Le juge administratif et les directives de l’Union Européenne
Dissertation : Le juge administratif et les directives de l’Union Européenne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Marion Colombo • 24 Octobre 2019 • Dissertation • 1 872 Mots (8 Pages) • 2 215 Vues
Dissertation : Le juge administratif et les directives de l’Union Européenne
De nos jours, le Droit de l’Union Européenne a acquis une importance considérable en Droit interne. Il est susceptible d’influer sur les différents secteurs de l’action administrative, c’est pour cette raison qu’il a pris une importance particulière en Droit administratif. Effectivement, pour être légale, l’action administrative doit se conformer aux règles du Droit de l’Union Européenne.
Les règles s’imposant au Droit administratif sont tout d’abord les dispositions des traités internationaux, c’est à dire le traité de Rome de 1957, l’acte unique de 1987, le traité de Maastricht de 1992, le traité d’Amsterdam de 1997 et le traité de Lisbonne de 2007.
Au delà de ces traités originaires, le droit administratif doit également se conformer aux décisions rendues par la Cours de Justice de l’Union Européenne (CJUE).
Et se rajoute enfin les actes pris par les instances de l’Union Européenne. On parle alors de Droit dérivé, ce qui vise les règlements et les directives Européennes.
Une directive est un acte pris par une instance de l’Union Européenne et qui s’impose aux Etats membres quant aux objectifs à atteindre, tout en laissant aux Etats la liberté de définir les modalités permettant d’atteindre ces objectifs. Les Etats disposent d’un délai de transposition leurs permettant de mettre en place une réglementation nationale de mise en œuvre. Une fois ce délai dépassé, si l’Etat n’a toujours pas adopté de mesure transitoire, il pourra être condamné par la Cours de Justice de l’Union Européenne.
Dans le cadre de cette dissertation, nous nous demanderons par quels moyens le juge administratif et notamment le Conseil d’Etat garantit l’application des directives de l’Union Européenne.
Dans une première partie, nous verrons comment le juge administratif garantit la conformité du droit interne aux directives de l’Union Européenne.
Puis dans une seconde partie nous mettrons en lumière les facteurs permettant au juge administratif de déterminer l’invocabilité d’une directive dans le cadre d’un recours contre un acte de droit interne.
- La conformité du droit interne aux directives de l’Union Européenne
Nous nous consacrerons dans cette première partie à démontrer la primauté du droit de l’Union Européenne sur le droit interne Français, c’est à dire sur les dispositions législatives et règlementaires, mais également au niveau constitutionnel.
- Les directives de l’Union Européenne face aux actes règlementaires et aux dispositions législatives.
Une directive fixe aux états membres des objectifs tout en leur laissant la liberté de définir les modalités qui permettent d’atteindre ces objectifs. Cependant, l’Etat ne peut pas rester inactif, c’est à dire qu’il est obligé de prendre des mesures pour satisfaire les objectifs de la directive.
En effet, un acte règlementaire de droit interne doit se conformer aux orientations des directives. C’est ce qu’a considéré le Conseil d’Etat dan son arrêt « Fédération Française de société de protection de la nature » du 7 septembre 1984. En l’espèce, l’arrêt concernait la chasse et était contraire à une directive relative à la protection des oiseaux sauvages. Le Conseil d’Etat a donc annulé l’arrêté, on dit qu’il a procédé à un contrôle de conventionalité.
De plus, à l’expiration d’un délai de transposition, toutes dispositions contraires à la directive doivent être abrogées, c’est à dire que tout administré peut demander à l’administration d’abroger un acte règlementaire qui serait antérieur et contraire à la directive. C’est ce qui découle de la décision du Conseil d’Etat du 3 février 1989, dans son arrêt « Société Alitalia ».
Dans un arrêt de section du 20 mai 1998, «Communauté de commune Piémont Barr », le Conseil d’Etat rajoute que même si aucune demande d’abrogation n’est faite à l’administration, un acte règlementaire contraire à une directive est de facto inapplicable.
Découle de ces deux arrêts qu’un acte règlementaire contraire aux orientations d’une directive de l’Union Européenne serait de toute façon inapplicable.
Enfin, dans son arrêt d’assemblé du 28 février 1992 « SA Rothams international France », le Conseil d’Etat ira encore plus loin en considérant la primauté des directives sur les lois. C’est à dire qu’une disposition législative sera écartée si elle est contraire aux orientations d’une directive de l’Union européenne.
Une directive de l’Union Européenne dont le délai de transposition est expiré s’impose aux actes règlementaires mais également aux dispositions législatives. Le juge administratif se doit donc d’effectuer un contrôle de conventionalité afin de s’assurer de la conformité d’un acte règlementaire et d’une disposition législative par rapports aux objectifs d’une directive de l’Union Européenne.
Cette primauté du droit de l’Union Européenne sur le droit interne Français découle d’une disposition constitutionnelle Française, c’est l’article 88-1 de la constitution.
Mais qu’en ait il de la conformité d’une directive vis à vis de la constitution ?
- Les directives de l’union européenne face à la constitution
La question se pose ici de savoir si le juge administratif peut contrôler la constitutionnalité des dispositions d’une directive de l’Union européenne.
C’est une question à laquelle à répondu le Conseil d’Etat lors d’un arrêt d’assemblée du 8 février 2007, l’arrêt « Société Arcelor ».
En l’espèce, était contestée la constitutionnalité d’un décret de transposition pris à l’appui d’une directive de l’Union Européenne assez précise qui laissait peu de marge de manœuvre pour la transposition de la directive en droit interne. De ce fait, contester le décret de transposition par rapport à la constitution revenait alors à contester la directive de l’union européenne par rapport à la constitution.
Pour répondre à ce problème, le conseil d’Etat a établi une distinction.
Dans un premier temps, si le principe constitutionnel dont la violation est invoqué à son équivalent en droit de l’union européenne, ce sera alors vis à vis du droit de l’union européenne qu’il faudra contrôler la conformité du décret de transposition.
Le juge administratif confrontera alors le décret de transposition au principe du droit de l’union européenne et non plus au principe constitutionnel. Et, s’il y a un souci d’interprétation, le juge administratif renverra cette question à la Cours de Justice de l’Union Européenne. Et c’est ainsi qu’un conflit de droit interne devient un conflit de droit de l’union Européenne, c’est ce que l’on appelle une translation. Ainsi, le problème d’inconstitutionnalité du décret de transposition est requalifié en problème de conformité vis à vis du droit de l’union Européenne.
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