Commentaire de texte Sénèque : Lettres à Lucilius Sénèque Extrait de la Lettre XVI : Utilité de la philosophie
Commentaire de texte : Commentaire de texte Sénèque : Lettres à Lucilius Sénèque Extrait de la Lettre XVI : Utilité de la philosophie. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Kxderi • 26 Avril 2022 • Commentaire de texte • 4 293 Mots (18 Pages) • 905 Vues
Eva Larive DM 1 Histoire de la philosophie
Lettres à Lucilius Sénèque
Extrait de la Lettre XVI : Utilité de la philosophie
Dans les Lettres à Lucilius, Sénèque tient une correspondance avec Lucilius le Jeune, gouverneur romain de Sicile. L’auteur cherche, à travers ces lettres, à expliquer et enseigner les conceptions stoïciennes qui sont les siennes au jeune gouverneur. Dans cette correspondance, de multiples sujets sont abordés et commentés notamment la nature, la métaphysique ou encore la mort. L’objet de la lettre XVI, comme l’indique le sous-titre de la lettre, traite de “l'utilité de la philosophie”. Ainsi il établit et légitime dans notre extrait, qui constitue les premier paragraphes de la lettre XVI, une méthode pour exercer la philosophie.
Dans ce passage de la lettre XVI, l’auteur entreprend de démontrer la thèse selon laquelle la philosophie doit être un exercice quotidien et pratique. Et que cette pratique peut répondre à n’importe quelle situation et ainsi garantir une vie heureuse.
Sénèque a besoin d’avancer cette thèse pour répondre à l'intéressé Lucilius qui est persuadé d’avoir acquis l’essentiel de la philosophie ayant une parfaite connaissance théorique de la discipline. Le philosophe lui montre que c’est non par la simple théorie mais bien par la pratique de la philosophie qu’il peut prétendre atteindre la sagesse. L’enjeu pour Sénèque va être de convaincre Lucilius de mettre en pratique l’enseignement qu’il a appris et donc d’agir uniquement en fonction de ses propres valeurs pour qu’il soit vertueux et pas simplement savant ou plein de bonnes intentions.
Nous pouvons ainsi nous demander : Comment Sénèque démontre et enseigne à Lucilius que l’exercice de la philosophie pour être réellement intégré et bénéfique, doit être un exercice pratique et quotidien plus qu’un simple apport théorique ? Comment conceptualise-t-il une “bonne” nature de l’action humaine ?
Dans cet extrait, nous pouvons percevoir deux enjeux majeurs. Tout d’abord, un enjeu méthodologique. En effet, Sénèque propose une méthodologie de la philosophie “pratique” en montrant d’abord le problème auquel cette méthode répond, à savoir le manque d’harmonie entre les actions et les valeurs chez l’individu, puis explique concrètement à travers des exemples, comment pratiquer la philosophie, enfin légitime sa méthode (et ainsi sa thèse : la sagesse se mesure dans l’action) à travers sa réponse à de potentielles objections qu’il anticipe lui-même.
Un second enjeu va être d’établir l’universalité et l'intemporalité du bien que procure la pratique philosophique pour cela, Sénèque répond à la question : en quoi la philosophie permet-elle de concilier liberté et destin ? Ici, il est essentiel de saisir en quoi la philosophie accorde la nature de l’homme avec le monde qui l'entoure. Pour cela, Sénèque interroge et conceptualise la relation entre la raison et l’action humaine.
Sénèque commence par affirmer la difficulté d’atteindre la sagesse et répond à la question : comment agir en philosophe ? En établissant les premiers enseignements de sa méthodologie (Du début du texte ligne 1 à 11 << tu as gagné. >>). Ce qui nous amène à nous demander pourquoi agir en philosophe, question à laquelle Sénèque répond d’abord par une définition de la philosophie (De la ligne 11 << La philosophie n’est point >> à la ligne 16 << on ne peut demander qu'à elle ! >>). Puis il poursuit sa réponse en intégrant une objection à laquelle il répond directement, il répond à la question : pourquoi agir s’il existe une fatalité ? ( De la ligne 17 << Mais dira-t-on >> à la maxime de fin de texte << fais ta manière d’être de ce qui n’est qu’un heureux élan >> l.29).
Sénèque commence par reprendre des évidences précédemment établies par le biais du mot “clair” : << Il est clair pour toi, Lucilius >> (l.1). L’évidence est le fait que Lucilius a bien intégré les différentes types de vie et leurs rapports à l’étude de la sagesse : d’abord la vie heureuse est associée à une sagesse parfaite et une vie supportable à une sagesse ébauchée (et une troisième qui n’est pas explicitement citée et que l’on pourrait qualifier de “misérable” : une vie sans sagesse) (l.3).
Cependant, Sénèque introduit une opposition par le terme “Mais” (l.3) et introduit le fait que cette connaissance de la sagesse ne suffit pas et doit être “enracinée” (L.3) par une “méditation de tous les jours”, ainsi, il faut fixer profondément et durablement, dans l'esprit et dans le cœur, dans sa nature (enraciner une idée dans la tête de quelqu'un) cette “conviction” que la sagesse est essentielle. Par la citation “ méditation de tous les jours”, Sénèque distingue deux dimensions de la philosophie : la dimension théorique, “l’étude de la sagesse"; et la dimension pratique et quotidienne qui va constituer l’objet principal du texte. Ainsi, il établit que la méditation en question est la philosophie, et que cette méditation doit être un exercice quotidien plus qu’une simple connaissance de la valeur de la sagesse. Par la suite, il montre le problème que peut rencontrer un “novice” dans la pratique de la philosophie stoïcienne, et initie alors la question centrale de l’utilité de la pratique de la philosophie : << L’œuvre est plus difficile de rester fidèle à ses plans que de les former vertueux. >> (l.4). Cette citation implique ici de définir ce qu’est la “vertue” chez les stoïciens pour comprendre en quoi une méditation quotidienne et mise en pratique de celle-ci, engendre de “bonnes” actions et donc une attitude vertueuse. On peut, pour cette définition, s’appuyer sur une définition de Jean Stobée qui la définit dans Eclogæ physicæ et ethicæ comme “une conformité de l’âme avec elle-même pendant toute la vie”. Ainsi, chez les stoïciens, un individu vertueux est un homme qui vit dans la direction qu’il donne à ses intentions, c’est quelqu’un qui vit en adéquation avec ses propres valeurs donc qui agit en fonction de ses principes et qui suit “sa nature” et non des choses comme l’opinion ou la passion par exemple, qui l’insiterai à faire des choses contraires à ses propres valeurs par affecte ou par peur de jugement par exemple. Il apparaît donc qu’il est plus difficile de s’en tenir à faire une bonne action par jour que de formuler le vœu d’en faire dix par exemple. Ici le but est de montrer que la fidélité dans l’action vaut bien plus que la pureté des intentions .
...