L’École doit- elle être un espace fraternel ?

L’École doit- elle être un espace fraternel ?

Plan

I) La nécessité de l’École comme espace dédié à la Fraternité

1. a)  La Fraternité à l’École pourquoi ?
2. b)  La citoyenneté en jeu
3. c)  L’éducation à la fraternité

II) La fraternité comme expérience et non comme litanie

1. a)  Le faire ensemble plutôt que le vivre ensemble
2. b)  Pour une fraternité comprise et vécue par toute la communauté éducative
3. c)  Les piliers de cet espace fraternel

« La liberté se nourrit de l'égalité. L'égalité s'allaite de la fraternité. Et la fraternité stimule la liberté » (Nabil Alami). Cette citation rassemble le tryptique « Liberté, Égalité, Fraternité » de la République Française. Non seulement elle réunit ces principes de la devise française, mais elle montre surtout le caractère complémentaire et indissociable de ces trois notions. Il est vrai qu’on ne peut se sentir libre que si on éprouve un sentiment d’égalité. Et dans la mesure où la fraternité est aussi une entente, une harmonie entre plusieurs personnes on ne peut la ressentir que si l’on considère autrui comme son égal. Cette interdépendance échappe trop souvent aux hommes et aux institutions françaises de façon générale. Telle une incantation cette devise est répétée, récitée, apprise ou au moins évoquée dans tous les établissements scolaires de notre territoire. En effet, l’une des missions principales de l’École est de transmettre aux élèves l'ensemble des valeurs républicaines afin qu’ils deviennent chacun un citoyen responsable. Et pourtant malgré l’énergie qu’elle consacre à faire retenir ces principes fondamentaux, l’École Républicaine est fait face à une crise de la citoyenneté et à une perte de cohésion sociale indéniable. Ces caractères élitiste et compétitif jouent probablement un rôle dans cette crise. Il ne s’agit pas de dire que l’élitisme et la compétition sont négatifs. Mais de les appliquer autrement. Car les jeunes français font parti d’une École qui favorise implicitement ou explicitement l’individualisme plutôt que le fraternalisme. Ce qui semble un paradoxe face aux valeurs que cette même École cherche à transmettre. On peut donc se demander pourquoi est-il crucial que l’École de la République devienne un espace fraternel et quels sont les enjeux qui y sont liés ?
Dans un premier temps nous montrerons pourquoi une école fraternelle est nécessaire, puis dans une deuxième partie nous verrons comment vivre la fraternité à l’école et quel rôle précieux joue la communauté éducative dans cette quête de la fraternité.

Le mot Fraternité vient du latin « fraternitas », qui signifie relations entre frères, entre peuples. Il est lui-même dérivé de frater, frère. L'article 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme nous dit : "Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». Tout individu qui vivrait la fraternité de façon effective pourrait ainsi connaître une vraie liberté et une vraie égalité.

La fraternité dont un des synonymes pourrait être la solidarité, doit être intégrée dans les projets de vie de nos civilisations et par extension dans l’enseignement que l’on transmet aux nouvelles générations. L’École à pour but d’éduquer et d’aider la jeunesse à se construire en faisant en sorte que nos jeunes deviennent des individus libres, capables de faire leurs propres choix en leur âme et conscience. L’objectif étant que chaque élève devienne un citoyen responsable capable de prendre en compte les besoins d’autrui. L'École est toujours l’image de la société dont elle est issue. Si l'école est un instrument de reproduction d'une société, il y a bien des chances qu'on y retrouve, dans ses mécanismes, les valeurs de cette société. L’éducation prodiguée aujourd’hui aux enfants aura donc forcément une incidence sur l'avenir. De façon générale, il vaut mieux faire en sorte que les conséquences soient positives et non négatives même s’il n’existe pas de risque zéro. Ce qui est sûr et d’ailleurs on a tendance à l’oublier, c’est que l’École contribue à modifier les sociétés. Elle les modifie en fonction des valeurs promues en son sein. Par exemple, si on veut une société plus solidaire, plus fraternelle, il est préférable d’inculquer la fraternité aux futurs citoyens qui composeront cette société mais surtout de la faire vivre de façon effective.  

Dans le littré la définition de la fraternité est la suivante : « L'amour universel qui unit tous les membres de la famille humaine ». Cette définition rejoint la vision de la fraternité d’Abdennour Bidar. Pour lui, la fraternité correspond à un sentiment de proximité éprouvé entre être humain au niveau de la famille mais aussi avec des personnes inconnues avec lesquelles on a partagé quelque chose. Il pense que c’est elle qui permet aussi de prendre conscience que nous appartenons tous à la grande famille des êtres humains. La fraternité permet de se mettre à la place de l’autre, d’essayer de le comprendre mais surtout de s’engager à l’aider dans la mesure du possible. Au nom de la fraternité on arrive à défendre toute personne atteinte dans ses droits qu’on la connaisse ou pas. Une plus grande fraternité dans les établissements scolaires permettrait aux élèves en échec scolaires ou stigmatisés par leurs origines sociales, de reprendre espoir, de retrouver confiance en eux. Au lieu de se sentir exclus de l’École voire de la société aussi.

Nous parlons de l’École mais cela est valable pour toutes les personnes en situation d’exclusion, avec plus de fraternité elles se sentiraient appartenir à la société, soutenues par les autres et concernées par leur statut de citoyen. Cela améliorerait considérablement la cohésion sociale qui est en train de se disloquer progressivement. Notre République et son École se veulent démocratiques, la démocratie sans la fraternité n’est pas concevable. La démocratie favorise un mode d'existence collectif, où les mêmes avantages sont accordés à tous. Si ces conditions ne sont pas réunies on ne peut avoir une vraie démocratie. En effet, sans une véritable fraternité une démocratie restera toujours inachevée et ne pourra jamais faire connaître la vraie citoyenneté. Or la citoyenneté est l'une des composantes du lien social car elle confère l'égalité des droits à chacun. La nécessité de l’École comme espace fraternel est donc plus qu’urgente, il en va de la mise en danger de la citoyenneté. Car comment ferait-on sans elle qui doit fournir aux jeunes des savoirs, des savoir-faire et une compréhension de la société. Ce qui leur permettra ainsi d’être des citoyens éclairés moralement et socialement responsables. De plus, la citoyenneté vise aussi à installer la confiance et la conviction chez l’individu qu’il peut agir en coopération avec l’autre quel que soit ses origines, sa religion, son statut social.

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