Fake news et coronavirus au Maroc : lecture d’un discours parasite
Fiche : Fake news et coronavirus au Maroc : lecture d’un discours parasite. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Chercheur de savoir • 10 Décembre 2022 • Fiche • 2 351 Mots (10 Pages) • 322 Vues
Notes pour la culture
Fake news et coronavirus au Maroc : lecture d’un discours parasite
« Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'opinion. » Paul Valéry
Les Fake news et les rumeurs sont des discours performatifs et constructions du sens d’un réel institué abusivement comme vrai et sincère. Le scope de ce papier cherche à interroger et à expliciter le fonctionnement interne d’un discours viral sur une pandémie (Covid19) dans les médias.
Ce discours ne se contente pas d’affirmer, mais vise aussi à agir sur autrui car parler ne vise pas seulement à exprimer la pensée ou échanger des informations mais à accomplir aussi une action « je te promets de venir ».
- les Fakes news : fausses informations, des actes d’énonciations (falsifiés) qui visent à susciter de l’émotion et de l’opinion désactivant la pensée critique pour tromper. Ils se répandent via Internet et les réseaux sociaux de manière rapide, massive, spectaculaire.
Donc, les médias –réseaux sociaux- sont le théâtre des Fake news, rumeurs, certitudes, convictions, radicalisations => Amplification de l’angoisse, la psychose, la Fitna.
La crise de la Covid 19 a dévoilé la centralité des médias et des médias sociaux dans la vie de l’individu et de la société.
- La combinaison de la pandémie de la Covid19 (inconnue, invisible, dévastatrice, demande urgente de solution, de vaccin) , de la sur-médiatisation mondiale et d’une consommation médiatique excessive sans esprit critique, émotionnelle, sans distance engendre immanquablement pathos, peur, angoisse, traumatisme…
Plus les contradictoires des sachants et des soignants sur le virus qui, au lieu de donner la vérité, ont contribué à semer le trouble et à décrédibiliser la science et la médecine. Ainsi, les portes s’ouvrent aux informations infondées et invérifiables dans les réseaux sociaux où les angoisses s’amplifient.
Quatre aspects retiendront notre attention dans ce projet : la structure thématique, basée sur la classification des thèmes investis, la structure formelle, le profil des « fakephages », la stratégie de lutte…
La structure thématique
On y trouve les médias officiels qui démêlent le vrai du faux à propos de la pandémie.
l’ensemble des énonciations prônant le « faux en treize catégories sémantiques suivantes :
Le tragique et l’apocalyptique (infection et mort) : décès de médecins, foyers d’infection, décès du premier vacciné marocain…
Le miraculeux et le charlatanisme : le café qui guérit le coronavirus, les recettes farfelues contre le virus…
L’euphorie et la fierté nationale: Le Maroc se place en tête du classement des 10 pays les plus sûrs face à la pandémie du nouveau coronavirus…
Le milieu médical : remise en cause de la fiabilité des tests…
L’autorité et le système pénitentiaire: les autorités cachent la vérité…
Le Maroc et l’étranger : une vidéo montre une descente de police pour non -respect du confinement en Algérie et au Maroc…
Le déni : inexistence du coronavirus, Me Naima…
Les animaux et l’écologie : sangliers en ville, contamination probable du cheptel..
Etc.
En fait, les fausses informations se concentrent sur les six domaines du : milieu médical, l’autorité, l’économie urbaine, le rapport à l’étranger, l’éducation, la psychologie du Marocain, et épargnent les secteurs : tourisme, la culture, l’agriculture, l’industrie, le sport….
Effet : L’isotopie dominante est donc celle du « faux dysphorique » : le mensonge matraque les internautes et suscite l’effet de sens que tout va mal, tout est déréglé, qu’il n’ y a aucun espoir.
Absence des théories complotistes.
Les Fake News marocaines sont généralement locales et presqu’entièrement déconnectées des mensonges mondialisés.
La structure formelle
Quand un énoncé est partiellement ou totalement falsifié, c’est toute son énonciation qui est atteinte. le philosophe J. Austin qualifie le mensonge d’« acte parasite non sérieux ».
Il se déploie selon une énonciation tripolaire :
- l’agent menteur : a l’intention de dissimuler un énoncé vrai, et de transmettre un énoncé faux, tout en persuadant autrui que le faux est la seule vérité disponible ;.
- l’instrument médium qui se compose du médium (à savoir le message) et du canal diffuseur (l’écran, le Smartphone, les réseaux sociaux, Internet) et qui est à la fois massif, instantané et addictif.
- le patient (la cible, la victime) : qui en toute bonne foi, délègue sa confiance au menteur et adhère sans distance à ses propos mensongers. Il est surtout incapable de distinguer une information vraie d’une rumeur, étant démuni de l’esprit critique et de la capacité de croiser les sources d’informations pour détecter le faux (le fact-checking).
Circulation :
la circulation des Fake news passe de la réception numérique et écranique à l’appropriation orale le patient se l’approprie, et devient détenteur de la vérité auprès de ceux qui n’ont pas la chance de posséder un Smartphone. Pire : le Smartphone , le Whatsapp, le Facebook se substituent irrésistiblement aux sources d’information classiques.
Constats sur les corona-fake :
- Le message se compose souvent de deux éléments (le thème et le propos ou le prédicat) : dans le cas du Ministère de l’éducation par exemple, le thème référentiel est le Ministère lui-même, le propos est l’ensemble des fausses informations qu’on lui attribue (année blanche, réussite collective.
- le message est généralement assertif et constatif (il affirme l’existence d’un référent et d’un procès sémantique fictifs, non attestés) mais, sa visée sous-jacente est performative (pousser le récepteur à prendre position).
- la mise en forme est souvent sobre sans recherche esthétique ni plastique, avec une syntaxe simple et un vocabulaire très rudimentaire, incapable d’exprimer une pensée complexe et nuancée.
- le message ne respecte pas les maximes conversationnelles du philosophe P. Grice, particulièrement le principe de qualité selon lequel il faut veiller à la véracité de l’information
- certains messages se basent sur le détournement d’images existantes (les logos, les photos…).
Deux types de Fake news : les uns endogènes, fabriqués localement de manière artisanale et naïve (ce sont les plus nombreux) ; les autres exogènes, empruntés et recyclés à partir des réseaux sociaux étrangers avec une teneur technique et argumentative professionnelles. La connexion entre ces deux types est aléatoire et sporadique (d'une manière irrégulière )…
La darija marocaine est omniprésente en raison d’une part de l’analphabétisme graphique et iconique des usagers, et d’autre part en vue de toucher rapidement le plus grand nombre de cibles.
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