Echappe-t-il certaines choses à la providence et la souveraineté de Dieu ?
Dissertation : Echappe-t-il certaines choses à la providence et la souveraineté de Dieu ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar MNGG • 14 Mai 2021 • Dissertation • 4 456 Mots (18 Pages) • 562 Vues
Echappe-t-il certaines choses à la providence et la souveraineté de Dieu ?
Julien NANA GASSA GONGA
Dissertation n°1
Cours 3.12 de Pierre-Sovann CHAUNY
DEST 2
« Notre Dieu est au ciel, il fait tout ce qu'il veut. » (Ps 115.3).
Ce verset écrit par le psalmiste présente une réalité en apparence simple : Dieu a créé le monde, nous sommes ses créatures, et il règne. Il fait donc « tout » ce qu’il veut. Cela ne semble appeler ni de limites ni d’exceptions.
C’est ce que les théologiens ont présenté pendant des siècles et que l’on appelle la souveraineté de Dieu, c’est-à-dire son droit et son pouvoir de faire tout ce qu’il veut. Ainsi, parce qu’il a le droit et le pouvoir de faire ce qu’il veut, Dieu a des moyens mis à sa disposition pour arriver à son but. C’est ce qu’on appelle la providence divine, même si ce mot n’est nulle part présent dans la Bible. John Piper définit la providence comme le fait que Dieu prenne les mesures nécessaires pour que quelque chose se produise. Dieu peut tout et a le droit de tout faire, il est donc souverain, et il a les moyens à sa disposition pour arriver à ses fins qui sont justes et sages comme nous le présente la Bible.
A priori donc, la souveraineté de Dieu et la providence de Dieu ne souffrent d’aucune limite.
Pourtant, à partir du XVIè, un théologien va remettre en cause cette théologie présentée depuis des siècles comme telle : Jacob Arminius, professeur à la faculté de théologie de Linden. Il va s’opposer à Théodore de Bèze qui croyait en la double prédestination, contrairement à la pensée de Calvin. Arminius va aller à contrecourant de la pensée réformée et va finalement limiter la souveraineté de Dieu par une certaine liberté humaine, notamment dans le choix du salut. Arminius critique la pensée réformée sur cinq points majeurs, tels que l’élection, l’efficacité de l’expiation uniquement pour les élus, la grâce irrésistible, etc. Les théologiens réformés vont répondre aux cinq critiques de Jacob Arminius au canon de Dordrecht en 1618-1619. La théologie d’Arminius a conquis beaucoup de chrétiens puisque permettant de concilier la souveraineté de Dieu avec la liberté humaine, notion philosophique en vogue à partir du siècle des Lumières. Aujourd’hui, le courant du protestantisme dit pentecôtiste a totalement adhéré à la pensée arminienne, tandis que l’église réformée est restée fidèle à la pensée de Calvin. Cette controverse perdure encore, et sans prétendre résoudre près de cinq siècles de débats théologiques, il est intéressant de se poser la question de savoir s’il existe des limites à la souveraineté et à la providence de Dieu, telle que la liberté humaine ?
Pour cela, nous aborderons d’abord les points de doctrine qui ne font pas débat, à savoir que tout ce que Dieu décide, il l’accomplit (I). Nous aborderons ensuite les questions sujettes à controverse théologique, notamment de savoir si la liberté humaine est une limite à la souveraineté de Dieu, et essaierons d’y répondre (II).
- Unanimité théologique : tout ce que Dieu décide s’accomplit
La majorité des théologiens orthodoxes sont unanimes pour dire que Dieu a le pouvoir de décréter des choses en avance qui vont s’accomplir (A), et que par sa providence, il continue à contrôler le monde (B).
- Dieu a le droit et le pouvoir de décréter des choses par avance
Ephésiens 1.11 nous dit : « En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d'après le conseil de sa volonté. »
Ce verset nous présente le fait que Dieu décide de choses à faire après avoir décrété en lui-même ce qu’il convenait de faire, c’est le « conseil de sa volonté ». Cela fait partie d’une œuvre interne de Dieu, une « opera ad intra ». Dieu décide en lui-même, c’est-à-dire vers l’intérieur, de choses qu’il convient de faire pour l’extérieur à lui-même. Si Dieu fait quelque chose, c’est parce qu’il l’a décidé en lui-même, librement, selon le conseil de sa propre volonté. La décision prise par Dieu est donc fondée sur la « sagesse infiniment variée de Dieu » (Ep 3.10), Dieu ne décrète rien arbitrairement et capricieusement. Au contraire, dans l’idée de « conseil », utilisant ainsi une forme d’anthropomorphisme, Paul a voulu démontrer que les décisions de Dieu étaient mûrement réfléchies en lui-même, après une délibération interne. Paul s’est appuyé sur le verset du psalmiste, qui nous montrait déjà que Dieu prend toujours la meilleure décision en fonction de son infinie sagesse (Ps 104.24).
Les textes de Westminster ont défini les décrets de Dieu comme étant « son dessein éternel, selon le conseil de sa volonté, dessein par lequel, en vue de sa propre gloire, il a préordonnée tout ce qui advient au monde. »
Plusieurs passages de la Bible montrent qu’avant de faire quelque chose, Dieu avait décrété que cette chose arriverait. C’est le cas par exemple dans Esaïe 24.3 : « Le pays est dévasté, livré au pillage ; Car l'Eternel l'a décrété. » Dieu avait d’abord décrété en lui-même qu’il y aurait un pillage et que le pays serait dévasté, et cela est ensuite arrivé. Dans Esaïe 46.10, nous apprenons que les décisions de Dieu sont d’ores et déjà déterminées depuis toujours quand on lit : « J'annonce dès le commencement ce qui doit arriver, Et longtemps d'avance ce qui n'est pas encore accompli ; Je dis : Mes arrêts subsisteront, Et j'exécuterai toute ma volonté. »
La théologie chrétienne s’accorde également à dire que les décrets de Dieu sont éternels puisqu’ils ont été formés avant que le temps n’existent : « avant les temps éternels », 2 Ti 1.9 ; « avant la fondation du monde », Ep 1.4.
Il n’y a aucune controverse quant au fait de dire que les décrets de Dieu sont infaillibles. La Bible nous dit que quand Dieu décide quelque chose, cela va nécessairement s’accomplir. Les décisions de Dieu sont différentes de nos décisions, qui elles dépendent de circonstances extérieures sur lesquelles nous ne pouvons pas toujours agir. Au contraire, Dieu peut agir sur tout, et s’il décide de quelque chose, nous pouvons être certains que cette chose arrivera. Les décrets de Dieu sont donc immuables, puisque Dieu ne change pas. Quand Dieu décide quelque chose, il ne change pas d’avis en fonction d’une décision humaine qui le ferait infléchir.
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