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Relations Du Sujet Body Art Avec Son Propre Corps

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Par   •  9 Juillet 2012  •  3 891 Mots (16 Pages)  •  1 319 Vues

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Brutalisés par eux-mêmes, les artistes du body art répètent sans cesse les figures de la castration, de l’auto-mutilation, de l’identité sexuelle, de la disparition du jeu social… Tout un jeu de symbolisation est mis en place afin de libérer les pulsions (autodestructrices, sexuelles, masochistes, agressives…) et, finalement, pour changer le monde après avoir préconisé sa contribution. Changer le monde, au péril de sa vie tel est ce que font les artistes du body art. Mais en ont-ils conscience ? Torturés par une panoplie d’instruments tranchants, coupants, ces artistes nous font penser aux figures des martyrs qui, malheureusement ne suppriment le danger. Lors des performances, le corps malmené nous apparaît en souffrance. Souffrance réelle ou imaginaire ? Si nous formulons l’hypothèse d’une souffrance, cela signifierait que l’artiste gérerait cette dernière devant son public par un contrôle, une toute puissance sur ce corps, son corps. Mais quelles sont les limites à cette toute puissance ?

Dans cette pratique, il ne semble plus y avoir de limite. Limites abolies en affichant un masochiste certain de part un corps mutilé, transformé, décomposé et recomposé à l’extrême. « La jouissance du masochiste atteint le degré maximum d’horreur quand le châtiment corporel appliqué à la surface de la peau (fessée, flagellation, piqûres) est poussé au point où des morceaux de peau sont déchirés, troués, arraché » .

Puis, en plus d’être souillé, le corps nécessite d’être vu, regardé, photographié ou filmé afin de se sentir exister. « Je n’ai jamais fait une œuvre (dessin, photo, sculpture, vidéo, performance) sans la penser comme un corps qui chercherait d’autres corps pour exister » .

Afficher le sacré, soit le corps même, mais en le profanant. Profaner ce qui apparaît sacré est l’un des enjeux de l’art corporel. Ainsi, après avoir vécu un contact intime avec le sacré, le corps se désacralise peu à peu devant ce spectacle de l’horreur. Exister en manipulant le corps, en tentant de construire sa propre image ; le travail de l’artiste nous apparaît ainsi comme une oeuvre spéculaire. Œuvre spéculaire qui va prendre naissance par une mise en scène de soi.

Du corps symptôme au corps sublimé

Mise en scène du corps de l’artiste qui passe par une certaine théâtralisation. Théâtralisation spectaculaire, de part les actions accomplies qui nous coupent le souffle et nous font rentrer dans un monde de l’abject, de l’horreur, voire de l’effroi. Jean Duvignaud parle de « théâtralisation spontanée ». Cette théâtralisation peut, dans certains cas, notamment lors des suspensions, amener l’individu dans un état de transe . Etat de conscience altéré, comme le dira Fakir Musafar, que l’on peut rapprocher de cet état de transe.

A ce propos, Louis Vincent Thomas, commentera la transe comme un discours du corps et citera dans l’un de ses ouvrages, l’exemple d’une initiée d’origine éthiopienne, dont M. Leiris a observé que « dans l’existence quotidienne, elle semble disposer d’une sorte de vestiaires de personnalités,… lui offrant des comportements et des attitudes toutes faites, à mi-chemin de la vie et du théâtre » . L’artiste va donc se saisir du corps comme support, comme objet et encore comme surface de transformation et de « création ». Mais y a t’il des limites à ce travail de « création » ? La création ne peut-elle pas devenir, à force de transformation, remaniement, source de défiguration ? Défiguration, dans le sens où, les différentes œuvres des artistes consistent en une déformation radicale de leur propre image corporelle.

Déformation, désarticulation et déconstruction semblent être liées dans un même continuum. Continuum, qui paraît avoir eu pour principe d’opérer à un changement profond du corps afin de bâtir l’œuvre de l’artiste. « Nous arriverons bien à dégoûter tout le monde » comme disait Picasso. Dégoûter et provoquer de l’angoisse chez le spectateur tel est ce que parait faire l’artiste body art en mettant à jour son corps, son œuvre. Pour construire l’œuvre, il n’y a plus de barrière, l’artiste se donne tous les droits. De ce fait, il inflige à son corps une bataille ; bataille entre le fait de lui faire supporter la douleur, la souffrance, et le fait de devoir lui faire accepter les tortures, la violence sinon se sera la mort pour ce corps et de ce fait pour l’artiste.

Victimes d’eux-mêmes, les artistes mettent à jour leurs désirs, leurs fantasmes.

Nous nous souvenons du Saut dans le vide d’Yves Klein, qui, en accomplissant son action, mime un véritable envol en se lançant du haut d’un mur. Ce dernier, avait pour idée de réaliser le rêve icarien, à savoir vaincre la pesanteur, celle du corps. Klein, fantasme du paradis, de l’infini ; ses différentes actions sont souvent réalisées grâce à la peinture bleue et, ont pour but de dépasser les limites de l’individuation, de la peau, du corps et de son poids afin de devenir « un citoyen de l’infini » . Nous pouvons citer également Orlan, dont le fantasme, proche du baroque, se trouve être celui d’un mariage avec Dieu. En effet, sa mise en scène au Grand Palais montre Sainte Orlan ; cette dernière érigée sous la figure de la vierge, de la sainte, est photographiée, drapée telle une parodie de Sainte Thérèse de Lisieux.

Passage à l’acte « artistique » pour se « re-construire »

Pour réaliser tous ou une grande majorité de leurs fantasmes, les artistes n’hésitent pas à appliquer au corps « les mêmes traitements qu’aux vêtements. Tout se passant comme si leur démarche consistait dans la transformation de leur propre corps en un corps étranger » . Les artistes, en livrant leurs fantasmes au travers leur propre corps, tentent d’explorer les confins de l’irrationnel par l’idée d’un corps signifiant. A ce moment, le sujet donne corps au mort, au manque à travers son propre corps. Le corps est alors exposé comme objet fétiche. Paradoxalement, ce corps dénié, refusé qui est mutilé, « désossé » doit être mis à jour et vu par tous.

Mise à jour par l’exposition des transformations opérées sur ce dernier. Ce travail de reconstruction passe alors par une reconnaissance de soi. Reconnaissance plus grande, de part le fait que, la transformation, l’opération, a lieu en public.

Ce qui impliquerait pour l’artiste une réappropriation de son corps qu’il reconnaîtrait d’autant plus à ce moment comme partie intégrante de son moi. Etre reconnu par soi et par le public devient alors « narcissisant » pour l’artiste. Narcissisme

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