Les Caractères, la Bruyère : Dans quelle mesure est-il possible d’envisager Les Caractères comme une œuvre théâtrale ?
Dissertation : Les Caractères, la Bruyère : Dans quelle mesure est-il possible d’envisager Les Caractères comme une œuvre théâtrale ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar tuzeueue • 11 Juin 2023 • Dissertation • 1 618 Mots (7 Pages) • 656 Vues
Sujet : Dans Les Caractères, la tradition théâtrale n’est pas loin ; et l’on pourrait
rapprocher l’œuvre de La Bruyère de celle de Molière. Dans quelle mesure est-il possible
d’envisager Les Caractères comme une œuvre théâtrale ?
Vous répondrez à cette question dans un développement structuré. Votre travail prendra
appui sur l’œuvre de La Bruyère, sur les textes et documents que vous avez étudiés en
classe dans le cadre du parcours associé à cette œuvre, et sur votre culture personnelle.
[Introduction]
Lorsqu’il rédige ses Caractères à la fin du règne de Louis XIV, La Bruyère observe très
attentivement les courtisans de Versailles pour mieux les peindre à travers une galerie de
portraits caustiques. Comme son contemporain, Molière, La Bruyère recourt à l’humour pour
critiquer les défauts de son temps. Ainsi, la tradition théâtrale n’est pas loin ; et l’on pourrait
rapprocher l’œuvre de La Bruyère de celle de Molière. En effet, La Bruyère emprunte beaucoup
d’éléments au théâtre quand il écrit Les Caractères. Dans quelle mesure est-il alors possible
d’envisager Les Caractères comme une œuvre théâtrale ? [Plan] Nous verrons d’abord que
l’œuvre de La Bruyère se construit comme un vaste éventail de saynètes vivantes qui rappellent
la tradition théâtrale [partie 1]. Puis, nous observerons que La Bruyère, comme Molière, suit la
devise de la comédie Castigat ridendo mores [partie 2]. Enfin, nous montrerons que la
dimension théâtrale des Caractères réside surtout dans la mise en scène par le moraliste de la
comédie du monde [partie 3].
[Développement] [Partie 1]
Tout d’abord, ce qui rapproche l’œuvre de La Bruyère de celle de Molière, c’est que Les
Caractères se construit comme un vaste éventail de saynètes vivantes qui rappellent la tradition
théâtrale.
[Sous-partie 1]
En effet, comme Molière dans ses comédies, La Bruyère recourt au registre comique pour
faire rire le lecteur. En dressant une galerie de portraits de personnages ridicules par leurs
comportements caricaturaux, La Bruyère entend divertir ses contemporains. Par exemple, dans
le Livre VIII, « De la Cour », il propose le tableau satirique d’un homme d’Église qui n’est pas
sans rappeler le Tartuffe de Molière : Théonas, abbé opportuniste dépourvu d’une foi sincère
profite de son statut ecclésiastique pour satisfaire ses ambitions sociales. En reprenant le type
farcesque du prêtre roué occupant sa fonction par devoir social et non par conviction religieuse,
La Bruyère met en scène un comique de situation voué à amuser le public. Un plaisir de
reconnaissance est ainsi créé à travers cette satire où les portraits rappellent aux lecteurs certains
comportements risibles de leurs contemporains.
[Sous-partie 2]
En outre, ce qui rapproche Les Caractères de la tradition théâtrale, c’est que La Bruyère
emprunte au genre dramatique de la farce en proposant au lecteur des portraits d’une vivacité si
intense qu’ils marquent le lecteur comme des saynètes. Par exemple, dans le Livre V, « De la
Société et de la Conversation », lorsque le moraliste décrit le comportement d’Arrias, il prend
soin de le peindre en mouvement : le rythme enjoué et saccadé des phrases ainsi que le recours
au discours direct donnent vie à ce caractère qui semble un personnage de farce, une marionnette
qui gesticule et s’agite sous le regard amusé d’un public de théâtre. De même, la description du
tapageur Théodecte propose le canevas d’une scène grotesque mettant en avant le vacarme de
ce Matamore : « J’entends Théodecte de l’antichambre ; il grossit sa voix à mesure qu’il
s’approche ; le voilà entré : il rit, il crie, il éclate ; on bouche ses oreilles, c’est un tonnerre. »
Ainsi, La Bruyère emprunte réellement au genre théâtral et notamment aux genres bouffons
capables de critiquer les défauts humains.
[Transition]
La Bruyère, comme de nombreux moralistes du XVIIe siècle, semble ainsi prendre à son
compte la devise antique de la comédie traditionnelle : Castigat ridendo mores (elle corrige les
mœurs par le rire).
[Partie 2]
Tout comme les comédies antiques et les farces médiévales, Les Caractères consiste en
effet, au-delà du divertissement comique, en une critique de la société.
[Sous-partie 1]
Bourgeois propulsé à la cour, La Bruyère a souffert du dédain des courtisans de Versailles.
Il se venge dans son œuvre en portant avec une ironie cruelle des jugements intraitables sur les
travers d’une société artificielle et corrompue. Parmi les dysfonctionnements de la Cour, La
Bruyère s’attaque plus spécifiquement à l’appât au gain des ambitieux. C’est
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