François-René de Chateaubriand, un Diplomate?
Dissertation : François-René de Chateaubriand, un Diplomate?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar matpom • 21 Février 2014 • 3 992 Mots (16 Pages) • 1 182 Vues
Chateaubriand : diplomate ?
De Chateaubriand, comme Petit-Senn le lui avait prédit , l’Histoire a surtout reconnu l’écrivain. Pourtant, il fut aussi homme politique et diplomate. Mais voilà, peut-être les ambitions de Chateaubriand était-elles trop démesurées, le romantique en lui trop emporté, trop peu patient pour qu’il marque l’histoire en tant que diplomate.
Chateaubriand a largement conçu sa carrière diplomatique comme un exil temporaire, un moyen d’assouvir son ambition première, celle de s’emparer du ministère des Affaires étrangères, plutôt que comme une carrière en soi. Il a d’ailleurs consacré assez peu de temps à la diplomatie et si son obsession de la mort le poussait à rechercher la postérité, c’est en tant qu’homme politique qu’il pensait avoir rendez-vous avec l’Histoire. Ses postes à l’étranger n’étaient pour lui qu’un éloignement temporaire, son attention véritablement focalisée sur le centre des décisions, à Paris. Il voulait être aux affaires, en tenir les rênes, et ne pouvait supporter de n’être qu’un subordonné.
Mais jetons plutôt un œil à l’histoire de sa vie diplomatique, et voyons si l’on peut véritablement parler de Chateaubriand comme d’un diplomate.
Premiers pas dans la carrière diplomatique (mai 1803 – mars 1804)
La nomination de Chateaubriand au poste de Secrétaire d’ambassade à Rome, en mai 1803, est éminemment politique.
Lorsque Bonaparte prend le pouvoir en novembre 1799, la Révolution a très largement entaché les relations de la France avec le Saint-Siège. Il souhaite rétablir des relations normales avec le pape, d’autant qu’il s’est fixé pour objectif de rétablir l’ordre social et qu’il ne conçoit pas cet ordre sans l’appui de la religion.
C’est dans cette optique que Bonaparte remplace Cacault, diplomate de carrière et expert de l’Italie, par son oncle, le cardinal Fesch. Et c’est dans la même optique qu’il se laissera convaincre de nommer Chateaubriand, l’auteur du Génie du Christianisme, au poste de secrétaire d’ambassade. La nomination de Chateaubriand est certes politique, dans son esprit, mais elle est surtout le fruit de la cour qu’a fait Chateaubriand au Premier consul. La publication même du Génie du Christianisme n’est pas innocente, et a été planifiée avec Fontanes, ami de Chateaubriand et homme politique ayant à l’époque les faveurs de Bonaparte. Chateaubriand joua aussi de ses relations avec la sœur de Bonaparte, Elisa Bacciochi, et fit dans la presse les louanges du Premier consul.
C’est donc l’ambition de Chateaubriand, autant que sa convergence de vue avec Bonaparte, qui le propulsa dans la carrière diplomatique, directement au poste de secrétaire d’ambassade, à Rome, l’une des ambassades les plus importantes.
Mais c’est aussi cette ambition, et la présomption qui l’accompagne, qui ont fait de son premier poste un désastre. En effet, lorsque Chateaubriand part pour Rome, le 26 mai 1803, il se voit déjà ambassadeur à la place de l’ambassadeur. Sa présomption le pousse à accumuler les erreurs diplomatiques. Il demande une audience auprès du pape avant même l’arrivée de Fesch à Rome. Pire encore, il rend visite au roi de Sardaigne alors que celui-ci, après que le royaume ait été dépossédé de Nice et de la Savoie au profit de la République française en 1796, venait de voir ses possessions réduites à la seule île de Sardaigne après l’annexion du Piémont à la France, fin 1802. Pour ce sortir de cette faute professionnelle, Chateaubriand fit entendre au ministre, Talleyrand, par l’intermédiaire de Fontanes, qu’il n’était pas seul responsable, et associa Fesch à son erreur. Il ne tarda pas à être cantonné par ce dernier à la signature des passeports et à la rédaction des rapports sur les affaires contentieuses. Lui qui se voyait diriger en sous-main l’ambassade, se vit relégué au rang de commis de chancellerie. Il s’ennuyait, mais son ambition et sa prétention ne ternissaient pas. Il voulait jouer les premiers rôles et fit une nouvelle fois intervenir Fontanes et Elisa Bacciochi.
Fin novembre 1803, ceux-ci lui obtinrent un poste de chargé d’affaires auprès de la République du Valais. Un poste indépendant qu’il ne s’empressa pourtant pas d’accepter. Ce n’était pas le poste de premier ordre auquel il aspirait. Il n’accepta officiellement le poste qu’en janvier 1804, ne quitta Rome que le 20 janvier pour prendre d’abord le congé à Naples que Fesch lui avait proposé pour le convaincre de rester, et ne se présenta à Paris, chez Talleyrand, que le 25 février. Il n’avait pas cru bon de demander d’audience et se fit éconduire. Il ne savait pas que les rapports du cardinal Fesch avaient sérieusement terni son image auprès du ministre des Relations extérieures, et surtout auprès du Premier consul.
L’atmosphère à Paris n’était plus la même que lorsque Chateaubriand avait quitté la ville un an plus tôt. La guerre, à nouveau déclarée avec l’Angleterre, rendait Bonaparte impopulaire. En février-mars 1804, il déjoua une conspiration fomentée par certains de ses généraux contre lui et son pouvoir se radicalisa. Chateaubriand, quant à lui, fréquentait les salons royalistes, et le 21 mars 1804, l’exécution arbitraire du Duc d’Enghien, héritier des Bourbons, faussement accusé d’avoir commandité le complot des généraux , lui donna l’occasion de donner un sens politique à sa démission. Par ce geste courageux, mais pas désintéressé, il prit ses distances avec un régime qu’il avait pourtant encensé, abandonna la carrière diplomatique, et se fit monarchiste.
Retour en diplomatie (janvier – avril 1821)
Pendant dix ans il se teint à l’écart des affaires publiques. A la chute de l’Empire, cependant, il semble qu’il ait voulu réitérer l’opération du Génie du Christianisme en rédigeant un pamphlet politique contre le régime impérial, De Buonaparte et des Bourbons. Mais la publication de son texte ne fut pas suivi d’effet. Il fallut que la duchesse de Duras intervienne auprès du gouvernement provisoire pour qu’il obtienne de choisir entre deux ambassades prestigieuses, Stockholm ou Constantinople. Il choisit Stockholm et fut nommé le 8 juillet 1814. Mais, encore une fois, estimant sans doute que le poste n’était pas à la hauteur de ses compétences, il ne rejoignit jamais son ambassade.
Il se lança alors en politique et développa, d’abord dans des articles publiés dans le Journal des débats puis dans un nouvel ouvrage, la Monarchie selon la Charte, les thèses d’un ultra modéré. Il
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