Commentaire d'arrêt de la 2e chambre civile du 28 janvier 1954
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt de la 2e chambre civile du 28 janvier 1954. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Remi2199 • 30 Avril 2018 • Commentaire d'arrêt • 1 990 Mots (8 Pages) • 952 Vues
Le 28 janvier 1954, la 2e chambre civile de la Cour de Cassation a rendu un arrêt de cassation de principe relatif à la personnalité civile d’un comité d’établissement
En l’espèce, un comité d’établissement d’une compagnie accuse un vendeur de ne pas lui avoir livré une commande de vêtement, le comité d’établissement de la compagnie assigne le vendeur devant le juge pour une action en remboursement. Ainsi, le comité d’établissement agit en qualité de demandeur
En première instance, le demandeur a été débouté de ses prétentions par les juges de fond, il a alors fait appel de cette décision en qualité d’appelant. Par un arrêt du 30 octobre 1950, la Cour d’Appel de Lyon a débouté l’appelant de ces prétentions en déclarant irrecevable cette action en remboursement intentée par l’appelant. La Cour d’Appel évoque en effet qu’un comité d ’établissement n’est pas doté de personnalité civile. En effet, la Cour d’Appel de Lyon, ne considère pas que l’ordonnance législative du 22 février 1945 attribue la personnalité civile aux comités d’établissement. Pourtant elle attribue expressément la personnalité civile aux comités d’entreprise dans le paragraphe 2 de son premier article et assimile dans son article 21, la composition et le fonctionnement du comité d’entreprise et du comité d’établissement. Ainsi selon la Cour d’Appel, le silence de la loi quant à la personnalité civile des comités d’établissement doit être interprété comme un refus de la part du législateur d’attribuer la personnalité civile au comités d’établissement. C’est cette absence de personnalité juridique qui entraine l’impossibilité pour l’appelant d’agir en justice. Le comité d’établissement décide alors de se pourvoir en cassation en faisant valoir un moyen unique composé au minimum en deux branches.
En déclarant irrecevable une action en remboursement intentée par un comité d’entreprise au motif qu’il ne disposait pas de la personnalité civile, la Cour d’Appel a-t-elle violé l’ordonnance législative du 22 février 1945 ? En d’autres termes, les comités d’établissement ont-ils une personnalité civile similaire à celle des comités d’entreprise au regard de l’ordonnance législative du 22 février 1945 ?
Par un arrêt de principe du 28 janvier 1954, la Cour de Cassation a jugé que l’assimilation dans la composition et dans le fonctionnement de ces deux comités posés à l’article 21 de l’ordonnance législative, couplée à la reconnaissance d’une personnalité civile en faveur du comité d’entreprise issu du second paragraphe de l’article 1er de cette ordonnance entrainait logiquement la reconnaissance de la personnalité civile du comité d’établissement. Ainsi, puisque disposant d’une personnalité civile, l’action en justice du comité d’entreprise est bel et bien recevable. La Cour de Cassation casse l’arrêt du 30 octobre de la Cour d’Appel de Lyon qui a donc violé l’ordonnance du 22 février 1945 en ne reconnaissant pas à un comité d’établissement la personnalité civile. Elle renvoie les parties devant la Cour d’Appel de Riom.
Elle pose en plus de cela un principe dans son premier attendu. Dans un premier temps, ce principe peut être perçu comme une véritable rupture vis-à-vis de la conception classique de la reconnaissance de la personne morale à travers la reconnaissance de la personnalité civile du comité d’établissement (I) mais la suite de l’arrêt laisse présager que la position de la Cour de Cassation sur la question reste relativement ambivalente (II)
- La reconnaissance de la personnalité civile du comité d’établissement
Cet arrêt pose dans un premier attendu que « la personnalité civile n’est pas une création de la loi », c’est une véritable prise de position en faveur de la provenance de la personnalité morale qui rompt avec la théorie de la fiction suivie par les juges de fond (A) pour s’exprimer en faveur de la théorie de la réalité (B).
- La théorie classique de la fiction suivie par les juges de fond
Tout d’abord, la question de la provenance de la personne morale s’est posée aussi bien en doctrine qu’en jurisprudence, il s’agit de trouver ce qui explique la personnalité du groupement formant la personne morale.
Classiquement, la doctrine et les juges se sont tournés vers ce qui est dénommée la « théorie de la fiction ». Cette théorie consiste à dire que la personnalité morale est une pure création de la loi, c’est-à-dire que la personnalité morale résulte de la loi elle-même car la personnalité ne peut appartenir qu’à des personnes physiques. Il faut donc que la loi consacre expressément cette personnalité pour que soit reconnu la personnalité civile à une personne morale. Ainsi, les juges de fond ont penché vers cette théorie. En effet, pour les comités d’établissement, c’est la loi Auroux de 1982 qui reconnait la personnalité civile des comités d’établissement, et aujourd’hui cette reconnaissance figure à l’article L. 2327-18 du Code du Travail. Cependant, en 1950, la Cour d’Appel ne disposait que de l’ordonnance législative du 22 février 1945 et du décret du 2 novembre 1945. Mais alors que ces textes accordaient expressément la personnalité civile au comité d’entreprise, ils n’avaient rien prévu de tel pour les comités d’établissement. Les juges de fond, fidèles à la théorie de la fiction déduisent de ce silence de la loi que les comités d’établissement ne peuvent avoir de personnalité morale.
La Cour de Cassation dans sa décision a consacré l’opinion inverse en se prononçant en faveur de la théorie de la réalité dans la reconnaissance de la personnalité morale pour les comités d’établissements.
- La consécration de la théorie de la réalité par le Cour de Cassation
Pour continuer, la Cour de Cassation semble consacrer dans son premier attendu la théorie de la réalité, cette théorie s’oppose en tout point à la théorie classique de la fiction. Cette théorie consiste à dire qu’une personnalité morale existe car le groupement à un intérêt propore, un intérêt collectif, indépendant de celui de ses membres. Puisqu’il possède une organisation qui lui est propre, cela signifie qu’il existe réellement, concrètement sans même qu’une la loi ne le consacre. Cette théorie est bien visible dans le premier attendu de la Cour de Cassation : « Attendu que la personnalité civile n’est pas une création de la loi ; qu’elle appartient, en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêt licites, dignes, par suite, s’être juridiquement reconnu et protéger ». Dans le cas d’espèce , la Cour de Cassation reconnait la personnalité morale du comité d’établissement alors que cette reconnaissance n’est pas explicite dans l’ordonnance du 22 février 1945 et dans le décret du 2 novembre 1945.
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