Commentaire d’arrêt : Arrêt Alusuisse-Lonza-France du 8 juillet 2005 du Conseil d’Etat
Mémoire : Commentaire d’arrêt : Arrêt Alusuisse-Lonza-France du 8 juillet 2005 du Conseil d’Etat. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Ninjaa • 8 Décembre 2013 • 2 145 Mots (9 Pages) • 5 897 Vues
Commentaire d’arrêt :
Arrêt Alusuisse-Lonza-France du 8 juillet 2005 du Conseil d’Etat
Les installations classées pour la protection de l’environnement sont des installations qui peuvent présenter des dangers ou inconvénients pour la commodité du voisinage, la santé, la sécurité et la salubrité publique, l’agriculture, la protection de la nature et de l’environnement, des sites et des monuments (article 511-1 du code de l’environnement) qui font l’objet d’une réglementation spécifique.
La Société Alusuisse-Lonza-France exploita jusqu’en 1968 à Marseille une usine qui traitait de la bauxite. Les résidus qui découlaient de cette acticité étaient entreposés dans un terrain nommé « crassier des Aygalades ». Le terrain sera vendu à Unipol en 1980 puis une partie à la commune de Marseille en 1982. Trois arrêtés préfectoraux ont été émis, sur le fondement de la loi du 19 juillet 1976, contraignant la société Alusuisse-Lonza-France de remettre en état le « crassier des Aygalades », ce dernier menaçait de créer un éboulement s’il n’était pas traité.
La société Alusuisse-Lonza-France porta l’affaire devant le tribunal administratif de Marseille en défendant le fait que la loi du 19 juillet 1976 est entrée en vigueur après la cessation d’activité. Le tribunal administratif de Marseille n’annula qu’une partie infime des arrêtés préfectoraux. La société fera ensuite appel devant la cour administratif d’appel de Marseille, qui rejettera sa demande. Un pourvoi est enfin formé devant le Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat est face à une problématique compliquée, comme le terrain n’appartient plus à la société auteur de la faute, à qui incombe la tâche de remettre en état le site ?
Dans cet arrêt du 8 juillet 2005, le conseil d’Etat va dégager un nouveau principe général de droit inspiré de l’article 2262 du code civil. Ainsi les exploitants auteur de pollution sur un site classé, auront l’obligation de remettre en état le site pollué et ceci sur une prescription de 30 ans. Le préfet dispose de pouvoir de police qui lui permettra de mettre en œuvre ce principe, et si la prescription n’est plus possible, la remise en état du site incombera à la collectivité.
Nous verrons tout d’abord que le conseil d’État reprend un principe bien établi qui est celui de l’obligation de remise en état d’un site pollué par une installation classée (I), puis dans un second temps nous verrons sur l’apparition d’un nouveau principe du droit (II).
I – L’obligation de remise en état d’un site pollué : un principe bien établi confirmé par la jurisprudence
Les sites classés bénéficient d’une législation particulière au regard de la loi du 19 juillet 1976 (A) qui donne compétence à l’administration pour tout ce qui concerne leur remise en état (B).
A) Un principe qui découle du fondement de la loi du 19 juillet 1976
« […] que, dans cette hypothèse, l’obligation de remise en état du site imposée par l’article 34-I du décret du 21 septembre 1977 pèse sur l’ancien exploitant, ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l’exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l’exonère de ses obligations que si le cessionnaire s’est substitué à lui en qualité d’exploitant. »
L ‘obligation de remise en état d’un site classé dont la charge pèse sur le dernier exploitant est un principe établi de longue date, tant dans la loi du 19 juillet 1976 que dans la jurisprudence, par ailleurs conséquente sur le sujet. Une telle mesure s’explique aisément par le fait que les installations classées pour la protection de l’environnement présentent des dangers pour l’environnement, dangers répertoriés dans une nomenclature qui leur affecte des seuils en fonction de l’activité, des produits traités, et de leur quantité notamment. Le conseil d’État a jugé que cette loi a vocation à s’appliquer quand bien même l’exploitation du site aurait cessé avant son entrée en vigueur, ce qui est le cas en l’espèce. Les atteintes portées à l’environnement peuvent en effet être durables et donc la reprise de la jurisprudence de la « Compagnie des bases lubrifiantes » de 1998 n’a rien de choquant et était même légitimement attendue.
En l’espèce dans le cas dont il est question ici, la société Alusuisse-Lonza-France a vendu les terrains d’une part à la commune de Marseille et d’autre part à la société Unipol. Le problème qui se pose à la société Alusuisse c’est qu’aucun des deux acheteurs n’a repris l’exploitation du terrain qui leur avait été cédé, faisant ainsi que la société Alusuisse reste le dernier exploitant officiellement déclaré sur le terrain et que par là même il lui incombe la remise en état du site.
Reste à voir si à l’avenir le simple détenteur d’un site classé ne pourra être considéré comme responsable de sa remise en état… En attendant il faut s’interroger sur la compétence du préfet pour ce qui est d’exiger la remise en état à l’égard de l’ancien exploitant.
B) Pouvoir de police conféré au préfet en la matière.
« Considérant que les pouvoirs de police spéciale conférés par la loi à l’autorité administrative peuvent, par leur objet et leur nature même, être exercés par celle-ci à toute époque et vis-à-vis de tout détenteur d’un bien qui a été le siège de l’exploitation d’une installation classée, dès lors que s’y manifestent des dangers ou inconvénients de la nature de ceux auxquels la législation des installations classées a pour but de parer. »
Pour faire respecter l’obligation de remise en état le préfet dispose de pouvoirs de police spéciale, véritable « droit de suite », qui lui permet même des années après que l’exploitation du terrain soit terminée de se retourner contre le dernier exploitant pour lui en demander la remise en état conformément aux principes inscrits dans l’article 511-1 du droit de l’environnement. En effet, à partir du moment où subsiste un danger pour l’environnement de manière large et la santé ou la sécurité publique de manière plus concrète, il est nécessaire de se pouvoir se retourner vers le dernier exploitant pour pouvoir lui rappeler son obligation, et ce, de manière à faire cesser le danger provoqué par l’ancienne exploitation. Le danger peut être évalué par un inspecteur
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