« Les Nouvelles Théories De La Croissance Et Leurs Implications Pour La Politique économique Et L'analyse De La Concurrence Internationale », Revue Française D'Economie, été 1996.
Commentaires Composés : « Les Nouvelles Théories De La Croissance Et Leurs Implications Pour La Politique économique Et L'analyse De La Concurrence Internationale », Revue Française D'Economie, été 1996.. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar imenou • 27 Mars 2013 • 4 899 Mots (20 Pages) • 2 003 Vues
Gilles SAINT-PAUL, « Les nouvelles théories de la croissance et leurs implications pour la politique économique et l'analyse de la concurrence internationale »,
Revue Française d’Economie, été 1996.
En cent ans, le niveau de vie a été multiplié par dix. Il s'agit d'un fait macroéconomique majeur, sans doute le plus important. On se doit donc de l'expliquer.
L'analyse traditionnelle de la croissance, que l'on peut résumer par le modèle de R. Solow [1956], se bornait à la théorie de l'accumulation du capital. Une économie croît parce qu'elle consacre une partie de ses ressources et de sa production à accroître le stock de capital physique (machines, etc.) dont elle dispose. Il s'agit là, au niveau global, d'une forme d'épargne, qui permet de consommer plus demain en consommant moins aujourd'hui - donc de croître. Comme ce processus fait l'objet de rendements décroissants (à cause, en particulier, des limites à la quantité de main-d'oeuvre disponible), il ne peut conduire à une croissance soutenue (1). En fait, l'accumulation de capital n'explique qu'un petit tiers de la croissance totale, et elle ne joue un rôle que dans l'ajustement transitoire vers un état stationnaire. Cet ajustement prend au plus, pour des paramètres réalistes, une dizaine d'années. On ne peut donc expliquer la croissance soutenue qui a prévalu pendant deux cents ans en invoquant la simple accumulation du capital. Si l'accumulation de capital physique était la force motrice de la croissance, l'Union soviétique, qui y a sacrifié une part énorme de sa consommation, serait aujourd'hui la première puissance économique mondiale et le communisme ne se serait pas effondré.
Pour expliquer la croissance, les théories traditionnelles font donc appel à une boîte noire appelée « progrès technique ». Le progrès technique augmente régulièrement la productivité de chaque employé, permettant à l'économie de croître à un taux égal à celui du progrès technique. Ainsi, au bout de quelques années, tout se passe comme si chaque employé en valait deux, et la production a doublé.
Les théories traditionnelles étaient donc tautologiques puisqu'elles expliquaient la croissance à l'aide d'un facteur inexpliqué : le progrès technique.
Les « nouvelles théories de la croissance », développées dans les années quatre-vingt sous l'impulsion de Paul Romer [1986, 1987], se proposent d'expliquer ce progrès technique et de caractériser les conditions sous lesquelles il peut conduire à une croissance soutenue. Les nouvelles théories ont ainsi étudié le rôle de l'éducation et de l'investissement en capital humain dans l'amélioration de la qualité de la main d'oeuvre, celui de l'apprentissage sur le tas (« learning by doing ») dans l'amélioration des techniques de production, celui de la recherche et développement dans la génération de nouveaux produits et techniques.
Un des thèmes majeurs des nouvelles théories est l'importance des « externalités » pour le processus de croissance. Une externalité est une interaction entre individus pour laquelle les participants ne sont pas rémunérés (ou taxés) par le marché. Le fleuriste qui s'installe à côté d'un apiculteur accroît la production de miel, mais n'est pas rémunéré pour cela par l'apiculteur. En présence d'externalités, les marchés n'assurent pas un fonctionnement efficace de l'économie : par exemple, il n'y aura pas assez de fleuristes qui s'installent à côté d'apiculteurs. Cette inefficacité doit être corrigée par une intervention publique. L'Etat peut ainsi subventionner les apiculteurs pour qu'ils s'installent à côté des fleuristes, ou l'inverse.
Pour les nouvelles théories, les mécanismes les plus importants pour la croissance comportent de fortes externalités. L'acquisition d'éducation est d'autant plus valorisée que les individus avec lesquels on interagit sont eux-mêmes éduqués. Le « learning-by-doing » est un sous-produit de l'activité manufacturière qui n'est pas lui-même rémunéré en tant que tel. La recherche et développement produit de nouvelles idées et de nouveaux savoirs qui, une fois découverts, peuvent être copiés et diffusés à un coût très faible. Ces externalités font que la politique publique est un déterminant important de la croissance et de la richesse des nations.
Les déterminants de la croissance et de la richesse des nations
A partir de ces théories, il est possible d'examiner empiriquement les facteurs favorables à la croissance. C'est ce qu'a fait Barro [1991] dans son article « Economic growth in a cross-section of countries » où il se place dans la perspective d'une comparaison entre pays (voir aussi Levine et Renelt [1992] et Barro et Sala-i-Martin [1992]).
Les principaux résultats de ces travaux sont les suivants. On constate que le déterminant le plus important de la croissance à long terme est le niveau d'éducation, mesuré par la proportion de la population qui participe à l'enseignement secondaire. D'autres facteurs sont également importants, notamment le taux d'investissement, la stabilité politique, et le développement du secteur financier.
Le niveau de ces variables, pour un pays donné, détermine son taux de croissance de long terme. Barro et Sala-i-Martin montrent alors qu'il y a convergence des pays vers ce sentier de croissance. Un pays pauvre rattrapera donc son retard par rapport à un pays riche s'il a le même niveau d'éducation, le même degré de stabilité politique, etc.
Ces résultats sont importants parce que certaines des nouvelles théories de la croissance ont la propriété d'hysteresis : elles impliquent qu'un pays peut ne jamais rattraper le retard de développement dû à un choc transitoire comme une guerre. Les résultats de convergence conditionnelle font que si le pays possède les ingrédients adéquats - notamment en terme de politique économique - alors il rattrapera son retard. Cependant, Barro et Sala-i-Martin ont aussi montré que le rattrapage est très lent puisque seulement 2 % du retard sont comblés chaque année.
On peut également se demander dans quelle mesure le décollage spectaculaire de certains pays (l'Asie du sud-est dans les années soixante-dix et quatre-vingt, l'Amérique latine et la Chine dans les années quatre-vingt-dix) est un simple phénomène de rattrapage, ou si ces pays sont en train de
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