Les spécificités dans la traduction des textes politiques
Fiche : Les spécificités dans la traduction des textes politiques. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Valia23 • 26 Avril 2018 • Fiche • 2 809 Mots (12 Pages) • 946 Vues
Valérie Hocquemiller, assistance à l’Alliance Française de Kazan
Валери Хокемиллер, ассистент в Альянс Францез Казани
Les spécificités de la traduction des textes politiques
Résumé : cet article est dédié à l’étude des spécificités grammaticales, lexicales, syntaxiques et culturelles de la traduction des textes politiques. Il délimite dans une première partie ce que l’on entend par « texte politique », puis dans une deuxième partie liste les particularités de ce type de textes. Il met également en valeur le pouvoir des textes politiques et l’importance de leur traduction.
Mots-clés : traduction, politique, spécificités, culture, discours politique.
Abstract: this article deals with the grammatical, lexical, syntactic and cultural specificities of the translation of political texts. In a first part, it defines the concept of “political texts”, and then in a second part it brings out the particularities of this kind of texts. It also highlights the power of political texts and the importance of their translation.
Key-words: translation, political, specificities, culture, political discourse, speech.
Introduction
En 1714 est rédigé le Traité de Rastatt, qui met fin à la Guerre de Succession d’Espagne. Il s’agit du premier traité international rédigé exclusivement en français, qui dès lors remplace le latin comme langue diplomatique internationale. Selon Metternich, homme politique autrichien du XIXème siècle, une lingua franca est devenue nécessaire pour la diplomatie et le français, avec sa logique et sa précision, apparaît comme idéale et endosse alors ce rôle pendant les XVIIème et XVIIIème siècles.
L’usage du français comme langue diplomatique internationale commence à décliner après la Conférence de Paris en 1919 : le président américain W. Wilson ne parlant pas un mot de français, il fut décidé que le Traité de Versailles serait rédigé en français et en anglais.
Au XIXème siècle, de moins en moins de diplomates parlant français, l’anglais prend petit-à-petit le rôle de langue internationale. Parallèlement, avec la création lors de la deuxième moitié du siècle des grandes institutions internationales, la question de la traduction des textes politiques prend de plus en plus d’importance et s’avère problématique : en dehors des spécificités techniques de ce genre de textes, les éléments culturels ne sont pas à négliger. De plus, de manière évidente, aucune erreur ne peut être admise dans un contexte diplomatique sous peine de terribles conséquences.
Considérant tous ces aspects on peut légitimement se poser la question suivante : quels sont les spécificités de la traduction des textes politiques ? A quoi devrions-nous prêter attention lors de cet exercice ?
Cet article est plus particulièrement dédié aux spécificités grammaticales et techniques de ces textes. Dans une première partie nous définirons ce que sont les textes politiques et aborderons la question de l’importance de leur traduction. Dans une deuxième partie, nous nous intéresserons aux difficultés potentielles de la traduction des textes politiques.
- Définition du champ d’étude
Dans cette partie nous définirons les différents types de textes politiques pris en compte dans cette étude, ainsi que leur but. Nous discuterons ensuite de l’importance de leur traduction.
- Les différents types de discours politiques
Il y a plusieurs types de textes politiques. Tout d’abord, une différence doit être faite entre les textes concernant la politique intérieure d’un pays, ceux concernant sa politique étrangère, et enfin les textes des grands traités internationaux. Les types de textes pris en compte dans le cadre de cette étude sont donc les suivants :
- Les discours et les débats au sein des institutions législatives
- Les adresses directes du gouvernement (président, premier ministre, ministres) à la population
- Les projets de lois et les résolutions, relevant de la politique intérieure ou étrangère
- Les lois promulguées
- Les discours prononcés dans le cadre de campagnes électorales
- Les débats entre partis politiques (lors d’interviews, de débats télévisés ou de meetings)
- La littérature des partis politiques (sous forme par exemple de journaux dédiés aux membres de ces partis)
- Toute production orale ou écrite des partis politiques lors des élections
- Les annonces gouvernementales à propos de la politique intérieure ou étrangère
- Les déclarations adressées aux politiciens ou au peuple d’un pays étranger (y compris les discours prononcés lors de visites officielles à l’étranger)
- Les déclarations de guerre et les négociations et traités de paix
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la traduction des textes relevant de la politique intérieure d’un pays a également de l’importance. La traduction des discours d’un président permet aux gouvernements des autres pays de suivre la politique locale et d’y répondre. Ou encore, dans le cadre de la rédaction d’un traité international, la parfaite compréhension de la législation de chaque pays est indispensable pour rédiger un traité cohérent.
- Le but des textes politiques
Les différents types de texte cités ci-dessus ont deux objectifs distincts :
- Convaincre l’auditoire : c’est le cas par exemple des discours adressés à la population. Il peut s’agir de persuader un électorat, de motiver les foules en cas de crise, ou bien de justifier la légitimité d’une action, ou encore de rassurer les gens (lors de catastrophes).
- Faire appliquer une décision : c’est le cas des lois.
Dans les deux cas, les textes politiques (discours, transcriptions de productions orales) sont la manifestation directe à l’écrit d’une action concrète, avec des conséquences, des effets concrets. C’est pourquoi leur traduction ne doit pas être prise à la légère.
- L’importance de la traduction des textes politiques
De manière évidente, la traduction des textes politiques a plus d’importance que n’importe quel autre type de traduction puisque toute erreur, oubli ou incompréhension peut avoir de sérieuses conséquences, en particulier dans le cadre d’un débat ou d’une conférence internationale. Par exemple dans le cas où plus de deux langues différentes seraient parlées lors d’une conférence, impliquant plusieurs interprètes, chaque participant devrait comprendre très exactement la même chose. Or, dans le cas où un des interprètes ferait une erreur, une partie de l’assemblée serait également induite en erreur et ne comprendrait pas la même chose que le reste de l’auditoire. Ce problème peut être décuplé dans le cas de certaines conférences où il n’a pas été possible de trouver d’interprète pouvant traduire de la langue originale du discours en une autre langue et où un interprète doit donc traduire ce que traduit un autre interprète. Notons par exemple le fameux cas du vote du 10 décembre 2013 à l’Union Européenne : le sujet était le droit à l’avortement. L’eurodéputée portugaise Edith Estrela, défendant le projet de faire de l’avortement un droit européen a appelé ses confrères à rejeter toute autre solution alternative à sa proposition. Or, les interprètes français et allemands ont compris qu’elle appelait à « appuyer » les solutions alternatives, induisant également en erreur les interprètes de nombreuses autres langues, qui traduisaient à partir des traductions françaises et allemandes. Ainsi la proposition Estrela a été rejetée à sept voix près. S’il n’est pas certain que cette erreur soit la seule raison pour laquelle ce projet n’a pas été adopté, il semble légitime de se poser la question.
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