Programme Nationale De Lutte Contre Les Carences En Micronutriments : Quel Impact Sur Le Statut Nutritionnel De La Population Marocain ?

Programme Nationale de lutte contre les carences en micronutriments : Quel impact sur le statut nutritionnel de la population marocain ?

Hassan AGUENAOU

Secrétaire Général de la Société Marocaine de Nutrition

Unité Mixte ce Recherche en nutrition et Alimentation URAC39

Centre Régional de Nutrition pour l’Afrique Associé à l’AIEA

aguenaou@yahoo.com

Programme National de lutte contre les Troubles dus aux Carences en Micronutriments

Le Gouvernement du Maroc, par le biais des Ministères de la Santé et de l’Agriculture, a développé un programme national de lutte multisectorielle et intégrée contre les troubles dus aux carences en micronutriments impliquant l’enrichissement et la fortification des denrées de base de large consommation, la supplémentation en micronutriments des populations vulnérables, l’éducation nutritionnelle et le renforcement des programmes de santé afférents à la nutrition. Une Alliance Nationale pour la Fortification a été créée en 2001 dans le cadre de ce Programme National de lutte contre les Troubles dus aux Carences en Micronutriments. Ce Programme vise à s’attaquer aux différentes facettes des carences en micronutriments en agissant de manière intégrée sur les axes stratégiques à savoir : le secteur de production des aliments fortifiés, la réglementation, et les comportements des consommateurs ainsi que le renforcement des capacités des acteurs concernés. Ce programme a su introduire des démarches adaptées aux réalités marocaines et s’associer le secteur privé, l’Université et la société civile en tant qu’alliés et partenaires à part entière. En visant le capital humain, ce programme s’est inscrit dans l’Initiative Nationale de Développement Humain (INDH) qui représente le cadre adéquat pour fédérer l’ensemble des partenaires en faveur de la réussite de ce programme et de l’inscrire dans une perspective du développement durable. Dix ans après la création de l’Alliance Nationale pour la fortification, le Maroc s’est doté en 2011 d’une stratégie Nationale de Nutrition.

La situation nutritionnelle et épidémiologique au Maroc

Le développement du programme national de lutte contre les carences en micronutriments, fait suite à la détermination de la prévalence des carences en micronutriments au Maroc. En effet, la situation nutritionnelle est inquiétante.

En 2012, la population totale du Maroc est estimée à près de 32,5 millions d'habitants dont 3,4 millions ont moins de cinq ans et 58% résident dans les zones urbaines. L’enquête nationale démographique à passages répétés 2009/10 menée par le Haut Commissariat au Plan du Maroc a révélé que le taux de mortalité maternelle se situe à 112 décès pour 100 000 naissances vivantes (une réduction de 60% par rapport à 1990) avec un ratio 2 fois plus élevé en rural qu’en urbain. La prévalence de la mortalité infanto-juvénile est de 30,2‰ Naissances Vivantes (contre 46‰ Naissances Vivantes en 1997). Sur les 17.500 décès annuels des enfants de moins 5 ans, 61%, soit 10.700 surviennent au cours du premier mois de la vie (mortalité néonatale). Parmi les enfants de moins de 5 ans 14,9% ont un retard de croissance (contre 23% en 1992) et 3,1% souffrent d'insuffisance pondérale. Seulement 27,8% des enfants sont allaités exclusivement au sein pendant les six premiers mois (Contre 15% en 2006).

Concernant les prévalences en micronutriments, 37,2% des femmes enceintes, 31,5% des enfants âgés de 6 mois à 5 ans, 32,6% des femmes en âge de procréer et 18% des hommes sont anémiques (MS, 2000); 41 % des enfants de moins de cinq ans et 10% des femmes en âge de procréer souffrent de carence en vitamine A (MS, 1996); 22% des enfants de 6 à 12 ans présentent un goitre (MS, 1994); la carence en acide folique touche environ 30% des femmes en âge de procréer (CP, 2008). Concernant les maladies non transmissibles ; la prévalence du surpoids passe entre 2001 et 2007 de 27% à 31,1% pour l’ensemble de la population, de 29,2% à 33,3% pour le milieu urbain et de 24,1% à 28,1% pour le milieu rural. L’obésité parmi les adultes âgés de 20 ans et plus est estimée à près de 11,3%, avec 8,9% qui sont dans un stade d’obésité sévère et près de 2,4% souffrent d’obésité morbide (HCP, 2011); 6,6% des marocains sont des diabétiques; 34% des marocains sont hypertendus (MS, 2000); 30 000 marocains, dont plus de 1 000 enfants, sont diagnostiqués avec un cancer chaque année (MS, 2010) ; 29% des marocains ont un taux de cholestérol élevé (plus de 2 g/l) (MS, 2000).

Les objectifs à atteindre

Les objectifs que le gouvernement veut atteindre entre autres d’ici 2019 a travers la stratégie nationale de nutrition 2011-2019, notamment par la stratégie de fortification des aliments par les vitamines et ou par les minéraux sont:

1- Elimination de la carence en vitamine A

2- Elimination de la carence en iode

3- Une prévalence de l’anémie ferriprive de 20% chez les femmes enceintes, de 18% chez les enfants de moins de cinq ans et de 12% chez les hommes.

4- Une prévalence des malformations du tube neural de 1,1/1000 naissances vivantes (qui est de 3,3/1000 naissances vivantes actuellement)

Adjonction de vitamines et de minéraux dans les denrées alimentaires

La fortification des denrées alimentaires en vitamines et minéraux est considérée comme ayant le meilleur rapport coût-efficacité pour lutter contre les carences en micronutriments. Une denrée alimentaire est définie comme "toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d'être ingéré par l'être humain." (Définition du règlement (CE) n°178/2002). Les aliments courants correspondent à l'ensemble des denrées alimentaires hors denrées de l'alimentation particulière, compléments alimentaires et nouveaux aliments. Il est possible d’utiliser des nutriments dans les aliments courants, en respectant les exigences de la réglementation européenne établies par le règlement de 2006 (règlement CE n°1925/2006) qui concerne « l’addition de vitamines, minéraux et certaines autres substances aux aliments courants ». Le règlement

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