Fiche de lecture - Philippe Buc - Rituel politique et imaginaire politique
Fiche de lecture : Fiche de lecture - Philippe Buc - Rituel politique et imaginaire politique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Nepture • 11 Novembre 2017 • Fiche de lecture • 1 225 Mots (5 Pages) • 963 Vues
Philippe Buc est professeur spécialisé en histoire médiéval à l’université de Vienne. Il étudie la culture politique médiévale, et en aborde les facettes sociologiques et anthropologiques dans moultes de ses œuvres.
Nous étudions ici l’article intitulé « Rituel politique et imaginaire politique au haut Moyen-Âge » issu de la Revue historique n° 620. Cet article s’inscrit dans un débat historiographique sur la notion de l’analyse des rituels politiques médiévaux, analyse présente dans nombre de travaux d’historiens. En effet, l’auteur remet en question la façon dont les historiens analysent ces rituels politiques médiévaux. En se penchant sur des annales, chroniques et des livres historiques relatant des rituels médiévaux d’Europe occidental du IVème au XIème siècle, Philippe Buc réalise ainsi une prise de position méthodologique.
Dans son article, Philippe Buc manifeste son désaccord avec la manière dont les historiens effectuent l’analyse des rituels politiques. Outre le fait que l’expression de « rituel politique » semblent être le fruit de l’époque moderne, il considère aussi que l’analyse des rituels médiévaux possède deux risques majeurs pour les historiens.
La première correspond au fait que l’analyse des rituels véhiculerait des présupposés fonctionnalistes, c’est-à-dire qu’elle véhiculerait l’existence d’une corrélation entre changement sociologique et changement des faits sociaux : « Toute analyse de rituels dans leur dimension temporelle est, de plus, sujette à un risque que l’on qualifiera de « génétique ». » (page 844). Selon Philippe Buc, cette corrélation ne serait pas foncièrement vrai. En effet, certaines sociétés s’influençant, il y aurait alors l’existence de transmissions de certains rituels entre les sociétés. Ainsi, un changement sociologique ne s’accompagne pas forcément d’un changement de rituel, certains rituels peuvent demeurer.
De plus, au Moyen-Âge se déroule la christianisation du pouvoir, amenant des changements au niveau cérémoniel. Cela démontre le fait que les changements de pratique rituelle ne se font pas seulement en fonction d’un changement de structure sociale comme on pourrait le dire d’un point de vue fonctionnaliste, mais aussi par les changements des croyances des individus. L’idée du culturalisme apparaît donc clairement ici. L’analyse des rituels politiques devrait donc aussi s’attarder sur les croyances individuelles, un point de vue plus individualiste, en poussant la corrélation entre croyance et rituel, avant de prendre trop en compte les changements de pratique rituelle ayant évolué par des changements sociologiques.
Selon Philippe Buc, le second risque « tient à la nature des sources » (page 845). En effet, malgré le fait que l’historien se doit d’œuvrer pour réaliser une étude des plus objectives, la subjectivité est présente à toutes les échelles au niveau des sources, base de son étude.
D’un côté, à l’époque du Moyen-Âge, le christianisme veut en effet se donner un rôle fondateur dans les rituels, rôle qu’il ne possède pas forcément. La source première des rituels, à savoir leur provenance, serait alors controversée.
D’autre part, la forte utilisation des rituels pour justifier certains actes politiques au haut Moyen-Âge démontre l’utilisation de la religion à des fins politiques, d’où notamment l’expression « rituel politique » utilisé par l’auteur. Le roi et la religion était censé être du moins des rivaux indépendants en matière de pouvoir local, mais l’imitatio imperii atteste de l’envie du roi de se surélever par rapport à la religion, et de légitimer sa place grâce à celle-ci. Philippe Buc remet donc en cause l’analyse des rituels politique en raison de la subjectivité dû à l’instrumentalisation des rituels à des fins de propagande. Cette forme de propagande aurait notamment pour but une légitimation du pouvoir royal. De même, d’un autre côté, la religion peut aussi se servir qui du pouvoir royal qu’il mêle à des rituels liturgiques pour se donner de l’importance. Le véritable but des rituels serait donc plus ou moins secret, empreint d’arrière-pensées. Cela amène Philippe Buc à remettre en question l’expression rituel « royal » ou « monarchique ». En effet, le rituel implique une autorité ajoutée à une participation à l’autorité, c’est-à-dire deux pouvoirs, dont l’un participerait à la réalisation des volontés de l’autre : le pouvoir monarchique et religieux ne seraient alors pas placés sur le même piédestal dans le phénomène de rituel royal et l’expression serait ainsi remise en cause. De plus, vers le XIème-XIIème siècle a lieu des changements de structure sociale avec la fragmentation du pouvoir politique : celui-ci ne se cantonne plus seulement au roi, et s’étend sur une partie du reste de l’aristocratie. Les rituels deviennent alors des pratiques non seulement cantonnés au pouvoir royal, d’où la nécessité de protester contre l’expression « rituel royal ».
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