Les Zoos Humains au XXe siècle
Fiche de lecture : Les Zoos Humains au XXe siècle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Helen K • 17 Novembre 2018 • Fiche de lecture • 1 810 Mots (8 Pages) • 691 Vues
ANTHROPOLOGIE Helen Kouakoua
13/11/17
À la fin des années 1800, vont progressivement s'implanter dans le monde occidental une toute nouvelle forme d'attraction dans laquelle sont présentés non seulement des artefacts mais également un échantillon de divers peuples non-occidentaux de l'époque précédant l'avènement du cinéma.
Historiquement, l'exposition des «curiosités humaines» a été une composante essentielle des foires et des carnavals itinérants en Europe depuis le Moyen Age. Mais ce sont les progrès de la technologie et de la navigation qui vont permettre cette rencontre inédite entre les Européens avec différentes communautés humaines à travers le monde.
C'est ainsi que le peuple des «Esquimaux» va être présenté pour la première fois en 1501 en Angleterre, et entre 1550/1551 vont être exhibés devant la cour royale espagnole les indigènes amérindiens, ce qui va par ailleurs donner lieu à un débat politique et religieux (La Controverse de Valladolid). Ce sont toutefois les expositions ethnographiques de l'Afrique subsaharienne qui vont le plus fasciner les visiteurs européens.
D'abord sensé accueillir et réunir de nombreuses espèces animales venus d'Afrique, les expositions du Jardin d'Acclimatation de Paris vont rapidement prendre une tournure dramatique lorsqu'au mois d'août 1877, sont également présentés au parc des chasseurs indigènes capturés de force.
Les corps africains (morts et vivants) vont être exposés de manière à les déshumaniser, avec l'idée selon laquelle ils étaient distancés intellectuellement et moralement de tous les autres groupes humains et surtout européens. Ces absurdités prennent appui sur les représentations mêmes que les Européens se faisaient des Africains avant l'ère coloniale. Les premières cartes de l'Afrique ont par exemple été décorées d'images de demi-hommes à queue et même de créatures sauvages sans tête dénuées de toute âme/humanité.
Dans son ouvrage intitulé An Empire for the Masses : the French popular image of Africa William H. Schneider va démontrer l'ensemble du processus par lequel le racisme colonial va pénétrer la société occidentale. Théorisée au siècle précédent lorsqu'elle concernait exclusivement le domaine des sciences, en moins de cinquante ans, la vision d'un monde organisé selon la hiérarchie des races va rapidement devenir l'idéologie dominante en Occident. Son vecteur n'est pas tant la presse populaire ou la littérature que ce «contact» entre les peuples.
Les zoos humains, stigmates méconnus de la période coloniale vont servir d'appui à une pseudo-science particulièrement macabre à une periode où les scientifiques vont chercher des preuves physiques pour alimenter la théorie des races.
Les conséquences de ces expositions vont êtres telles qu'elles serviront de principales base de l'eugénisme, du fascisme ou encore du nazisme.
L'Histoire nous apprend que le gouvernement de la IIIe République instrumentalisera le succès de ces expositions ethnographiques afin de servir ses interêts politico-racistes. Ces manifestations vont ainsi jouer un rôle déterminant dans la formation d’une charge civilisatrice dans l'imaginaire occidental et plus particulièrement en France. En procédant à la hiérarchisation des races, la race blanche dite «supérieure» et civilisée se mesure ainsi à la prétendue barbarie des peuples indigènes considérés comme le degré zéro de la civilisation et du progrès technologique.
Nous nous interrogerons sur l'ambivalence des expositions ethnographiques entre lieu de réflexion (para) scientifique (I) et espace de divertissement (II).
I.Les expositions ethnographiques, vitrine d'une pseudo-science au service d'une idéologie raciste
A/ Construction et développement de la théorie des races
Lorsqu'en 1859 Charles Darwin publie L'Origine des espèces, ce dernier va sans doute déclencher sans le savoir un bouleversement sans précédent dans le milieu scientifique. Dans son ouvrage, Darwin applique l'idée évolutionniste de la sélection naturelle non seulement au développement animal, mais également au développement des espèces humaines. Il verra par exemple la sélection naturelle à l'œuvre dans le massacre des peuples aborigènes d'Australie.
Vers la fin des années 1800, une perspective raciste appelée «darwinisme social» va davantage développer les idées de Darwin en affirmant que certaines «races inférieures» étaient moins évoluées, moins humaines et plus semblables aux animaux que les «races» dites «supérieures».
La théorie évolutionniste moderne va principalement émerger dans le monde occidental, en particulier en Europe. Les Européens avec leurs architectures, leurs sciences et leurs inventions seront enclins à se considérer comme supérieurs aux autres nations du monde. Cette opinion va être énormément encouragée par l'avènement simultané de l'évolutionnisme darwinien et de son approche simpliste de l'idée de lutte entre les races, avec les plus forts survivants et contribuant ainsi au progrès de l'évolution.
B/Les zoos humains et la France coloniale
Des expositions ethnographiques vont être menées à des fins scientifique partout en Europe et notamment en France sous l'égide de la Société anthropologique de Paris.
Les scientifiques vont rapidement accourir vers ces zoos humains pour voir ceux qu’ils considèrent désormais comme des sauvages. Nubiens, Dahoméens, Amérindiens, Kalmouks de Sibérie et autres peuples non-occidentaux sont ainsi présentés dans une reproduction de leur «habitat naturel» évoquant leurs contrées, souvent dans des costumes primitifs et aux côtés de bêtes sauvages.
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