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Le Chef De L'État Est Il pénalement Responsable ?

Mémoire : Le Chef De L'État Est Il pénalement Responsable ?. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  11 Décembre 2011  •  2 079 Mots (9 Pages)  •  2 116 Vues

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« Le Roi ne peut mal faire ». Cette maxime d’essence monarchique traduit de façon évidente l’irresponsabilité du Roi au détri-ment des ministres. La responsabilité ministérielle a donné naissance au régime parlementaire. Cette règle de l’irrespon- sabilité royale a été transposée en France dès 1791 : « La personne du Roi est invio- lable et sacrée » (article 2 de la Constitu- tion de 1791). Il faudra attendre la IIIe République et la Loi du 25 février 1875 pour voir proclamée l’irresponsabilité présidentielle sauf cas de haute trahison. Selon Carré de Malberg, l’irresponsabilité présidentielle était « bien moins un privi- lège établi en faveur du Président et destiné à assurer sa stabilité ou son indépendance, qu’une garantie prise contre lui à l’effet d’exclure de sa part toute prétention ou tentation d’entretenir une action gouverne- mentale personnelle et indépendante ». L’ob- jectif inavoué était d’affaiblir le Chef de l’État.

Sous la Ve République, le principe est que le Président est irresponsable politi- quement mais force est de constater que cette irresponsabilité politique peut paraître contradictoire en raison, d’une part, des pouvoirs propres qui lui sont attribués et, d’autre part, en raison des pouvoirs du peuple, qui a la faculté d’agir par voie de référendum. Avec la pratique, l’arme référendaire s’est avérée comme étant inefficace.

Le sujet à traiter ne concerne que la responsabilité pénale. La question est de savoir si elle peut être engagée à l’égard du Chef de l’État.

L’article 68 de la Constitution de 1958 consacre ladite responsabilité. Sa lecture semble aisée : la responsabilité du Chef de l’État n’est possible que si les actes commis dans l’exercice de ses fonctions relèvent de la haute trahison. La respon- sabilité pénale est donc définie de façon stricte, cela jusqu’à la décision du Conseil constitutionnel du 22 janvier 1999. En effet, le Conseil constitutionnel est venu étendre le champ de la responsabilité présidentielle. Désormais, les actes accomplis pendant toute la durée de ses fonctions y compris les actes de nature privée et ceux commis avant l’élection présidentielle restent soumis au privilège de juridiction.

Cette extension, critiquée par une doctrine majoritaire, laisse apparaître, à la lumière de l’article 68, que la responsabilité pénale du Président existe (I) mais que la lecture opérée par le juge constitutionnel de l’article 68 n’est pas exempte d’incer- titudes (II).

I. Les certitudes

de la responsabilité pénale du Chef de l’État

L’article 68 de la Constitution de 1958 est explicite et pose deux conditions : la respon- sabilité du Président de la République est engagée en cas de haute trahison (A) et celui- ci bénéficie d’un privilège de juridiction : « il est jugé par la Haute Cour de Justice » (B).

A.- L’exigence d’une haute trahison

- Les Titres II et IX de la Constitution de 1958 consacrés respectivement au Prési- dent de la République et à la Haute Cour de Justice ne donnent aucune définition de la haute trahison. Il suffit de se reporter à la doctrine. Messieurs Burdeau, Hamon et Troper, dans leur ouvrage de droit consti- tutionnel, définissent la haute trahison comme étant « une violation à la fois grave et délibérée de la Constitution, par exemple s’il se saisissait des pouvoirs exceptionnels de l’ar- ticle 16 en vue de perpétrer un coup d’État, dans des circonstances et pour poursuivre des objec- tifs qui n’auraient rien à voir avec les conditions fixées par la Constitution ».

- L’article 6 de la Loi du 25 février 1875 relative à l’organisation des pouvoirs publics cite la notion sans toutefois la définir.

- La seule définition explicite résulte de l’article 68 de la Constitution du 4 novembre 1848 qui dispose : « Toute mesure par laquelle le Président de la République dissout l’Assem- blée nationale, la proroge ou met obstacle à l’exer- cice de son mandat est un crime de haute trahison ».

- Qui est compétent pour qualifier l’acte de haute trahison ? La réponse est donnée par Guy Carcassonne : « l’unique définition est celle qui résulte de la Constitution elle- même : est une haute trahison tout acte que la Haute Cour de Justice, régulièrement saisie, aura jugé tel ». Cette affirmation risque d’engen- drer des abus. N’importe quelle violation sera caractérisée comme étant une haute trahison.

- Si haute trahison il y a, une procédure dérogatoire au droit commun, c’est-à-dire au droit pénal, sera mise en place. Le Chef de l’État sera jugé par la Haute Cour de Justice. On appelle cela un privilège de juridiction.

B.- La consécration d’un privilège de juridiction

- Les poursuites doivent être déclen- chées par une résolution de mise en accu- sation adoptée en termes identiques par les

deux Assemblées statuant à la majorité absolue des membres les composant.

- En cas d’adoption de la résolution, celle- ci est transmise à une commission d’ins- truction composée de magistrats de la Cour de cassation. Si cette commission estime que les charges sont suffisantes, elle renvoie le Chef de l’État devant la Haute Cour de Justice.

- L’article 67 (Titre IX) de la Constitution de 1958 dispose : « elle est composée de membres élus, en leur sein et en nombre égal, par l’Assemblée nationale et par le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de ces Assemblées ».

- Pourquoi un tel privilège de juridic- tion ? Deux thèses s’affrontent. La première invoque le respect de la dignité de la fonc- tion présidentielle. Il est donc nécessaire de mettre le titulaire de cette fonction à l’abri d’une mise en examen devant les tribunaux répressifs. Les tenants de cette thèse se fondent sur la coutume internationale. En effet, selon cette coutume, les Chefs d’État en exercice bénéficient d’une immunité géné- rale qui les exonère de toutes poursuites devant les juridictions pénales d’un autre État.

- La deuxième thèse prône le privilège de juridiction uniquement pour les actes accom- plis dans l’exercice des fonctions présidentielles. Concernant les actes accomplis en dehors de l’exercice des fonctions ou avant l’élection prési- dentielle, le privilège de juridiction dispa- raît et laisse place à la compétence des tribunaux de droit commun. En 1974, le Tribunal correctionnel de Paris s’est déclaré compétent pour juger - mais ce ne fût pas le cas

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