Commentaire comparé
Commentaire d'arrêt : Commentaire comparé. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Kamel Jennadi • 4 Mars 2019 • Commentaire d'arrêt • 2 146 Mots (9 Pages) • 518 Vues
Kamel Setti Groupe 12
« Le droit administratif est un droit de proximité », affirmait Didier Truchet, agrégé de droit public et professeur à l’Université Paris 2. Et en effet, c’est ce souci d’agir pour l’intérêt général de la proximité, pour les administrés, qui justifiera que l’Administration bénéficie de moyens et procédés lui permettant d’adopter, par sa volonté seule ou partagée, des actes juridiques. Ainsi, les actes unilatéraux, mais également des actes contractuels, apparaissant dès l’Empire Romain, mais également au Moyen-Âge, par les contrats de développement des concessions. Cependant, quand l’État décidera de prendre en charge de nombreuses activités de nature commerciale par ce dernier procédé et avec des partenaires privés nouveaux, la rencontre de volontés contraires entrainera des difficultés de qualification, nécessitant des indices et critères textuels ou jurisprudentiels pour déterminer la nature juridique du contrat en question. C’est ce qu’il conviendra d’étudier dans deux décisions du Tribunal des conflits, rendue le 23 février 2004 et le 9 février 2015.
En l’espèce, dans la première affaire, un contrat de crédit-bail fut conclu en 1991 entre le centre hospitalier général du pays d’Aix-en-Provence et la société Novaleasing, filiale de la société LEASECOM, a eu pour objet la location et le financement d’un automate de dispensation de médicaments fourni à l’établissement hospitalier, en vertu d’un second contrat signé par un laboratoire pharmaceutique, par lequel le matériel a été acquis. Cependant, les conditions d’exécution de ce contrat par l’établissement public auraient causé un préjudice selon la société LEASECOM.
Dans la seconde affaire, la direction des affaires sanitaires et sociales du département d’outre-mer de Mayotte passa en 2006 une commande de cinquante mille combinaisons jetables destinées à son personnel, auprès de la société Senseo. Mais par la suite, la personne publique dénonça ce contrat après la livraison des produits en question et sans effectuer le paiement à la société, qui l’exigea en vain.
Dans la première affaire, la société LEASECOM forma un pourvoi devant le Tribunal de grande instance de Nanterre, en date du 23 juin 1998. Mais le Tribunal se déclara incompétent pour connaitre le litige. Par la suite, le Tribunal administratif de Marseille, le 11 février 2003, fut saisi d’une demande de la société et tendant à ce que l’établissement public verse une somme en conséquence du préjudice causé par la mauvaise exécution du contrat, mais le juge décida de renvoyer au Tribunal des Conflits le soin de décider de l’ordre compétent. Ainsi, le ministre de la santé ainsi que le centre hospitalier soutenaient que le contrat était administratif.
Dans la seconde affaire, la société intenta un recours juridique qui, par la suite, passa par la Cour administrative d’appel de Bordeaux en 2012, qui se déclara incompétent pour connaitre la qualité de ce litige. Le 14 avril 2014, le Tribunal de grande instance de Mamoudzou fut saisi par la société, tendant à ce que l’État soit condamné au versement d’une somme, au titre des factures du contrat impayées, et comme l’affaire précédemment étudiée, le Tribunal des Conflits fut saisi. Ainsi, la société Senseo soutenait que l’ordre judiciaire était compétent, tandis que l’Agence régionale de santé de l’Océan indien affirmait que l’ordre compétent était l’ordre public administratif.
Il conviendra alors logiquement pour le juge de se demander quel ordre juridique est compétent pour trancher les litiges en questions ?
Alors que, par la décision rendue le 23 février 2004, le Tribunal a jugé que le contrat avait pour objet de faire participer le co-contractant à l’exécution d’une mission de service public, affirmant donc la compétence du juge administratif, la seconde décision de 2015, jugea, compte tenu de l’absence de qualification légale, d’objet et de contenu lié aux missions de l’Administration, que l’ordre judiciaire était compétent.
Il conviendra alors d’étudier dans un premier temps les dispositions légales relatives à la distinction et la détermination des ordres juridiques en droit français (I), avant de voir dans un second temps les critères posés par le juge au fil des décisions et arrêts administratifs (II).
I/ La détermination textuelle des contrats administratifs :
Comme il se doit, avant de s’intéresser aux critères jurisprudentiels de détermination des contrats administratifs, il doit être nécessaire d’aborder l’importance de distinction entre les deux grands ordres (A), avant de parler de la détermination légale des contrats, notamment sur leurs caractères administratifs (B).
A. Une nécessité de distinction des ordres juridiques français :
En effet, et d’autant plus quand il sera question du mode d’action répandu qu’est le contrat, il est nécessaire d’opérer une distinction entre ce qui relèvera des processus contractuels de droit administratif et ce qui relèvera de l’ordre du droit privé. Car la Loi des 16 et 24 août 1790 fut ainsi fondatrice de la dualité des ordres de juridictions, séparant le juge de l’Administration et des missions d’intérêt général étatique, et le juge judiciaire réglant les litiges d’intérêts particuliers entre contractants privés. Le contrat sera donc une technique de l’Administration, mais qui ne sera pas soumise instantanément et nécessairement au droit public, notamment quand cette dernière agira comme une entreprise, dans des domaines nouveaux et avec des partenaires privés.
En l’espèce, les deux décisions du Tribunal des Conflits ont ainsi « le soin de décider sur la question de compétence », à savoir quel juge est compétent. Les deux décisions sont également des conflits entre deux intérêts distincts : Une société privée avec un intérêt pécuniaire et une recherche de profit, et de l’autre côté une personne morale de droit public avec un intérêt général et un grand service, avec chacun des moyens tendant à ce que leur ordre soit compétent. Une motivation se traduisant également par les visa des décisions, rappelant la Loi de 1790 mais également le décret du 16 fructidor an III, adopté par les pouvoirs publics rappelant la règle de non intervention des juges civils dans le domaine administratif.
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