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Par   •  20 Avril 2014  •  1 200 Mots (5 Pages)  •  663 Vues

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1. La solitude radicale et tragique de Bérenger

a) Un discours particulier : le monologue

Le recours au monologue est ici justifié par l'évolution du « drame » qui a conduit à la métamorphose progressive de tous les personnages. Bérenger est le dernier homme, il n'a plus d'interlocuteur. Un accessoire sur scène souligne cette situation : la glace ; Bérenger se parle de fait à lui-même (« il va vers la glace »l.3, « il contemple sa poitrine dans la glace »l.12).

Aucune marque du discours dialogué, fréquemment utilisé au sein même d'un monologue : il n'y a donc plus aucun destinataire même potentiel, même imaginaire, à la parole de Bérenger ; plus personne ne parle sa langue. Toute communication est donc impossible et le passage radicalise cette faillite de la parole présente dans toute la pièce.

Disposition spécifique du discours théâtral qui confère au public une place particulière et problématique : est-il l'ultime destinataire de la parole de Bérenger (et de Ionesco), selon le jeu de la double énonciation, ou est-il inclus, par une sorte de manœuvre provocante et déstabilisante du dramaturge, dans cet espace rhinocérique qui encercle Bérenger ? En effet, celui-ci n'est pas exactement seul sur scène : il est cerné par les rhinocéros, figurés par les têtes accrochées au mur et dont la présence est accentuée par les barrissements. D'ailleurs, à la fin du monologue, Bérenger semble s'adresser à ces rhinocéros, dans une forme de défi final :

Il se retourne face au mur du fond [...] tout en criant ».

b) Bérenger et les autres

Solitude de Bérenger contre tous : on relèvera l'opposition du singulier et du pluriel, et celles entre je et « eux »( l.3, 5, 19 ), entre « je » et « tout le monde »( l.35, 37).

Déplacement de la norme. Comme Bérenger est le dernier de son espèce, il est devenu « l'anormal », alors que les rhinocéros constituent la norme de référence : il se qualifie de « monstre »l.27 et se compare, à son désavantage, aux rhinocéros

Les rhinocéros sont connotés positivement. Le contraste de la beauté et de la laideur (« je ne suis pas beau »l.1, « ce sont eux qui sont beaux »l.3) est développé à travers les oppositions de formes (« corne »l.5, « Front plat »l.6 et « traits tombants »l.7), de texture (« moites »l.11, « rugueuses »l.11 / « flasque »l.13, « dure »l.14 / « sans poils »l.16, « poilu »l.14) ou de couleur (« trop blanc »l.13, « magnifique couleur vert sombre »l.15).

Enfin, les barrissements apparaissent comme des « chants »l.17 opposés à la faiblesse de sa propre voix, humaine. On aboutit dès lors à un éloge des rhinocéros qui révèle que la solitude et la différence, c'est-à-dire le simple fait d'être soi, sont difficiles à porter, à assumer.

Le sentiment dominant de Bérenger est ici la honte (« j'ai trop honte »l.31, « comme j'ai mauvaise conscience »l.25, « J'ai eu tort »l.4). Le monologue exprime la douleur de Bérenger, qui est d'abord douleur d'être lui-même. Ponctuation expressive : phrases exclamatives, interjections (« hélas ! »l.5 « ah ! »l.14), répétitions désespérées (« jamais, jamais »l.28).

2 2. La tentation de la métamorphose

3 a) Devenir rhinocéros !

Le souhait de la métamorphose s'exprime fortement dans ce final : répétition du verbe vouloir au conditionnel « je voudrais » l.4, l.14, 29 + propositions introduites par « comme » ou par « si ». De même, les formules comparatives révèlent le désir de devenir rhinocéros : « être comme eux »l.5, « faire comme eux » l.19. Enfin, Bérenger tente d'adopter le barrissement

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