Droit de l'Union Européenne
Commentaire d'arrêt : Droit de l'Union Européenne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Izabella Grigoryan • 20 Décembre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 964 Mots (12 Pages) • 1 514 Vues
[pic 1]q
Travaux dirigés : Droit de l'Union européen
Licence 3, droit
Etudiante (étrangère) : Grigoryan Zabela
Commentaire d'arret :
Åklagaren contre Hans Åkerberg Fransson,
CJUE C-617-10, 26.02.2017
Dans son arrêt Åklagaren contre Hans Åkerberg Fransson en date du 26 février 2017 la Cour de la Justice de l'Union Européenne vient préciser l’application du principe « ne bis in idem » selon lequel personne ne peut être poursuivi ou puni pénalement deux fois pour la même infraction.
M. Åkerberg Fransson a été appelé à comparaître le 9 juin 2009 devant le tribunal local de Haparanda pour répondre du chef de fraude fiscale aggravée. Il était accusé d’avoir, dans ses déclarations fiscales pour les exercices 2004 et 2005, fourni des informations inexactes ayant exposé le Trésor public à la perte de recettes liées à la perception de l’impôt sur le revenu et de la taxe sur la valeur ajoutée. Par ailleurs, il était également poursuivi du chef de non-déclaration des cotisations patronales pour les périodes de référence du mois d’octobre 2004 et du mois d’octobre 2005, exposant les organismes sociaux à la perte de recettes. Selon l’acte d’accusation, les infractions étaient à considérer comme aggravées, d’une part, en raison de l’importance des montants en jeu et, d’autre part, du fait qu’elles s’inscrivaient dans le cadre d’une activité criminelle systématique de grande envergure.
Par décision du 24 mai 2007, le tribunal a prononcé à son encontre plusieurs sanctions fiscales. Cette décision a été motivée par les mêmes faits de fausses déclarations que ceux retenus par le ministère public dans la procédure pénale au principal. De plus, une autre procédure pénale a été intenté par le tribunal de la Suède contre M. Åkerberg Fransson pour les mêmes faits.
Finalement, le Tribunal saisi des poursuites pénales a décidé de surseoir à statuer dès lors qu’était soulevé le principe ne bis in idem et que les poursuites étaient fondées sur les mêmes faits que ceux ayant conduit à des sanctions fiscales. Il pose ainsi cinq questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union Européenne.
Cette dernière devait donc s’interroger sur les points de savoir si d’une part, le fait que le droit suédois subordonne la mise à l’écart du droit national incompatible avec le principe ne bis in idem, protégé à la fois par la CEDH et par la Charte de l’UE, à un indice clair issu de la charte ou de la jurisprudence de la CJUE était compatible avec la primauté et l’effet direct du droit de l’Union.
D’autre part, elle devait s’interroger sur le point de savoir si des poursuites pénales pouvaient tomber sous le coup du principe ne bis in idem dès lors que pour les mêmes faits le prévenu avait déjà fait l’objet de sanctions fiscales dans une procédure administrative antérieure.
Ensuite, il lui était demandé de déterminer si le fait que le juge de droit commun devait tenir compte de la sanction fiscale déjà prononcée pour la détermination du quantum de la sanction pénale avait une incidence sur la mise en œuvre du principe ne bis in idem.
Par ailleurs, il était demandé à la Cour si un nouvel examen indépendant des faits dans la dernière procédure pouvait permettre à la juridiction de prononcer une peine sans qu’elle entre en contradiction avec le principe ne bis in idem, dans le cas où elle considérerait que la condamnation à des sanctions fiscales antérieures empêchait le prononcé d’une sanction pénale pour des faits identiques objet de la poursuite.
Et enfin, le juge suédois interrogeait la Cour sur le point de savoir s’il était contraire au principe ne bis in idem, dans le cas où le droit actuel n’y était pas conforme, de maintenir le système de double sanction en transférant la compétence pour prononcer à un même juge de sorte que l’individu ne ferait l’objet que d’une poursuite unique.
A ces questions la Cour de Justice répond par deux réponses. Elle considère en premier lieu que « le principe ne bis in idem énoncé à l’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’oppose pas à ce qu’un État membre impose, pour les mêmes faits de non-respect d’obligations déclaratives dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, successivement une sanction fiscale et une sanction pénale dans la mesure où la première sanction ne revêt pas un caractère pénal, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier ». En d’autres termes elle précise qu’un même fait peut donner lieu à plusieurs poursuites dès lors que les sanctions qui en découlent ne soient pas que des sanctions pénales autrement ce serait contraire au principe ne bis in idem.
En second lieu elle précise que « le droit de l’Union ne régit pas les rapports entre la CEDH, et les ordres juridiques des États membres et ne détermine pas non plus les conséquences à tirer par un juge national en cas de conflit entre les droits garantis par cette convention et une règle de droit national.
Le droit de l’Union s’oppose à une pratique judiciaire qui subordonne l’obligation pour le juge national de laisser inappliquée toute disposition contraire à un droit fondamental garanti par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la condition que ladite contrariété ressorte clairement du texte de cette charte ou de la jurisprudence y afférente, dès lors qu’elle refuse au juge national le pouvoir d’apprécier pleinement, avec, le cas échéant, la coopération de la Cour de justice de l’Union européenne, la compatibilité de ladite disposition avec cette même charte. ». Ainsi, elle déclare non conforme au droit de l’Union les dispositions du droit suédois selon lesquelles la mise à l’écart du droit interne contraire au droit de l’Union doit être justifiée par un indice issu de la charte ou de la jurisprudence de la CJUE empêchant ainsi au juge d’exercer son contrôle de conventionnalité. Par ailleurs, elle refuse de se prononcer s’agissant de la marche à suivre pour les juges nationaux quant à l’application et l’articulation du droit régional de la CEDH avec le droit des états membres de l’UE.
Il convient toutefois, au-delà des questions de fond soulevées par le tribunal de Suède, de s’attarder sur la manière dont la Cour s’est déclarée compétente pour y répondre. En effet, c’est au moyen d’une extension des règles de sa compétence qu’elle a pu statuer dans cet arrêt, technique qu’il faut relever (I). Une fois sa compétence établie, elle a ainsi pu préciser le champ d’application du principe ne bis in idem (II).
I - Une extension significative de la compétence de la Cour.
En principe la Cour est compétente pour apprécier les législations nationales par rapport à la Charte dès lors qu’est mis en œuvre le droit de l’Union (A). Par cet arrêt la Cour précise le critère établissant sa compétence par une interprétation extensive de cette dernière (B).
...