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Dissertation sur le rapport aux corps et l'art - exposition OUR BODY

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Par   •  10 Août 2018  •  Dissertation  •  5 588 Mots (23 Pages)  •  1 624 Vues

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M2 COOPÉRATION ET SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

2017/2018

L’affaire « Our Body »

Histoire et philosophie des droits de l’homme et du citoyen

LECLERC  Aurélie

MOHAMED  Samiratai

THIBAULT-LOSTEC  Tymiane


Introduction :

En hiver 2009, l'exposition "Our Body, à corps ouvert", proposée par la société Encore Events, ouvre ses portes à Paris à l’Espace 12 Madeleine. Elle met en scène 17 cadavres humains d'origine chinoise "plastinés" (technique créée par l’anatomiste allemand Gunther von Hagens visant à préserver des tissus biologiques en remplaçant les différents liquides organiques par du silicone), ouverts et disséqués, afin d'éveiller le grand public au fonctionnement de l'anatomie humaine. Certains corps sont placés dans des positions permettant d’observer le fonctionnement des muscles lors de la pratique de différentes activités sportives. Toutes les parties constitutives de l'anatomie sont représentées : digestive, respiratoire, uro-génital, nerveuse, etc.

Deux associations de défense des droits de l’homme, Ensemble contre la peine de mort et Solidarité Chine, ont saisi le juge des référés, réclamant qu’il soit mis fin à l’exposition et que les corps exposés soient placés sous séquestre. Selon eux, ces cadavres, provenant de Chine, étaient parvenus aux organisateurs de façon malhonnête et sans leur consentement. Il s’agirait d’un trafic de cadavres de ressortissants chinois, trafic interdit par le Code pénal. Cela constitue une atteinte à la dignité de la personne humaine, dont le respect est imposé par l’article 16 du Code civil. Le juge des référés ainsi que la cour d’appel de Paris a interdit à la société « Encore Events » de continuer l’exposition (arrêt du 30 avril 2009), au motif de l’absence de preuve du consentement des personnes de leur vivant.

 

La société organisatrice se pourvoit en cassation en contestant la compétence du juge des référés. Leur argumentation se base sur plusieurs éléments : l’'interdiction de l’exposition porterait atteinte au droit de savoir du public, qu’il n’y a pas de trouble manifestement illicite, qu’il n’a pas été tenté de savoir si les corps étaient traités dignement mais uniquement leurs origines et s’il y avait un consentement de la part des personnes dont les cadavres étaient utilisés au cours de l’exposition.

 

La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 16 septembre 2010, rejette le pourvoi formé par la société Encore Event au motif que l'exposition à des fins commerciales de cadavres ne respecte pas la dignité et la décence reconnue aux restes des personnes décédées (article 16-1-1, alinéa 2 du code civil). En effet, la cour de cassation rejette le pourvoi sur la base du caractère commercial de l’utilisation des cadavres et ne reprend pas l’argument de l’origine douteuse des corps retenu par la Cour d’appel. Le problème soulevé par cette affaire est de savoir si l'exposition portait atteinte au droit au respect dû aux cadavres. Nous allons répondre à la question « Dans quelle mesure l’exposition de cadavres violerait-t-elle l’exigence de l’article 16-1-1 ainsi que les fondements de la dignité humaine ? ».  Pour cela nous étudierons dans une première partie le respect de la dignité humaine après la mort dans le droit ; puis, dans une seconde partie, nous étudierons les exceptions que posent ce droit et sa subjectivité.

  1. Le respect de la dignité humaine après la mort dans le droit
  1. Une Législation relativement récente

        En France, pays des Droits de l’Homme, l’apparition du concept de dignité humaine est très récent, on ne le trouve pas dans la constitution ni même dans la pyramide des normes juridiques. Parfois présenté comme une liberté et parfois comme une contrainte s’imposant à la personne humaine, le concept a été introduit au fur et à mesure des affaires et décisions juridiques. Par exemples, on peut parler des lois bioéthiques, datant de 2008, qui régissent le respect du corps humain après la mort. Avant cela, il y avait un vide juridique. En effet, on a l’idée que l’Homme a une personnalité juridique lui donnant des droits et des devoirs à partir de la naissance et ce, jusqu’à sa mort. Grâce aux lois du 19 décembre 2008 et notamment l’article 16-1-1 du Code civil ci-dessous, le vide n’est plus.

« Art. 16-1-1.-Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. « Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence. »

Cet article est utilisé par la Cour de cassation pour faire valoir son argumentation dans l’affaire de l’exposition Our Body. L’idée est que faite à des fins commerciales, l'exposition de cadavres humains méconnaît le respect, la dignité et la décence avec lesquels les corps doivent être traités. Il est pertinent dans le sens où il vient modifier la législation existante sur l’état du cadavre.

Par ailleurs, il est important de préciser que malgré le fait que l’article 16-1-1 vient poser un cadre pour l’exposition de corps humain, il y a toujours un flou juridique, à savoir que les cadavres n’ont pas de statut clairement défini. Ils ne sont ni considérés comme des personnes ni comme des choses. Le flou juridique est donc toujours présent et amène à des interprétations différentes de la loi en fonction des affaires.

Les termes « respect, dignité et décence » de l’article 16-1-1, introduisent des devoirs pour les vivants vis-à-vis des morts. Ces notions marquent la façon avec laquelle doivent être traités les restes de personnes décédées. Avec la notion de respect, on envisage le corps post mortem comme la continuité du corps vivant, le respect est comme un devoir. Le législateur pali par cela aux risques de dérives de la part des familles sans accorder par ailleurs de personnalité juridique aux défunts.

Il est important de rappeler que dans cette affaire, la Cour de cassation est juge en droit et non en fait. Cela signifie qu’elle doit dire si les règles de droit ont été correctement appliquées, en fonction des faits qui ont été constatés et appréciés par les tribunaux ou les Cours d’appel.

Ici, la Cour d’appel avait interdit cette exposition sur le motif de la méconnaissance de l’origine et du consentement des défunts, donc sans base légale. La Cour de cassation, quant à elle, s’est de ce fait totalement détachée de cet argument, ce que nous verrons dans la prochaine sous-partie. 

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