Commentaire d'arrêt Conseil d’État du 9 janvier 2014 Ministre de l’Intérieur c/ Société Les Productions de la plume, Dieudonné M’Bala M’Bala
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt Conseil d’État du 9 janvier 2014 Ministre de l’Intérieur c/ Société Les Productions de la plume, Dieudonné M’Bala M’Bala. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar gaulthier_dm • 16 Février 2020 • Commentaire d'arrêt • 2 365 Mots (10 Pages) • 948 Vues
DE MARCO
Gaulthier
Groupe ENS Cachan
TD7 : La police administrative
- Commentaire de l’ordonnance du juge des référés du Conseil d’État du 9 janvier 2014
Ministre de l’Intérieur c/ Société Les Productions de la plume, Dieudonné M’Bala M’Bala
Le polémiste Dieudonné M’Bala M’Bala a été condamné, mercredi 27 novembre, à 9 000 euros d’amende pouvant se transformer en emprisonnement en cas de non-paiement, pour complicité d’injure à caractère antisémite, après la publication d’une vidéo et d’une chanson jugé antisémite. L’ordonnance du Conseil d’Etat du 9 janvier 2014 est en lien avec cet humoriste, où la question de l’interdiction de son spectacle humoristique se pose.
Le spectacle « Le mur » de M. Dieudonné devant se déroulait le 9 janvier 2014 à Saint-Herbain est interdit par le préfet de Loire-Atlantique au motif qu’il porterait atteinte à la dignité humaine et pourrait causer des troubles à l’ordre public. La société Les Productions De La Plume et de M. Dieudonné demandent au juge administratif de suspendre l’arrêté du préfet, ce que le juge administratif fait.
Le ministre de l’Intérieur demande donc au Conseil d’Etat d’annuler l’ordonnance suspendant l’exécution de l’arrêté en question.
Le 7 janvier 2014, le préfet de Loire-Atlantique interdit par un arrêté le spectacle « Le mur » de M. Dieudonné devant se déroulait le 9 janvier 2014 à Saint-Herbain. La société Les productions De La Plume et M. Dieudonné saisissent le juge des référés du tribunal administratif de Nantes pour demander la suspension de l’exécution de l’arrêt. Le juge des référés suspend l’exécution dudit arrêt par une ordonnance du 9 janvier 2014. Le même jour, le ministre de l’Intérieur demande au Conseil d’Etat l’annulation de cette ordonnance et le rejet de la demande présentée par la société Les Productions De La Plume et de M. Dieudonné.
Un spectacle peut-il être interdit pour des raisons d’ordre public ? Plus particulièrement peut-on porter atteinte aux libertés fondamentales que sont la liberté d’expression et de réunion pour un motif de maintien d’ordre public ?
Le Conseil d’Etat annule l'acte de suspension de l’arrêté du préfet le jour même, en invoquant un nouveau principe qui va rejoindre l’ordre public : la cohésion nationale.
Il justifie sa décision par le fait qu’il appartient aux autorités administratives de prendre les décisions nécessaires afin d’éviter que des infractions pénales soient commises, ce sont des mesures de police préventive.
En l’espèce le juge administratif donne un double fondement, d’abord sur le fait que le spectacle pourrait constituer une atteinte à la dignité humaine, puis que celui-ci pourrait causer des troubles à l’ordre public tel que des rixes entres individus.
Nous verrons, dans une première partie le double fondement sur lequel s’appuie le Conseil d’Etat pour justifier une atteinte aux libertés fondamentales (I), puis nous étudierons, dans une seconde partie les apports et limites des innovations du juge administratif dans cette jurisprudence (II).
I. Le double fondement juridique justifiant l’atteinte aux libertés fondamentales
- Un motif d’ordre public matériel : le risque de trouble à l’ordre public
1) L’interdiction d’un spectacle, privation de libertés fondamentales
- La liberté de réunion permet d’être libre de se réunir pour assister à un spectacle tel que celui de M. Dieudonné, et l’interdiction de cette liberté reste rare même s’il existe des exemples comme l’arrêt du Conseil d’État, 18 décembre 1959, Société Les films Lutétia, qui autorise le maire à interdire un film pour des circonstances exceptionnelles locales ou alors l’arrêt du Conseil d’Etat, 23 décembre 1936, Bucard pris en assemblée qui autorise l’interdiction de réunions privées lorsque les forces de l’ordre de sont pas suffisantes pour assurer le maintien de l’ordre public.
- L’ordonnance du 9 janvier 2014 qui interdit le spectacle de Dieudonné apporte une nouveauté, il appartient à l’autorité administrative « de prendre les mesures afin d’éviter que des infractions pénales soient commises ».
Le Conseil d’Etat n’avait jamais affirmé ce caractère, de plus dans l’arrêt du Conseil d’Etat, 26 février 2010, Commune d’Orvault, à propos du même humoriste, il était dit qu’il fallait que les troubles à l’ordre public soient caractérisés pour interdire le droit fondamental à la liberté de réunion, et en l’espèce le Conseil d’Etat avait autorisé le spectacle de Dieudonné en 2010.
En l’espèce dans cette ordonnance du 9 janvier 2014, le Conseil d’Etat juge qu’il y a un risque sérieux de rixes entres spectateurs et autres individus en raison des grandes différences d’opinions de chacun, qui causerait un trouble à l’ordre public
2) Le rôle préventif de la police administratif
- En matière de prévention de troubles à l’ordre public, c’est la police administrative qui intervient. Le Ministre de l’intérieur rappelle dans sa circulaire du 6 janvier 2014 que le principe de liberté n’est pas absolu, et qu’il doit être concilié avec les nécessités du maintien de l’ordre public. En l’espèce la liberté d’expression de M. Dieudonné se voit interdite durant son spectacle par l’arrêté préfectoral.
- Pour qu’une mesure de police administrative soit légale, il faut qu’elle soit nécessaire, adapté et proportionné. En l’espèce l’interdiction du spectacle de M. Dieudonné répondait à ces 3 critères.
- La police administrative a pris des mesures préventives pour éviter que des infractions pénales soient commises, elle justifie cela dans l’arrêté par le fait que l’humoriste a déjà été condamné neuf fois pour des propos similaires à ceux de son spectacle comme de l’antisémitisme, donc il y a possibilité qu’un délit soit commis.
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