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Commentaire d'un document historique

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Par   •  24 Avril 2017  •  Cours  •  3 849 Mots (16 Pages)  •  652 Vues

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        Commentaire d'un document historique

Observations :

        

        La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 signe la fin de l'Etat absolutiste pour le remplacer par un Etat légal, puisque le droit investit pleinement le pouvoir et que l'arbitraire disparaît. Elle parachève donc l'Etat de droit amorcé durant l'Ancien Régime (avec son droit romain et coutumier). Elle instaure également l'idée d'un Homme comme catégorie universelle, qui serait un acteur du corps juridique que représenterait la citoyenneté, effaçant la société d'ordres, où chaque homme serait un sujet du Roi. La Déclaration de 1789 est le résultat de nombreux débats qui eurent lieu du 20 au 26 août et qui accouchèrent de 17 articles désordonnés, qui revisitaient l'un des nombreux projets envoyés au comité de l'Assemblée Nationale qui n'avait que quelques mois d'existence. C'est une œuvre provisoire qui devait être transformée lorsque la Constitution serait achevée, mais qui fut sauvegardée afin de préserver son caractère sacré. Pourtant, le terme de déclaration vient du latin declarare qui signifie  «faire voir clairement», ce qui sous entend que les droits sont naturels,  et qu'il faut simplement les énoncer afin qu'ils soit officiels. Cette déclaration est donc avant tout un projet révolutionnaire, qui s'inspire des Lumières pour justifier sa portée universelle, mais qui est en réalité amenée à être modifiée en même temps qu'évolue la société moderne.

C'est pourquoi le 24 juin 1793 la constitution dite montagnarde, qui place en préambule une nouvelle Déclaration avec ses 37 articles, est proclamée. Selon Emile Acollas, c’est celle qui «marque le mieux le point culminant auquel la Révolution a atteint»

(Philosophie de la science politique et commentaire de la Déclaration des droits de l'homme de 1793). En effet, depuis le 10 août 1792 la France n'est plus une monarchie constitutionnelle, et la Convention a remplacé l'Assemblée Nationale Législative, pour instaurer la République et le suffrage universel masculin, au lieu du suffrage censitaire de 1791. La Déclaration qu'elle propose après acceptation du projet de Hérault de Séchelles (mais qu'elle remet à plus tard à cause du contexte socio-économique) se veut refléter la nouvelle société, influencée par les insurrections populaires qui ont égrené les années 1789-1793.

On remarque l'omniprésence du peuple dans la Déclaration de 1793, tandis que celle de 1789 ne l'évoque qu'une fois, à travers la périphrase «les représentants du peuple français». On sait que les deux Déclarations ont été écrites par deux régimes différents, qui n'avaient pas les mêmes intérêts ni les mêmes visées.

L'Assemblée de 1789 est traditionnellement décrite comme essentiellement composée de bourgeois aisés et de nobles libéraux, tandis que la Convention de 1793 comporte une majorité de Montagnards, issus de la petite bourgeoisie et favorables à une alliance avec les sans-culottes parisiens.         

        On peut ainsi se demander si l'on peut suivre la vulgate traditionnelle du passage d'une Déclaration bourgeoise et libérale en 1789 à une Déclaration populaire en 1793 ?

        La Déclaration de 1793 s'inscrit dans la continuité de celle de 1789, puisque les deux définissent le peuple comme un ensemble de citoyens qui ont des droits politiques et qui appartiennent à un Etat. En fait, la Déclaration de 1793 se distingue de celle de 1789 en proposant l'instauration de la démocratie, alors que celle de 1789 se contentait de proscrire l'Ancien Régime. Cela lui permet de prôner la mise en avant d'une vision sociale du peuple, avec la promulgation des droits sociaux et économiques. Pourtant, elle ne remet pas en cause les valeurs bourgeoises de la déclaration de 1789 : elle a été écrite pour se laver d'une accusation de dictature.

        

        ***

        La Déclaration de 1793 s'inscrit dans la continuité de celle de 1789. En effet, elle  reprend le concept de citoyen hérité des Lumières. Ainsi, elle peut instaurer la notion de droits sacrés et inaliénables.

        La Déclaration de 1793 porte le même titre que celle de 1789, il n'y a donc pas une volonté de s'en écarter mais plutôt de l'expliciter, elle n'est donc pas plus « populaire » que ne l'était déjà celle de 1789 si l'on considère le peuple comme une notion juridique.

Selon Simone Goyard-Fabre, les Constituants se seraient ralliés aux vues de Jean Jacques Rousseau et auraient considéré leur texte comme la proclamation de droits politiques attachés à la citoyenneté. Les conventionnels invoquent eux aussi la notion de droit naturel. La Déclaration de 1793 aurait donc à l'image de celle de 1789 une vocation universaliste, Pétion déclarait ainsi le 23 août «Il ne s'agit pas ici de faire une déclaration des droits seulement pour la France, mais pour l'homme en général».

Cette volonté est bien entendue politique, les deux déclarations veulent asseoir la légitimité du texte en invoquant une légalité supérieure à des droits positifs et arbitraires qui caractérisaient l'Ancien Régime. L'Ancien Droit était ainsi essentiellement coutumier (bien qu'on appliquât au sud le droit romain) et de type corporatiste.

Les deux déclarations ont donc une volonté d'unification et de rationalisation des droits, ce qui leur permet d'imposer la notion du citoyen, en opposition avec la notion de sujet, placé sous l'autorité du monarque absolu de droit divin.

On trouve donc logiquement un éloignement du christiannisme à travers la notion d'Etre Suprême, elle aussi héritée des Lumières (on pense à la profession de foi du vicaire Savoyard rousseauiste qui présente un Dieu de la Nature). L'Assemblée et la Convention souhaitent une régénération politique : leur déclaration n'est que le préambule d'une Constitution.  Pourtant elle veut donner au citoyen et à ses droits une force, une certaine solennité (le mot est d'ailleurs cité dans les deux déclarations). L’Etre Suprême apparaît alors comme un Dieu épuré de tous les artifices accumulés depuis la Rome catholique. Encore une fois les Conventionnels iront plus loin puisqu'on sait qu'à partir du printemps 1794 les Montagnards mettront en place, sous l'influence de Robespierre le culte de l'Etre Suprême. Les deux déclarations sont donc populaires au sens juridique puisqu'elles s'inspirent toutes les deux des valeurs héritées des Lumières qui formalisent l'idée d'une Nation composée de citoyens.

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