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La Liberté

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Par   •  18 Février 2015  •  Analyse sectorielle  •  10 132 Mots (41 Pages)  •  579 Vues

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Introduction

La liberté… Quel joli mot ! La liberté est un idéal. En fait, nous désirons la liberté avant même de savoir ce qu’elle signifie.

LIBERTÉ : c’est un de ces détestables mots qui ont plus de valeur que de sens ; qui chantent plus qu’ils ne parlent ; qui demandent plus qu’ils ne répondent ; de ces mots qui ont fait tous les métiers, et desquels la mémoire est barbouillée de Théologie, de Métaphysique, de Morale et de Politique ; mots très bons pour la controverse, la dialectique, l’éloquence ; aussi propres aux analyses illusoires et aux subtilités infinies qu’aux fins de phrases qui déchaînent le tonnerre.

Paul Valéry, Regards sur le monde actuel, « Fluctuations sur la liberté » (1938)

Méfiance, donc. Avec les mots de ce genre, le « terrorisme conceptuel » risque d’être fréquent. Si un penseur défend une conception de la liberté, bien souvent il ne fait pas œuvre de scientifique ni d’analyste, et ne s’en tient pas à une recherche purement conceptuelle. Au contraire, défendre une conception de la liberté constitue souvent un moyen de défendre un certain idéal. Nommer cet idéal « liberté » signifie simplement : je désire cet idéal, et tout le monde devrait le désirer, car tout le monde veut être libre…

A l’encontre de cette tendance, analysons froidement le concept de liberté. La liberté peut signifier plusieurs choses :

(1) En physique, on parle de « degrés de liberté » pour désigner l’excès du nombre de dimensions sur le nombre de contraintes. Par exemple, une perle astreinte à se mouvoir le long d’une tige fixe a un degré de liberté (droite). Une boule de billard, si on considère qu’elle ne peut sauter, a deux degrés de liberté (plan).

(2) Liberté extérieure (liberté d’agir, liberté politique) : désigne l’absence d’entraves extérieures, autrement dit, le fait de ne pas être empêché les choses que l’on peut et que l’on veut faire.

(3) Liberté intérieure (liberté de penser et de vouloir, liberté métaphysique). C’est ici que les choses se compliquent. Cette liberté désigne une certaine propriété de la volonté humaine ou de l’âme. On peut la concevoir de différentes manières :

(a) Spontanéité de la volonté : simple capacité de vouloir et d’agir.

(b) Absence de toute détermination.

(c) Adhésion à soi, accord avec soi-même.

(d) Faculté de penser.

(e) Indépendance d’esprit, indépendance à l’égard des influences extérieures.

Et on pourrait certainement allonger la liste. Nous étudierons cela plus en détail par la suite.

I. La liberté extérieure

A. La liberté comme absence d’entraves (Hobbes)

Nous concevons spontanément la liberté comme la capacité de faire ce qu’on veut, comme le fait de ne pas être empêché d’agir. Ce sens, le plus simple et le plus naturel, est celui que retient le philosophe anglais Thomas Hobbes (1588-1679) :

Le mot LIBERTÉ désigne proprement l’absence d’opposition (par opposition, j’entends les obstacles au extérieurs au mouvement), et peut être appliqué aux créatures sans raison ou inanimées aussi bien qu’aux créatures raisonnables. Si en effet une chose quelconque est liée ou entourée de manière à ne pas pouvoir se mouvoir, sauf dans un espace déterminé, délimité par l’opposition d’un corps extérieur, on dit que cette chose n’a pas la liberté d’aller plus loin. C’est ainsi qu’on a coutume de dire des créatures vivantes, lorsqu’elles sont emprisonnées ou retenues par des murs ou des chaînes, ou de l’eau lorsqu’elle est contenue par des rives ou par un récipient, faute de quoi elle se répandrait dans un espace plus grand, que ces choses n’ont pas la liberté de se mouvoir de la manière dont elles le feraient en l’absence d’obstacles extérieurs. Cependant, quand l’obstacle au mouvement réside dans la constitution de la chose en elle-même, on a coutume de dire qu’il lui manque, non pas la liberté, mais le pouvoir de se mouvoir ; c’est le cas lorsqu’une pierre gît immobile ou qu’un homme est cloué au lit par la maladie.

D’après le sens propre (et généralement admis) du mot, un HOMME LIBRE est celui qui, s’agissant des choses que sa force et son intelligence lui permettent de faire, n’est pas empêché de faire celles qu’il a la volonté de faire.

Thomas Hobbes, Léviathan (1651), II, 21

Ce texte de Hobbes nous permet donc de préciser notre concept intuitif de liberté, en distinguant la liberté de la puissance. Être libre ne consiste pas exactement à pouvoir faire tout ce qu’on veut, mais plutôt à ne pas être empêché de faire ce qu’on peut faire. Ainsi, ne pas pouvoir voler dans le ciel comme un oiseau ou comprendre les équations d’Einstein n’est pas tant un manque de liberté que de puissance (physique ou intellectuelle).

B. La liberté et la loi

La liberté au sens de Hobbes peut donc désigner la liberté politique. Car la loi, même si elle n’est pas un obstacle physique, est similaire à un obstacle physique. Les actes qu’elle interdit sont sanctionnés, donc la loi est bien une limitation de la liberté humaine par la crainte de la sanction (amende, prison, etc.).

1. Etat de nature et Etat social

Il semble donc que la loi constitue un obstacle à notre liberté, car elle nous interdit de commettre certains actes. Mais si la liberté que la loi me fait perdre est évidente, il faut avoir conscience aussi de la liberté que me donne la loi. La loi m’empêche par exemple de nuire à autrui, ce qui est une restriction de ma liberté, mais elle empêche aussi (en tout cas si elle est juste) à autrui de me nuire. Je perds en liberté, mais je gagne en sécurité. Sans la loi, ce serait l’état de nature, la « loi de la jungle », l’anarchie, peut-être la guerre civile. Je serais absolument libre, mais je serais aussi sans doute moins en sécurité.

On peut même dire que la loi favorise la liberté, dans la mesure où la sécurité qu’elle instaure me permet d’agir plus librement. Grâce à la loi, je suis libre d’aller et venir tranquillement le soir dans les rues. On se sent plus libre quand on se promène dans un quartier sûr que dans un quartier chaud,

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