Le charlatanisme moderne
Commentaire de texte : Le charlatanisme moderne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Quentin Scavardo • 2 Mai 2019 • Commentaire de texte • 4 750 Mots (19 Pages) • 874 Vues
Le Charlatanisme moderne:
« Tout le monde est charlatan. Les écoles, les académies, les compagnies les plus graves ressemblent à l’apothicaire Arnoud ». Lorsque Voltaire écrit ces lignes en 1768, cela fait un siècle que le mot charlatan possède le sens figuré de « trompeur, manipulateur », tout en conservant son sens initial qui renvoie à une pratique non académique de la médecine. Qu’il soit faux médecin ou imposteur quelconque, le charlatan a partie liée avec la mise en scène de soi et l’usage d’une parole artificieuse. L’arracheur de dents ou le vendeur de drogues s’entourent de farceurs et de musiciens car l’empirisme médical est un spectacle.
Ce texte est un pamphlet, écrit sous forme de lettre qui sont initialement au nombre de 12 écrit à Camille Desmoulins. C’est une critique qui associe dans un même ensemble académiciens français, académiciens des sciences et jongleurs. Marat ne s’attaque pas au contenu de leurs théorie, mais à leur commune pratique despotique du pouvoir scientifique. Tous imposent leur langue à la sciences la rendant hermétique.
De Marat nous connaissons bien le destin politique et ses opinions jacobines ouvertement professées pendant la Révolution. En revanche, on sait moins qu’il fut un grand médecin, formé en Angleterre à St Andrews. En effet, il exerce d’abord la médecine et l’art vétérinaire dans les faubourgs de Londres dans les années 1760. Marat devient docteur et arrive dans la capitale française aux alentours de l’été 1776. Ce dernier attire rapidement l’attention d’une grande clientèle. Parmi ses patients, la marquise de l’Aubespine que Marat arrive à soigner alors le grand consultant Bouvart la considérait comme perdue. On dit de lui par la suite qu’il a « un coup d’oeil bien prompt ». Il va ensuite y avoir un glissement de médecin à savant. Il entreprend de nombreuses expérimentations. Il reste en revanche à l’écart des grands praticiens de la capitale. Ses recherches sur le feu, l’électricité et la Lumière, commencées en 1778, le conduisirent à faire des expériences en public devant le roi ou les académiciens en 1779 et à soumettre ses expériences d’optique et sa théorie du feu à l’Académie de Paris pour obtenir l’imprimatur. Le refus d’approbation semble venir de ces théorie newtonienne et son style qui semble manquer aux règles de civilité en vigueur dans la république des sciences. Ce refus marquera un point de plus à l’hostilité de Marat à l’égard de l’Académie.
Son destinataire est Camille Desmoulins qui est un avocat et journaliste de l’époque. Marat étant aussi journaliste écrivant l’Ami du Peuple, Desmoulins est aussi l’un de ces rivaux et Marat lui envoie souvent des lettre pour lui exprimer sa façon de penser.
Il faut savoir l'Académie royale des sciences fut fondée par Colbert en 1666. Dans le programme de l'absolutisme, le contrôle de la langue, du savoir, de l'histoire et du goût constituait une prérogative essentielle de l'Etat et une condition de son autorité. Le rôle des académies du Louvre était primordial dans ce dispositif. C'étaient elles, en effet, qui élaboraient les règles du bien dire, du bien sentir et du bien penser, et en assuraient les principes et la diffusion. Par leurs publications et leurs jugements, elles pouvaient imposer des normes, orienter l'opinion, faire les réputations et les carrières, elles exerçaient ainsi une véritable police sur la vie intellectuel et culturelle du Royaume. Pour les intellectuels et les savants, cette tutelle représentait aussi une protection. Ces lettre ont vraisemblablement été conçue entre 1783 et 1785 : l'étude des personnages vivants cités (dont Pilâtre de Rozier, mort en 1785) en fournit une preuve quasi certaine. Autre élément de datation : la première lettre s'achève par un paragraphe qui reconnaît que Mesmer et Cagliostro « sont presque oubliés ». Les rapports de la commission royale et de la société royale de médecine condamnant le mesmérisme sont publiés en 1784, et la grande campagne de dérision antimesmériste culmine la même année avec la pièce les docteurs modernes… jouée à la comédie italienne. Le 5 février 1785, quelle personne ne note : «magnétisme animal mort sous le ridicule. » la concordance des dates confirme que la conception des charlatans modernes s'inscrit très exactement dans le contexte du reflux mesmérien. Le titre même du pamphlet est sans doute inspiré de celui de la « comédie parade » qui triomphe alors à Paris.
Le pamphlet sur les charlatans modernes s'inscrit donc dans le contexte très compliqué de ces combats académiques des années 1780. Il n'est publié qu’en en 1791. La notice indique: «ces lettre n'étaient pas destinées à voir le jour ; et sans doute Elles seraient encore déposées au sein de l'amitié si la mort n'avait enlevé leurs auteurs. Quoiqu'écrites depuis quelques années elles n'en sont pas moins nouvelles. Le sort des sociétés littéraires, dans l'Assemblée nationale va s'occuper, ajoute encore à leur intérêt. » Marat a déjà publié une partie de ce texte profondément remaniée entre-temps en 1790, à l’occasion du débat du 14 août sur les dépenses occasionnées par nécessité littéraire. Il a indubitablement corrigé ce manuscrit ancien, sans doute pour l'adapter au contexte révolutionnaire. Encore assez rares avant la Révolution, les attaques contre les savants se multiplièrent après 1789. La Révolution marque l’effervescence d’un fort courant anti-académique. Les amateurs, les inventeurs, les artistes se plaignent vigoureusement de la tyrannie des académies. Il dénoncera cela son journal L’ami du peuple, Les thèmes les plus constants dans l'œuvre de Marat journaliste ou pamphlétaire étaient un amour exclusif des masses populaires, dans lesquelles il voyait aussi bien les éléments les plus efficaces de la Révolution que ceux qui devaient en bénéficier le plus, la dénonciation constante des tendances des riches du tiers état à se réserver les profits des changements politiques et sociaux, les critiques contre les fausses idoles de l'opinion publique.
Ce texte pamphlétaire est écrit sous forme de lettre où Marat donne son opinion sur ces savants et académiciens, à Camille Desmoulins. Il fait d’abord une critique de ces « jongleurs » qui sont les premiers charlatans et parle d’un remplacement avec une nouvelle forme de charlatanisme. Il revient sur leur inutilité, leur faste et leur contradiction pour finir par s’en prendre
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