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Conscience et perception

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Par   •  7 Mars 2017  •  Cours  •  4 316 Mots (18 Pages)  •  947 Vues

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         NOTES & EXPLICATIONS SUR LA CONSCIENCE & LA PERCEPTION

        Conscience

         Le sujet réfléchit. Là est tout le problème : le sujet réfléchit. Dépassons le sens courant du terme, c’est-à-dire un synonyme très vague de « penser », nous serons porter à considérer une signification se prêtant davantage à notre objet d’étude : la réflexion, c’est ce qui se réfléchit, comme la lumière se réfléchissant sur une vitre, ou sur une flaque d’eau. Le sujet est réfléchissant autant que réflectif : il se pense, il se construit, il se réfléchit en tant qu’unicité, que sujet unique ; un sujet unique qui, pourtant, dérive tout autant dans la multiplicité des idées, des opinions, des schémas, des concepts. La multiplicité, c’est d’abord ses identités : c’est un homme, c’est une femme ; c’est un fils, c’est une fille ; c’est un être qui se sait aimé, aimant, qui dispose de certaines potentialités (en puissance, en action, etc.), qui se sait être par le fait même de réfléchir son être, davantage que réfléchir sur son être. Le sujet est d’abord, et en premier lieu, parce qu’il dispose de l’avantage de réfléchir ses potentialités d’être. La multiplicité des identités, des constructions de l’être, trouvent un écho dans l’assimilation d’une unicité, d’une particularité du sujet : Salomé est Salomé, non pas en tant qu’elle est Salomé pour autrui, mais bien parce qu’au-delà de ce prénom-même, une identité unique de l’être s’est forgée au travers de recherches multiples de l’être en tant que cet être-ci, et non pas cet être-là.

         La conscience, même si elle ne se comprend pas pareillement selon les disciplines, est d’abord la perception du sujet à être en tant que sujet, et objet, d’étude. Et pour autant, la Salomé d’il y a dix ans est-elle la Salomé d’aujourd’hui ? Assurément non. Est-ce ton être qui a changé, ou l’idée que tu as de ton être qui a changé ? sont-ce les fondements de ce que tu es, en tant que tu les penses vrais et nécessaires à présent, ou tes potentialités de réflexion qui ne sont pas les mêmes ? Autrement dit : lorsque tu penses à « toi-même », es-tu une Salomé qui pense à la Salomé, ou la Salomé qui pense à une Salomé ? Les différences peuvent te paraître mineures au premier abord, mais elles sont importantes. Si c’est le premier cas, alors tu n’es pas une entité qui possède une ipséité : c’est-à-dire que tu n’assumes pas que les variations de ton être soient partie intégrante de ce que tu es. Si c’est le deuxième cas, alors tu te sais définie par la certitude d’être une unicité pensante, une indépendance de réflexion : tu es unique, non parce que tu l’es de fait, mais parce que tu daignes l’imprimer en toi comme vrai.

         Prends-toi comme une symphonie, comme une mélodie, comme une musique, et des notes, des crescendos, des contraltos, forment tout ton être. Tu es unique de tes multiplicités : tu es unique de ta capacité à te penser sujet, et objet, des changements nécessaires de ton être, en tant que tu es cet être-même.

         

         Une conception pessimiste de la conscience :

          Emil Cioran, Cahiers (1957-1972) :

         « On ne réfléchit que parce qu'on se dérobe à l'acte. Penser, c'est être en retrait. »

         Arthur Schopenhauer, Parerga et paralipomena :

          « Pour le philosophe, la vie est absolument insatisfaisante; il ne veut pas s’en accommoder, et ne le peut pas, même s’il le voulait; il y renonce, néglige de s’en assurer les avantages, s’éloigne d’elle, pour l’envisager dans son ensemble, à l’aide de cet éloignement, et la reproduire. En ceci il déploie ses forces, et c’est la meilleure partie de son existence. Quant à sa personne même, il présente la reproduction, en disant : ‘‘Voilà la chose que je n'aimais pas.’’»

         [Explication : Cette pensée, que je trouve très juste, court parmi certains auteurs : le penseur, et davantage celui qui se sait penseur par dépit, par torture, par souffrance, est en retrait de l’humanité, comme une espèce d’homme solitaire, misanthrope, et haïssant sa personne propre. Ce désespoir, qu’on retrouve à la fois chez Baudelaire, chez Maupassant, chez Thomas Mann, chez Caraco, etc., est typique d’une certaine catégorie de penseurs qui ne peuvent être qu’uniques par leur expérience de leur unicité. La dimension expérimentale de l’unicité du sujet est alors, en général, une dépression, un épisode traumatique ou une conception particulièrement mélancolique, et pessimiste, de l’existence. Le désespoir ancre l’existence de l’homme en tant qu’expérience de la souffrance (et c’est une thèse très schopenhauerienne).]

         Une conception dite « immatérialiste » de la conscience :

         George Berkeley, Principes de la connaissance humaine :

         « II.  (…) Cet être actif percevant est ce que j’appelle esprit, âme, ou moi. Par ces mots je n’entends aucune de mes idées, mais bien une chose entièrement distincte de [ces idées], en laquelle elles existent, ou, ce qui est la même chose, par laquelle elles sont perçues ; car l’existence d’une idée consiste à être perçue. »

         [Explication : Ton esprit se perçoit lui-même est perçu en tant qu’être à être. Cela semble compliqué, mais c’est simplement que ton esprit est principiel dans sa réflectivité : sans lui, pas d’être aux choses ; et lorsque lui-même est, il est en tant que chose à être afin d’être. Autrement dit, il ne peut être sans aspirer à être. La phrase la plus connue de Berkeley, c’est : « esse est percipi » (être, c’est être perçu).]

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