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Le Statut Juridique De L'embryon

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Par   •  23 Avril 2013  •  2 753 Mots (12 Pages)  •  1 396 Vues

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Pendant l’été 2005, le scandale des enfants mort-nés découverts à l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul de Paris a ravivé la polémique sur le sort des fœtus après leur mort. Il est venu rappeler l’enjeu émotionnel et juridique qui entoure le statut et le traitement de l’enfant à naître.

Il faut d’abord rappeler la distinction entre l’embryon et le fœtus, qui désignent deux stades différents du développement de l’être humain dans le ventre de la mère. Les définitions scientifiques, basées sur une conception temporelle et qui définissent un seuil de passage du premier état au second, divergent. Mais l’on appelle généralement l'être humain un embryon pendant le premier stade de son développement qui dure 8 semaines et commence à l'instant de la fécondation. Au delà de ce stade et jusqu'à la fin de la grossesse, le futur être humain prend le nom de fœtus. Cependant, cette distinction temporelle s’avère inutile en droit et l’embryon est plus généralement entendu dans son sens générique de produit de la conception humaine, jusqu’à la naissance.

Les progrès scientifiques, comme l’émergence de l’échographie obstétricale et du diagnostic prénatal, ont conduit à porter un autre regard sur l’embryon. Traditionnellement, il était considéré comme un enfant à naître, mais peu à peu, l’évolution de la médecine et de la société ont amené le législateur et les scientifiques à regarder l’embryon comme un être dont on peut, par exemple, interrompre le développement dans l’intérêt des parents. L’interruption volontaire de grossesse (IVG), les techniques d’assistance médicale à la procréation sont désormais autorisées, l’embryon peut être stocké, congelé, donné à la recherche, voire détruit, avec l’accord des parents.

En conséquence de ces évolutions, l’embryon est chargé d’enjeux affectifs, idéologiques et scientifiques, qu’il soit conçu in vivo (dans un organisme vivant, ici l’utérus de la mère) ou in vitro (en éprouvette ou en laboratoire, dans des conditions artificielles). Pour les futurs parents, c’est déjà un enfant, à qui ils attribuent parfois un prénom. Pour certains Chrétiens, il est un être humain à part entière, dès le moment de la conception. Pour les médecins, il est un patient auquel ils apportent assistance et soins. Enfin, pour les scientifiques, il est un sujet d’expérimentation prometteur. En effet, parce qu’il génère les cellules souches, seules capables de produire tous les tissus du corps humain, l’embryon représente un véritable espoir pour le traitement et la guérison de certaines maladies, comme par exemple la maladie de Parkinson. Pour cette raison, des équipes scientifiques ont demandé l’autorisation de travailler sur les embryons « surnuméraires », crées lors de fécondations in vitro mais non transférés dans le corps de la mère.

Sur le terrain du droit, comment le législateur et les juristes jonglent-ils entre ces différentes perceptions de l’embryon ? Comment peuvent-ils répondre au deuil des familles en cas de perte d’un embryon tout en protégeant le droit acquis à l’IVG ou à la procréation médicale assistée ? Face à la summa divisio classique du droit, qui ne connaît que deux catégories juridiques, les personnes et les choses, quel statut est accordé à l’embryon, et en conséquence, quelle protection ?

Nous verrons que si le statut juridique de l’embryon doit s’inscrire dans cette dualité personne/ chose, son cas particulier lui confère en réalité un statut flou (I), qui ne le prive cependant pas de toute protection juridique (II).

I) Ni « personne », ni « chose » : l’embryon souffre d’un statut juridique flou…

L’embryon souffre indéniablement d’un manque de statut juridique clairement défini dans la législation française. S’il n’est pas reconnu comme une personne (A), sa qualification de chose est également difficilement acceptée (B). Face à cette inadaptation de la summa divisio du droit au cas de l’embryon, apparaissent des tentatives pour établir une troisième voie juridique (C).

A. L’embryon n’est pas une personne

En droit français, c’est la personnalité juridique qui confère des droits subjectifs : seules les personnes peuvent être sujet de droit tandis que les choses ne peuvent être qu’objet de droit. Or, l’embryon n’est reconnu ni comme une personne juridique, telle que la définit le code civil, ni comme une personne humaine, telle que la protège le code pénal.

En effet, le droit civil ne fait de l’enfant à naître un sujet de droit, donc une personne, qu’à condition qu’il naisse vivant et viable, et exclut donc l’embryon de cette définition. De même, l’adage « infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus agitur » (l’enfant conçu est tenu pour né dès qu’il s’agit de son intérêt), reconnu comme principe général du droit, permet uniquement de faire rétroagir la personnalité juridique à la date de la conception au profit d’un enfant né vivant et viable. Par ailleurs, l’embryon n’est pas non plus reconnu comme une personne humaine, protégée par le droit pénal. Car c’est bien la naissance qui fait surgir la personne humaine, en même temps que son double juridique. Ainsi l’embryon ne peut pas bénéficier d’un acte de naissance mais seulement d’un acte d’enfant sans vie, institué par la loi du 8 janvier 1993.

On le voit, la reconnaissance de l’embryon comme être humain (difficilement contestable) ne fait cependant pas de lui une personne. En effet, dire d’un embryon qu’il est une personne pourrait potentiellement poser plusieurs difficultés : cela reviendrait à assimiler l’IVG à un infanticide, mais également à marquer la fin de toute recherche médicale sur l’embryon. En droit, donc, l’embryon n’a pas d’existence juridique autonome en dehors de la personne de la mère. C’est la mère et non l’embryon qui peut bénéficier d’une protection pénale, liée à sa volonté de mener sa grossesse à terme.

On peut effectivement se demander quelle serait la réelle utilité de conférer la personnalité juridique à un embryon humain dès sa conception. A quoi pourrait servir à un embryon d’être titulaire de droits, tel qu’hériter ou signer un contrat, s’il ne naît pas ? Cela serait d’autant plus inconcevable en ce qui concerne l’embryon conçu in vitro.

B. Une qualification de « chose » critiquée

Si l’embryon n’est pas une personne, c’est donc, selon la summa divisio du droit, qu’il est, par l’effet d’une définition

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