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La spécificité du droit administratif

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Par   •  10 Octobre 2015  •  Dissertation  •  1 905 Mots (8 Pages)  •  7 001 Vues

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Dissertation :

Selon Weil, le droit administratif est un « miracle ». En effet, c’est une nouveauté extraordinaire que l’Etat accepte d’être lié et jugé par le droit. Le droit administratif désigne l’ensemble des règles applicables aux activités administratives. La définition même d’une autorité administrative est donnée quant à elle par l’article premier de la loi du 12 avril 2000. Ainsi, une autorité administrative peut être une administration de l’Etat, une collectivité territoriale, un établissement public ou encore un organisme chargé d’un service public.

En étant soumis au contrôle juridictionnel, l’Etat se retrouve en quelque sorte limité par le droit. En France, il existe 42 tribunaux administratifs, 8 cours administratives d’appel, ainsi que le Conseil d’Etat, chargés chaque jour de régler les litiges entre administration et personnes privées. Le droit administratif est fondamentalement prétorien, à caractère jurisprudentiel, et est considéré comme le Common Law français. Toutefois, cette acceptation du droit par l’Etat français comme instance de contrôle de lui-même n’est pas universelle, et diffère encore selon les pays. Effectivement, certains sont encore dotés de « cette répugnance de toute souveraineté à admettre un jugement autre que le sien. » Dans l’Union Européenne, seulement 15 pays ont instauré une autorité administrative totalement indépendante de celle judiciaire.

Il est intéressant d’étudier l’existence du droit administratif dans un contexte où, Paris, capitale de la France, est considérée comme la ville mère du contentieux administratif. En effet, ces dernières années, nous avons assisté à une forte croissance de ce dernier. En dix ans, le nombre d’affaires portées devant les tribunaux administratifs s’est élevé de 96%, ainsi que de 164% devant les cours administratives d’appel.

Dans quelles mesures le droit administratif s’est-il imposé comme un droit original et autonome ? Afin de répondre à cette question, notre développement s’ordonnera autour de deux idées principales. D’une part, le droit administratif est un droit prétorien devenu au fil du temps autonome. D’autre part, le droit administratif est un droit conditionnant l’existence d’un Etat de droit.

  1. Le droit administratif, un droit prétorien devenu autonome.

Le droit administratif a beaucoup évolué dans le temps et est adaptatif aux évolutions de la société.

  1. La naissance du droit administratif par l’émergence du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires.

Dès 1641 et l’Edit de Saint Germain, les règles concernant le fonctionnement de l’Etat sont adoptées par le pouvoir royal, et tous les litiges sont tranchés par le pouvoir royal lui-même. Il n’y a alors plus de distinction entre gouverner et juger. Il faut attendre 1789 pour qu’émerge une organisation juridique de l’administration et se mette en place un régime de fonction publique.  De plus en plus apparaît l’idée de transposée la théorie de Montesquieu, en droit. La nécessité de séparer les autorités administratives et judiciaires se fait de plus en plus présente, en créant une dualité des juridictions : droit privé et droit public. C’est la loi des 16 et 24 aout 1790 qui traduit sur le plan juridictionnel le principe de séparation. En 1799 nait le Conseil d’Etat, juge indépendant de l’administration. Ces deux lois font alors officiellement du conseil d'Etat un juge souverain chargé de statué au nom du peuple français et non plus seulement d'une consultation au nom du gouvernement en place. Cette autonomie est un événement important qui va permettre de reconnaitre l'existence d'une justice déléguée et autonome. Le Tribunal des Conflits est réaffirmé également, et a vocation à trancher les litiges de répartition des compétences. Cette séparation est rappelée par un décret du 16 fructidor An III, « défense itérative » de se mêler des actes d’administration. En un siècle, la France va donc se doter d'un juge administratif et elle est le premier pays à reconnaitre l'existence d'un organe spécifique juridictionnel chargé de régler les litiges des administrations et des administrés.

L’arrêt fondateur de cette séparation entre autorité judiciaire et administrative est l’arrêt Blanco du Tribunal des Conflits de 1873 : L’Etat est jugé pour la première fois explicitement  responsable, le dommage mettant en cause un service public. Le conflit ne peut donc être réglé par le code civil. C’est donc un conflit entre une personne publique et une personne privée, qui ne peut être réglé que par des règles spéciales. L’arrêt nous précise ainsi que « l’autorité administrative est seule compétente ». Seul le juge administratif peut réformer les décisions de personne publique, et l’obliger à verser une indemnité. L’arrêt BLANCO marque la reconnaissance de l'inapplicabilité des articles du code civil en matière de responsabilité des activités publiques prises en charge par l'Etat.

L'organe administratif va ensuite s'autonomiser de plus en plus du droit privé, en trouvant qu'il est nécessaire d'avoir lui même des règles applicables au domaine public. Aidé par les législateurs, ces règles sont créées progressivement. On établit un régime juridique spécifique à ces personnes publiques, qui diffèrent de celles privées. Ce sont donc les juges eux-mêmes, du Conseil d'Etat, qui vont progressivement élaborer les règles, au grès de leur jurisprudence. Dès qu'ils devront trancher un litige, ils devront trouver une solution de droit, et en fonderont un principe juridique. Le droit administratif est donc un droit prétorien, à caractère jurisprudentiel.

  1. Un droit fondé autour de la notion de service public.

Le service public constitue le moyen de traduire en droit la nécessité d'organiser et de prendre en charge dans toute société la cohésion sociale. Sans solidarité sociale, il n'y a plus de société. Le service public permet donc de maintenir cette cohésion et va se définir comme une activité prise en charge par une personne publique ou privée, sous le contrôle d'une personne publique, pour assurer la poursuite de l'intérêt général. L'objectif est de veiller à ce qu'il existe un certain nombre d'activités susceptibles de répondre à un besoin de la population (cantine, école, santé publique, prise en charge des malades...). Celui-ci, lorsqu’il est en cause dans un litige, remplit une fonction de justification de la compétence du juge administratif. L’arrêt Astruc du 7 avril 1916 en donne également une définition : « Le service public est un procédé juridique par lequel satisfaction est donnée par l’Administration à un besoin d’intérêt général. »

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