sauvent des vies tous les jours.
Pour revenir à Julien, on peut, de premier abord, dire qu’il est bien loin du héros tragique antique. En effet, en Grèce ancienne, où la guerre est fréquente et la compétition fondamentale, le héros est très souvent un combattant à la généalogie prestigieuse : demi-dieux chez Hésiode et chef de guerre ou roi chez Homère. Les demi-dieux sont issus de l’union entre une mortelle et un dieu, voir d’un mortel et d’une déesse tel Achille. Julien Sorel ne s’apparente pas plus au héros romain, ni au Saint du Moyen-Age et encore moins au roi-héros comme Henri IV ou Louis XIV. Le protagoniste inventé par Stendhal est, tout d’abord, un héros moderne et romantique. En effet, Julien Sorel est exclu de la société où il n’y trouve pas sa place (point affiné plus tard avec le thème de l’anti-héros). Il souffre non seulement physiquement, car il est battu par son père et ses frères, mais aussi psychologiquement. Il est un individu solitaire. La Nature est pour lui un moyen de s’échapper. Dans le chapitre 12 de la partie I, il passe la nuit dans une grotte où il se sent bien : « Julien resta dans cette grotte plus heureux qu’il ne l’avait été de la vie, agité par ses rêveries et par son bonheur de liberté ». Enfin, le héros romantique accorde une importance au moi, avec un amour propre prononcé. Cette caractéristique est bien présente chez Julien qui est très orgueilleux. Il est convaincu d’être amené à faire de grandes choses et ne veut pas uniquement une ascension sociale mais aussi du respect, de la grandeur et du mérite. Il se compare également à Médée, fille du roi de Colchide et de l’Océanide Idye, lorsqu’il craint d’être déshonoré par les prétendants de Mathilde dans le chapitre 14 partie II : « Au milieu de tant de périls il me reste Moi ». On peut aussi affirmer que Julien Sorel a des caractéristiques du héros d’apprentissage. Il est confronté directement à son environnement alors qu’il est encore jeune, naïf et plein d’idéaux qu’il trouve dans la lecture du Mémorial de Sainte-Hélène, recueil des mémoires de Napoléon Bonaparte.
En conclusion, nous pouvons affirmer que Julien Sorel est un héros moderne, car il se détache des héros de l’antiquité et du Moyen-Age. Ensuite, il est aussi un héros romantique, exclu de la société, solitaire et proche de la Nature.
Julien Sorel se rattache également au genre plus particulier de l’anti-héros. Ces derniers sont généralement les personnages centraux des œuvres littéraires. Cependant ce sont des êtres banals qui n’agissent pas. En effet, leurs vies sont mornes et monotones. Ils ne possèdent pas de capacités physiques, intellectuelles, ou morales hors du commun. Stendhal fait le portrait de Julien tel un jeune homme fragile. Dans le chapitre 4 de la première partie, l’auteur écrit « C’était un petit jeune homme de dix-huit à dix-neuf ans, faible en apparence, avec des traits irréguliers, mais délicats, et un nez aquilin ». Il est également battu par son père et ses frères : « Un second coup aussi violent, donné sur la tête en forme de calotte, lui fit perdre l’équilibre ». Cependant, contrairement aux anti-héros classiques, Julien possède des habilités intellectuelles. Ainsi, il connaît la bible par cœur et parle le latin : « Sur la réponse de Julien, une demi phrase latine fut lue au hasard. Il récita : sa mémoire se trouva fidèle, et ce prodige fut admiré avec toute la bruyante énergie de la fin d’un dîner », chapitre 22 partie I. Julien Sorel se caractérise aussi par son exclusion au monde. En effet, il est manipulateur, hypocrite et opportuniste. Il hésite entre les domaines de l’armée et de la religion pour se faire une place dans la société. Ces points seront détaillés dans la dernière partie sur le héros négatif. D’autre part, Julien est ultra-ambitieux. Né dans une famille modeste, il ne rêve que de conquérir une meilleure place sociale. Il va donc connaître une ascension sociale importante. D’abord précepteur de latin chez Monsieur de Rênal, maire de Verrières, puis séminariste et enfin secrétaire du marquis de la Mole. Ce dernier finit même par lui donner des terres ainsi qu’un poste de lieutenant ; il l’anoblit également en lui attribuant le titre de Julien de la Vernaye. Julien ne souhaite pas simplement atteindre une forme de richesse : il est motivé par le désir de reconnaissance de soi malgré son origine modeste. Son objectif est, comme son modèle Napoléon, de devenir « quelqu’un », lui, le fils d’un charpentier de province. Il n’est aux yeux de certains qu’un « paysan » et veut une vengeance sociale. Il entretient d’ailleurs avec la richesse et la bourgeoisie des rapports paradoxaux, voulant à la fois appartenir à cette classe sociale, tout en la rejetant. Durant son procès dans le chapitre 41 partie II, il prononce un réquisitoire contre la justice des bourgeois : « Vous voyez en moi un paysan », « Je ne vois point sur les bancs des jurés quelque paysan enrichi, mais uniquement des bourgeois indignés… ».
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