Le Juge pénale Et La Protection Des Droits Individuels
Compte Rendu : Le Juge pénale Et La Protection Des Droits Individuels. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar nazeqzain • 6 Mai 2015 • 3 741 Mots (15 Pages) • 1 332 Vues
Le juge pénal et la protection des libertés individuelles (par Mme Elisabeth de la Lance, conseiller référendaire à la Cour de cassation)
Panorama de la jurisprudence récente
de la chambre criminelle au regard
des lois du 30 décembre 1996 et du 15 juin 2000
Article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 :
"Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi".
La procédure pénale permet l’application et la mise en oeuvre du droit pénal. Elle détermine les autorités chargées de poursuivre et de juger les auteurs d’infractions ainsi que les règles régissant le déroulement des enquêtes et informations, et du procès pénal.
En procédure pénale, le but à atteindre est, à la fois, de protéger la société contre les auteurs d’infractions et de préserver les libertés individuelles de toute violation en n’atteignant que les coupables. Il y a là une réelle difficulté, ces objectifs étant contradictoires, et la procédure pénale française a toujours tenté de trouver un équilibre entre la procédure accusatoire plus protectrice de la personne soupçonnée et la procédure inquisitoriale favorisant la répression et ce, dès le Code d’instruction criminelle de 1808 jusqu’au Code de procédure pénale de 1958.
De nombreuses lois sont ensuite intervenues dans un sens favorable aux droits de la défense et aux droits des victimes tout en renforçant la répression dans certains domaines comme le terrorisme ou le trafic de stupéfiants.
Suite à la constitution du nouveau Code pénal, le Code de procédure pénale a subi d’importantes réformes introduites par les lois du 16 décembre 1992 et des 4 janvier et 24 août 1993, notamment en ce qui concerne la garde à vue et l’instruction. Ensuite, la loi du 30 décembre 1996 a eu pour objet principal de limiter le recours à la détention provisoire tant lors de son prononcé que dans sa durée.
Enfin, la loi du 15 juin 2000, comme l’annonce son intitulé, est venue renforcer la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes, et a réformé notre procédure pénale de façon sensible en innovant dans de nombreux domaines.
Cette loi a inséré un article préliminaire en tête du Code de procédure pénale dont le contenu a été inspiré, notamment, par l’article 66 de notre Constitution, par les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et la jurisprudence de la Cour de cassation. Cet article énonce les grands principes directeurs de notre procédure pénale fondés sur la présomption d’innocence et, en particulier, dispose que les mesures de contraintes dont toute personne suspectée ou poursuivie peut faire l’objet "sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire. Elles doivent être strictement limitées aux nécessités de la procédure, proportionnées à la gravité de l’infraction reprochée et ne pas porter atteinte à la dignité de la personne".
Et toutes les nouvelles dispositions tentent, sur la base de ce principe, de permettre le déroulement des enquêtes et instructions tout en préservant au mieux les libertés individuelles des personnes concernées et en entourant de garanties judiciaires tout atteinte à ces libertés devenue nécessaire en cours de procédure.
La présente étude ne se limitera pas à l’analyse des arrêts que la Chambre criminelle a déjà pu rendre en application de cette dernière loi depuis son entrée en vigueur, tous les aspects de la procédure ne s’en trouvant pas modifiés, et il sera également fait référence à la jurisprudence antérieure.
I. LA DÉTENTION PROVISOIRE ET LE CONTRÔLE JUDICIAIRE
A. La détention provisoire
La limitation du nombre de placements en détention provisoire, comme la réduction de leur durée, ont été des objectifs tant de la loi du 30 décembre 1996 que de celle du 15 juin 2000.
Et l’une des réformes essentielles de cette dernière loi a été l’instauration d’un juge spécialisé, le juge des libertés et de la détention (JLD), auquel le nouvel article 137-1 du Code de procédure pénale a confié l’ensemble de ce contentieux et ce, à compter du 1er janvier 2001.
1. Le juge des libertés et de la détention
Ainsi, la détention provisoire ne peut, désormais, débuter ou se poursuivre que si deux magistrats du siège l’ont décidé, seul le juge d’instruction ou le juge des enfants pouvant saisir le JLD. Et à compter de juin 2002, ce magistrat exercera également les fonctions du président du tribunal en matière de liberté, soit, notamment, le contrôle des gardes à vue, des perquisitions, des visites domiciliaires et de la rétention des étrangers.
La création de ce nouveau juge ne devrait pas poser de problèmes juridiques particuliers.
En effet, dans le cas où une ordonnance serait rendue en matière de détention provisoire par un juge incompétent, la nullité de celle-ci serait obligatoirement prononcée. Et le troisième alinéa de l’article 137-1 du Code de procédure pénale, issu de la loi du 15 juin 2000, énonce que le JLD ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales dont il a connu, ces nouvelles dispositions correspondant à celles concernant le juge d’instruction à l’article 49 du même Code.
Seule la période transitoire, pendant laquelle a eu lieu le transfert de compétence entre le juge d’instruction et le JLD, fixé au 1er janvier 2001, pouvait entraîner un contentieux.
Ainsi, l’ordonnance rendue par le juge d’instruction le 29 décembre 2000, sans débat contradictoire, prolongeant la détention provisoire à compter du 7 janvier 2001, est régulière, cette décision ayant été prise par le magistrat compétent et dans le respect des dispositions légales applicables à sa date (Crim. 3 avril 2001, Bull. n° 87, p. 281).
De même, l’ordonnance d’incarcération provisoire pour une durée de 4 jours, délivrée régulièrement par le juge d’instruction le 29 décembre 2000 à une personne mise en examen sollicitant un délai pour préparer sa défense en vue du débat contradictoire fixé alors au 2 janvier 2001, a poursuivi ses effets jusqu’à
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