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Etude de l'effet des visages sur la spécialisation hémisphérique

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Par   •  19 Avril 2017  •  Analyse sectorielle  •  5 247 Mots (21 Pages)  •  1 417 Vues

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Étude de l'effet des visages sur la spécialisation hémisphérique

Léa SAIDI,

Sous la direction de Pierre Cormier.

Un phénomène normal (soit non pathologique) appelé pseudonégligence, décrit une surestimation du côté gauche dans le traitement de stimuli visuo-spatial. Notre but est de créer une expérience qui permettrait, à l'aide de visages chimériques, d'éliminer le biais hémisphérique présent sur la gauche en utilisant des indices attentionnels pour orienter l'attention du sujet à différents endroits de l'espace. Pour cela, nous désirons prendre la/les dimension(s) du visage qui entraîne(nt) le plus de biais afin de constater une réelle différence ou non. Nous pouvons penser qu'une orientation de l'attention diminuerait le biais hémisphérique sur la gauche.

        La latéralité des hémisphères n'est aujourd'hui plus à prouver. Nous savons que les deux hémisphères ont une organisation et un fonctionnement distincts (Springer & Deutsch, 2000).

Il en découle alors l'apparition de la spécialisation hémisphérique. Elle correspond à la spécialisation d'un hémisphère pour le traitement d'un stimulus : l’hémisphère droit serait impliqué dans le traitement du matériel visuo-spatial tandis que l'hémisphère gauche serait prédominant dans le traitement du matériel verbal (Butler et al., 2005, cité dans Guerette, 2014).

        Due à cette latéralisation, une maladie cérébrale peut apparaître – uniquement suite à une lésion cérébrale : l'héminégligence. D'après Seron et Van der Linden (2000), elle est caractérisée par « l’incapacité de rendre compte, de répondre ou de s’orienter vers des stimuli présentés du côté opposé de la lésion cérébrale, sans qu'il y ait de troubles sensoriels ou moteurs ». L'héminégligence peut prendre différentes formes cliniques (négligence spatiale, personnelle, représentationelle…) et peut être associée à différents troubles (l'extinction, l'allochirie et l'alloesthésie, l'anosognosie). Elle est constatée chez 45 % des cérébro-lésés droits et chez 15 % des cérébro-lésés gauches. Différentes hypothèses ont été proposées par différents chercheurs pour expliquer l'héminégligence. La première à avoir été formulée est l'hypothèse sensorielle, qui correspondrait « à un déficit primaire sensoriel ou moteur associé à une baisse intellectuelle plus globale » (Seron & Van der Linden, 2000). Cette hypothèse a très vite été réfutée et a cédé sa place à des hypothèses attentionnelles. Différents modèles, proposés par différents auteurs, ont vu le jour, mais nous n'en retiendrons qu'un seul : le modèle de Posner et Peterson (1990). Selon eux, l'attention pourrait se décomposer en trois processus : le déplacement de l'attention vers le stimulus, l'engagement de l'attention sur le stimulus et le désengagement de cette dernière. Suite à cette conception de l'attention, l'héminégligence serait causée par un  problème dans le désengagement de l'attention. Le patient serait capable d'orienter et d'engager son attention vers le stimulus mais ne pourrait la désengager du côté ipsilésionnel pour traiter le stimulus présent du côté controlésionnel.

        Guerrette (2014) cherche alors à expliquer la pseudonégligence à l'aide de l'hypothèse du désengagement de l'attention formulée pour l'héminégligence. La pseudonégligence est un phénomène présent chez les individus normaux et qui partagent plusieurs caractéristiques avec l'héminégligence présente chez les individus cérébro-lésés. Elle se caractérise par une surestimation du côté gauche. La population aurait tendance à donner plus d'importance aux stimuli présentés dans le côté gauche de leur champ visuel (Loftus, Vijayakumar & Nicholls, 2008; Nicholls, Bradshaw & Mattingley, 2001). L'étude de Guerrette a pour but d'expliquer la pseudonégligence par une hypothèse attentionnelle en incluant des indices visuels (des carrés rouges qui apparaissent soit à gauche de l'écran, soit à droite) dans une tâche de dégradé de gris, ce qui permet de désengager l'attention. Les résultats révèlent une abolition de l’effet de la pseudonégligence lorsque l'on dirige l'attention des participants vers la droite. On constate donc la présence d'une composante attentionnelle sous-jacente à la pseudonégligence que l'on peut légèrement biaiser avec une orientation indicée de l'attention.

 

        Mais que se passe-t-il si nous modifions le stimulus, que nous utilisons des visages chimériques ? Y a-t-il des dimensions du visage qui créent plus de biais que d'autres ?

        Il est important de rappeler que le traitement des visages est un processus spécifique comparativement au traitement d'autres objets de l'environnement (Barbeau, Joubert & Felician, 2009). En effet, il repose sur des processus visuo-perceptifs et mnésiques qui lui sont propre. En plus d'identifier un visage, on traite aussi les différentes parties mobiles du visage enfin d'extraire des indices pour améliorer notre communication, notre perception de l'autre, ses émotions, ses intentions …. La reconnaissance des visages a une valeur sociale que les autres objets n'ont pas. Enfin, il existe un trouble important de ce processus: la prosopagnosie, décrite la première fois par Bodamer Joachim en 1947. L’étude de ce déficit démontre une spécialisation dans la reconnaissance des visages de part le fait qu'elle soit causée uniquement par une lésion pariétale droite. Cela prouve que le traitement des visages est en partie géré par l'hémisphère droit du cerveau. Mettant en jeu la partie droite, on peut donc penser que le biais sera aussi observé dans le traitement et la reconnaissance des visages.  

        Wolff (1993) décrit pour la première fois le biais en observant que des visages chimériques construits en combinant le côté du gauche d'un visage sont considérés comme étant plus semblables à l'original que ceux construit avec le côté droit.

Burt et Perett (1997) vont plus loin et font une étude pour examiner l'importance relative du côté droit et gauche d'un visage utilisé en tant que stimulus. Ce qui les intéresse principalement est le traitement de diverses dimensions telles que l'expression faciale, l'âge, le genre, l'attirance pour le visage et la lecture sur les lèvres. Pour cela, ils placent deux visages chimériques - construits comme ceux de Wolff -  l'un au dessus de l'autre, l'un composé de la partie gauche du visage, l'autre de la partie droite. Ils demandent ensuite aux sujets de choisir lequel de ces deux visages semble être le plus âgé, le plus content, le plus plaisant pour lui, qui ressemble le plus à une femme ou celui qui semble le plus dire ''- ee'', ''- i'' ou ''- ss'' (lecture sur les lèvres). Ils constatent alors que pour toutes les dimensions (à part la lecture sur les lèvres), le jugement est biaisé par le côté gauche. Les informations présentées sur la gauche des stimuli sembleraient donc avoir une influence dominante sur nos réponses. De plus, la dimension créant le plus de biais serait l'âge, principalement les hommes âgés avec 77 % de réponses pour le visage chimérique composé de la partie gauche uniquement.

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