Droit des administrés
Dissertation : Droit des administrés. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Elodie Ribeiro • 16 Avril 2019 • Dissertation • 2 693 Mots (11 Pages) • 1 408 Vues
« Les garanties de l'administré face à l'élaboration de l'acte administratif »
L'acte administratif unilatéral est un procédé propre à l'action administrative. En effet, alors qu'en droit privé les relations juridiques reposent principalement sur un accord de volonté matérialisé par un contrat réduisant pratiquement à néant la possibilité pour l'une des parties d'imposer des obligations à l'autre, l'acte unilatéral bénéficie, quant à lui, de ce que Maurice Hauriou appelait «l'autorité de la chose décidée».
L'acte unilatéral est créateur de droits et d'obligations à l'égard des administrés, il est l'instrument de la puissance publique révélateur de la situation d'inégalité entre l'administration et les particuliers.
L'existence d'une juridiction administrative est cependant censée constituer pour les citoyens, une garantie fondamentale de respect de la légalité puisqu'elle matérialiserait la séparation entre l'autorité administrative d'une part et le juge administratif d'autre part. Cette consécration constitutionnelle de la juridiction administrative a été effectuée par le Conseil Constitutionnel en deux temps. Dans une première décision du 22 juillet 1980 dite «Validation d'actes administratifs», il consacre la valeur constitutionnelle du principe d'indépendance de la juridiction administrative. La décision capitale reste toutefois celle rendue le 23 janvier 1987 érigeant en principe constitutionnel l'existence de la juridiction administrative.
Cette constitutionnalisation de la juridiction administrative emporte entre autres conséquences fondamentales que le législateur ne peut plus porter atteinte à son existence ni même à son indépendance, toute proportion gardée bien entendu. Tout acte administratif peut donc aujourd'hui être contesté et l'on voit peu à peu « le citoyen actif prendre le pas sur l'administré passif » entrainant davantage d'obligations pour l'administration dans le fond mais aussi sur la forme de ses décisions.
L'administré veille désormais au respect de sa sécurité juridique, autrement dit il veille à son droit d'être préservé contre les conséquences de textes instables ou inintelligibles. Ce principe, consacré par le Conseil d'État dans l'arrêt dit « KPMG » rendu en Assemblée le 24 mars 2006 mais aussi par la jurisprudence de la CJCE : 4 juillet 1973 «Westzicher» et de la CEDH en 1995, «Phocas» et «Heintrich», s'accompagne de deux principes majeurs que sont le principe général de respect des droits acquis et le principe de non-rétroactivité des actes administratifs, principes qui se recoupent finalement dans leur idée.
Le Conseil d'État a, peu à peu, concrétisé ces principes en obligations procédurales s'imposant à l'émetteur de l'acte administratif et censées faciliter un éventuel recours de la part de l'administré qui estimerait qu'une de ces libertés fût atteinte. Il convient toutefois de se demander si ces garanties procédurales de l'administré sont-elles encore aujourd'hui pertinentes face à l'hégémonie de l'administration.
Face à l'inflation du nombre des décisions administratives s'imposant aux administrés ces dernières années, Robert Musil affirmait même «que nous disposions de toujours plus d'ordres et de moins en moins d'ordre», la garantie qui semble fondamentale au respect de l'égalité des administrés et de la légalité elle-même semble être la règle de la non- rétroactivité de la loi (I). Cette condition comme la motivation et l'impartialité (II) est une condition de fond qui, si elles ne sont pas respectées, peuvent entrainer l'annulation de l'acte. Il est bien entendu que ces conditions s'accompagnent d'un formalisme aussi régit par un texte, mais il semble moins important de s'attarder sur ces questions un peu moins juridiques.
I. Le principe de non-rétroactivité garant d'une sécurité juridique fondamentale
La non-rétroactivité d'un acte l'empêche de s'appliquer pour une date antérieure à son édiction. Élevé au rang de principe général du droit par la jurisprudence administrative (A), cela ne l'empêche pas pour autant de souffrir d'atténuation voir même d'exceptions pas toujours justifiables (B).
A) La rétroactivité, une construction jurisprudentielle nécessaire.
C'est le Conseil d'État qui, en s'appuyant entre autre sur l'article 2 du Code civil selon lequel «la loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif», est venu dégager cette solution régulant l'application des décisions administratives dans le temps, limitant ainsi son influence sur les administrés (1).
Confronté à l'absence de définition claire de la rétroactivité, le Conseil d'État a su se servir de l'abondance des contentieux qui lui étaient soumis pour construire sa définition et affermir son principe (2).
1) Une limite temporelle aux actes administratifs fruit du travail du juge
La non-rétroactivité est un principe général du droit. Il a été dégagé par la jurisprudence, non seulement du Conseil d'État (CE, 25 juin 1948, «Soc. Du Journal l'Aurore») mais aussi du Conseil Constitutionnel (CC 24 octobre 1969). Cette règle de la non rétroactivité signifie qu'un acte, qu'il soit règlementaire ou individuel, ne peut pas produire d'effets pour le passé.
En vertu d'une jurisprudence constante, une décision administrative est applicable au plus tôt, à compter du jour de sa notification s'il s'agit d'une décision individuelle et à compter du jour de sa publication s'il s'agit d'un acte règlementaire. Ainsi, dans l'hypothèse où la réglementation du permis de construire change au cours de la période d'instruction d'une demande de permis, le dossier sera examiné au regard de la nouvelle réglementation et non plus en fonction de celle qui était en vigueur au moment du dépôt de la demande (CE Sect., 4 juin 1982, «Junique»).
Ce principe se justifie entre autre par l'idée que les auteurs d'une décision rétroactive empièteraient sur la compétence de leurs prédécesseurs violant le principe de la compétence ratione temporis (Teissier, concl. Sur CE 17 mais 1907, «Le Bigot») même s'il peu après tout paraître tout à fait logique qu'une
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