LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Le suffrage et le système électoral

Cours : Le suffrage et le système électoral. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  28 Février 2016  •  Cours  •  10 099 Mots (41 Pages)  •  763 Vues

Page 1 sur 41

CHAPITRE 4

LE SUFFRAGE ET LE SYSTEME ELECTORAL

Démocratie et représentation - En démocratie, le pouvoir souverain  (kratos) appartient au peuple (demos). Cela suppose, comme à Athènes au Vè siècele av. J-C, que les membres de la cité, appelés pour cette raison "citoyens", se prononcent sur les affaires collectives. Dans la conception antique, la démocratie est toujours "pure" ou "directe" : les citoyens décident sans intermédiaires au moyen de leur vote ou suffrage. Mais l'ajout des adjectifs "pure" et "directe" révèle déjà qu'une telle conception a été abandonnée ou, à tout le moins, marginalisée. L'exemple d'Athènes suffit à rendre compte de l'impasse dans laquelle nous sommes depuis deux siècles, c'est à dire depuis que les peuples ont partout été déclarés souverains : les communautés politiques ne sont plus des cités antiques de taille réduite, rassemblant quelques milliers ou quelques dizaines de milliers de citoyens, ce sont des Etats immenses qui comptent des millions d'habitants. J-J Rousseau, l'abbé Sieyes et Benjamin Constant en faisaient déjà le constat : il est devenu impossible de réunir l'ensemble du peuple sur la place publique (agora). C'est pourquoi le gouvernement représentatif s'est imposé partout : dans des Etats vastes et populeux, le souverain n'exerce pas directement son pouvoir confie à des représentants.

Election des représentants et référendum - Cependant pour sauver le principe démocratique, le peuple conserve son pouvoir originaire, ainsi qu'en dispose l'article 3 de la Constitution et le délègue temporairement par le biais d'élections périodiques. Le danger vient de la liberté accordée au représentant dans l'intervalle qui sépare deux élections : dès lors que le mandat des députés cesse d'être impératif, dès lors qu'ils n'ont pas à obtenir l'accord de leurs comettants pour opiner, tous les remèdes se révèlent illusoires. En conséquence, afin de conjurer le sort, les citoyens sont parfois associés à l'exercice du pouvoir par des procédés de démocratie directe ou semi-directe : le référendum en est la technique la plus connue. A cette occasion, les citoyens s'expriment par leurs suffrages en dehors des élections : ils sont appelés à voter par "oui" ou non", ils ne désignent pas de représentants. Le suffrage est synonyme de vote, or le vote porte indifférement sur une matière ou sur une personne, là où l'élection, dans son acceptation actuelle, est toujours celle d'un candidat à une fonction publique.

Section I : L'extension du suffrage

Suffrage censitaire et suffrage capacitaire - De la fin du XVIIIè siècle jusqu'au milieu du XXè siècle, la question politique brûlante était la suivante : qui a le droit de suffrage ? Autrement dit : quelle est la composition du corps électoral ? Longtemps, en France comme ailleurs, le suffrage censitaire est fondé sur un critère économique et fiscal (il n'accorde le droit de vote qu'aux citoyens les plus imposés, ceux dont la contribution dépasse le cens), tandis que le suffrage capacitaire dépend d'un critère intellectuel et professionnel (seuls ont le droit de vote les citoyens les plus capables ou éclairés, titulaires d'un diplôme ou exerçant une profession socialement valorisée). Les deux types de restriction n'étaient pas exclusifs l'un de l'autre et visaient à exclure une frange de la population jugée incapable d'émettre une opinion saine sur la direction des affaires publiques - partant, le suffrage était réservé à une oligarchie. Avant de condamner sans nuance le suffrage censitaire et capacitaire, il convient de prêter attention à deux séries de considérations. D'une part, le suffrage universel n'est jamais tel qu'il corresponde exactement à la population : sans même évoquer le droit de vote des étrangers, relancé en France par le président Hollande en 2014, quel est l'âge requis pour participer à la vie civique, quelles incapacités civiles ou quelles peines infamantes privent-elles du droit de vote ? C'est d'ailleurs pour ce motif qu'il ne faut pas confondre le peuple et les électeurs : y compris lors d'un référendum, ce sont les électeurs qui se prononcent. D'autre part, les effets du suffrage censitaire et capacitaire sont plus ou moins radicaux et la proportion des exclus varie fortement. Au début de la Révolution Française, on distinguait les citoyens actifs et les citoyens passifs, doux euphémisme camouflant le suffrage censitaire : tous étaient citoyens mais seuls ceux acquittant une imposition supérieure au cens avaient le droit de voter. Mais le cens n'était pas très élevé, de sorte qu'on comptait plus de 4 millions  de citoyens actifs, soit près de 60% de la population masculine adulte. Les restrictions au suffrage furent autrement plus sévères sous la Restauration et la Monarchie de Juillet : il y avait moins de 100 000 électeurs entre 1815 et 1830, à peu près 250 000 en 1848, soit 3% des adultes du sexe masculin.

Proclamation du suffrage universel - Par réaction, le suffrage fut déclaré universel par la Constitution de la IIè République en 1848 (article 25), au lendemain de la révolution de février qui avait provoqué la chute de Louis-Philippe et de la Monarchie de Juillet. Il s'agissait d'un retour aux sources et de la critallisation d'une tradition républicaine, puisque la Constitution montagnarde de 1793 avait, quelques mois après la proclamation de la République en septembre 1792, également accordé le droit de vote à tous les citoyens (article 4). Le suffrage universel triomphe définitivement avec la IIIè République (article 1er de la loi constitutionnelle du 25 février 1875). Encore faut-il préciser qu'on entend par là le suffrage universel masculin : longtemps, le droit de vote a été refusé aux femmes au nom d'arguments physiologiques (leur faiblesse, leur humeur changeante) ou politiques (les partisans de la république craignaient qu'elles ne fussent sous la coupe des curés). En France, il faudra attendre la fin de la WWII pour que les femmes soient autorisées à voter : l'ordonnance du 21 avril 1944 est confirmée par l'ordonnance du GPRF en date du 5 octobre 1944. Les femmes participeront aux élections municipales organisées au printemps de 1945 et au scrutin national du 21 octobre 1945 qui mettra fin à la IIIè République. Du point de vue de l'égalité électorale entre les sexes, la France avait pris un retard considérable sur les autres pays occidentaux : les dominions britanniques s'étaient montrés pionniers bien avant la WWI (Nouvelle-Zélande en 1893, Australie en 1902), la plupart de nos voisins ayant attendu la fin de la guerre (Royaume-Uni en 1918, USA en 1920).

...

Télécharger au format  txt (63.8 Kb)   pdf (485.8 Kb)   docx (30.6 Kb)  
Voir 40 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com