La Vème République est-elle un régime de rupture ?
Dissertation : La Vème République est-elle un régime de rupture ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Thibault Leveque Espel • 15 Février 2016 • Dissertation • 3 341 Mots (14 Pages) • 1 046 Vues
La Vème République est-elle un régime de rupture ?
La IVème république est une république marquée par une instabilité gouvernementale chronique. Ainsi d’octobre 1946 à mai 1958, en moins de douze ans, vingt et un gouvernements se sont succédés, avec une durée moyenne pour chaque gouvernement de six mois. Cette instabilité peut s’expliquer par une mauvaise adaptation des institutions qui, malgré des tentatives de rationalisation, sont devenues défaillantes et ont été perverties par de mauvaises mœurs politiques. A la fin de cette république, la principale critique adressée à ce régime concerne l’omnipotence du parlement, qui se traduit par une insuffisance des moyens d’action de l’exécutif. La toute puissance du parlement, avec l’absence de majorité parlementaire véritable, sont les deux éléments constitutifs de l’instabilité gouvernementale. La IVème république s’éteint en 1958, confrontée à ses insuffisances et au problème de l’Algérie. Le retour du général de Gaulle cette même année marque le début d’un nouveau régime, insaturé par une nouvelle Constitution. En effet, si De Gaulle a accepté de revenir au pouvoir, ce n’est pas pour gouverner dans le cadre des institutions de la IVème mais pour les améliorer conformément à l’idée développée lors de son discours de Bayeux de 1946.
Quel régime instaure la constitution de 1958, et quelles sont ses particularités ?
Nous verrons tout d’abord dans une première partie que la Constitution de 1958 instaure un régime transitoire entre la tradition parlementaire française et la nécessité de rénovation, notamment grâce à la loi constitutionnelle du 3 juin 1958. Néanmoin, nous verrons que la Constitution traduit également une tentative de rénovation voire d’établissement d’un régime parlementaire de type nouveau.
Dans une première partie, nous allons dont étudier la constitution de 1958 : une transition efficace entre tradition et innovation assurée par la loi constitutionnelle du 3 Juin 1958.
Par la loi constitutionnelle du 3 Juin 1958, De Gaulle se voit confié le pouvoir constituant par délégation du parlement. Mais contrairement au précédent du 10 Juillet 1940, date à laquelle Pétain s’est vu confié les pleins pouvoirs, la rédaction de la constitution est limitée par des conditions de formes que nous allons voir dans un première sous-partie et des conditions de fond que nous allons voir dans une seconde sous-partie. Ces conditions permettent au parlement de conserver un certain contrôle sur le pouvoir constituant et d’assurer une certaine continuité dans la tradition parlementaire française, tout en y ajoutant les volontés du général De Gaulle.
D'abord, étudions les conditions de forme.
De Gaulle veut changer les institutions, néanmoins la constitution de 1946 reste en vigueur. Le changement de constitution aurait donc du s’accomplir selon les formes prévues par l’art 90 de cette constitution. Selon cet article, le projet de révision devait être adopté par le parlement. Or les gaullistes veulent rééquilibrer les institutions au profit de l’exécutif et donc diminuer le rôle du parlement, qui n’aurait accepté que difficilement de renoncer à ses prérogatives. Ainsi, pour parvenir à ses fins, De Gaulle doit faire réviser la procédure de révision elle-même pour que celle-ci ne soit plus dépendante du parlement et permettre alors au gouvernement de préparer librement son projet. Cela aboutit à la loi constitutionnelle adoptée par le parlement le 3 juin 1958 qui modifie les règles d’exercice du pouvoir constituant, c’est-à-dire la procédure de révision de la constitution de 1946. Néanmoins la commission de De Gaulle ne dispose pas du pouvoir constituant de manière illimitée, lui permettant de rédiger la constitution de son choix. Dans un soucis de légitimité démocratique et afin de calmer les tensions, le pouvoir constituant est soumis à des conditions très précises, assurant la continuité de la tradition parlementaire française par le parlement lui-même.
En effet, cette loi impose à la Constitution future des conditions de forme et de fond.
Tout d’abord la loi du 3 juin 1958 précise que « la Constitution sera révisée par le gouvernement investi le 1er juin 1958 » . L’exercice du pouvoir constituant et le respect des conditions précisées par la loi ne sont propres qu’au gouvernement de De Gaulle, si un autre gouvernement le remplaçait, il ne disposerait pas des mêmes conditions d’exercice du pouvoir constituant. Cela permet au parlement de limiter la portée de sa loi constitutionnelle et de garder un certain contrôle sur l’exercice du pouvoir constituant, puisqu’il connait les projets de De Gaulle. D’autre part, l’avant projet élaboré par le gouvernement devra être soumis pour avis à un comité parlementaire constitutionnel.
C’est un organe spécifique composé de membres du parlement désignés pour un tiers par l’Assemblée Nationale, pour un tiers par le Conseil de la République et le dernier tiers est désigné par le gouvernement. Par ce biais les assemblées espèrent faire entendre leur voix et sauvegarder leurs intérêts. Elles gardent un contrôle sur l’avant projet et contrôlent le respect de leurs prérogatives. Cela permet aux assemblées d’obtenir des réponses aux questions précises qu’elles se posent et d’ainsi contrôler le contenu de la future constitution. Cette commission était présidée par Paul Reynaud.
Mais le rôle de cette commission est relativement limité puisqu’elle ne dispose que d’un pouvoir consultatif, et non pas contraignant, laissant au général De Gaulle une certaine liberté de la rédaction de la constitution.
Une fois préparé dans ces conditions, le projet doit être présenté pour avis au conseil d’état. Puis il est arrêté en conseil des ministres et soumis à un référendum de décision. Toutes ces conditions visent à assurer la conformité de la constitution avec les demandes de l’ensemble des acteurs de la Nation, le respect de la démocratie pour le peuple, le respect du parlementarisme pour les assemblées, et le respect de la tradition pour le Conseil d’Etat. La ratification du projet par référendum est l’étape la plus importante du processus d’élaboration de l’avant projet, car elle constitue une véritable garantie démocratique pour la Constitution. Il s’agissait également pour De gaulle de rompre radicalement avec le précédent du 10 juillet 1940, lorsque Pétain s’était vu accorder les pleins pouvoirs.
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