Farinelli un castrat italien

L'Italie est considérée comme l'un des berceaux de la civilisation occidentale et une superpuissance culturelle . Au cours de son histoire elle a été le point de départ de phénomènes d'impact international tels que par exemple l' Empire romain , l' Église catholique romaine , la Renaissance, le baroque , le néo-classicisme , le Risorgimento , le fascisme,etc  Nous allons nous intéresser à un des secteurs emblématiques de la culture italienne : la musique. L’Italie est le berceau de l’opéra, qui est né à la fin du XVIe s à Florence avec  Claudio Monteverdi, le premier grand compositeur d’opéra. Par la suite, l’opéra ne cesse de se développer et connaît son age d’or au siècle suivant, au XVIIIe siècle. C’est à cette même époque que la période des castrats nait et va marquer l’histoire de la musique par l’engouement qu’il a suscité et par sa diffusion partout en Europe, le XVIIIe est également l’age d’or des castrats italiens. Farinelli le castrat des Lumières comme le surnomme Patrick Barbier un historien d’histoire de la musique contemporain dans son ouvrage qui lui est dédié fur le plus illustre d’entre eux, il a dominé toutes les scènes d’opéra/de théâtre/de spectacle de son temps. Originaire du sud de l'Italie et éduqué à Naples, sa renommée due à sa voix exceptionnelle l'entraîna très vite à l'étranger.  En quoi consiste donc le « phénomène castrats » pour lequel L’Italie puis l’Europe s’emballe au XVIII ? Comment les castrats dont farinelli ont ils participé à diffuser la  culture italienne par la musique, à la facon d’un soft power dans différents pays d’Europe ? Quels ont été les enjeux de cet enjouement et que reste t-il aujourd’hui des castrats ? Ce sont les questions que nous allons aborder, je commencerai par présenter la Naissance du phénomène puis je traiterai de sa diffusion en Europe avant de parler de son essouflement au XIXE siècle et de sa postérité.

I) Naissance et origine du phénomène des castrats en Italie : Farinelli, un castrat exceptionnel

A) Apparition des castrats en Italie, une origine religieuse...

Un castrat est un chanteur (de sexe masculin) dont la voix n’a pas mué parce que ses glandes génitales ont été ‘castrées’, c’est-à-dire retirées par opération chirurgicale entre 7 à 12 ans. Il n’y a pas de développement de son appareil vocal contrairement au reste de son corps (qui atteint une taille adulte.). Les voix aiguës des castrats était très appréciée au XVIII lorsque le Bel Canto (en musique classique une technique de chant fondée sur la recherche du timbre) et le timbre de voix aïgu prédominent. On parlait de troisième voix en ce qui concerne celle des chanteurs castrats : ni une voix d’homme, ni de de femme : une voix intermédiaire qui pouvait rivaliser en puissance, technique et hauteur avec une petite trompette selon les historiens. La naissance des castrats intervient d’abord dans un cadre religieux, les enfants devaient interpréter les lignes aiguës des partitions religieuses ce qui conduisait certains à opter pour la castration. La castration des garçons dans le but de modifier leur voix existait déjà en Chine pendant la dynastie Zhou (11es av JC). Les castrats étaient aussi fréquemment utilisés dans la musique d'église byzantine , et cette pratique s'est répandue en Occident, en particulier dans le sud de l'Italie et en Sicile. Au XVIe siècle, l' Église catholique romaine condamne depuis longtemps la pratique de la castration et emploie ainsi des enfants et des faussets pour parties de soprano dans ses chœurs (les femmes étant interdites de se produire sur scène). Cependant, les castrats étaient couramment utilisés dans les chorales d'églises en Espagne et, en 1599, le Vatican avait commencé à autoriser les castrats dans la chorale papale. Cest par la suite que 3 siècles de castrats vont faire l'objet d'une véritable industrie, dont le 18e S marquera l'apogée. Naples sera une véritable capitale de castrats, elle a pu produire jusqu'à 3M enfants castrats par en an au 18e s. ( selon Max Emanuel Cencil) 

B) … et émergence d’une « industrie » qui est le reflet de la crise économique de l’époque

Les Castrats étaient généralement des italiens d'origine modeste, contrairement à Farinelli qui faut exception. La crise économique qui s'est propagée en Italie dans les années 1620, a poussé certains parents à payer pour faire opérer leur fils et leur assurer une vie meilleure  cette pratique reflète aussi la misère sociale en Italie du Sud à cette époque. Dans un premier temps, la carrière ecclésiastique serait considérée comme un soulagement financier pour les parents; plus tard, la perspective d'une carrière réussie et de revenus importants persuadait certains parents de conclure des contrats parfois douteux avec des enseignants ou des habitants aisés.  

Très peu ont atteint la renommée et la fortune que leurs parents ont poursuivies avec l'opération et aucun n'a égalé le grand Farinelli. Les castrats étaient les enfants des familles les plus pauvres. La possibilité que le garçon, après la castration, devienne un chanteur de grande renommée et fortune, comme ce fut le cas avec les grands professeurs, était très tentante. Cependant, dans la plupart des cas, l'opération était inutile, car tout le monde n'avait pas des compétences de chant exceptionnelles, et les risques de l’intervention réalisée sans la moindre garantie représentaient un taux taux de mortalité allant jusqu’a 80 %.  Au XVIIe siècle, les chœurs et les conservatoires se sont répandus dans toute l'Italie, cependant on estime que seulement 10 à 15% de ces enfants ont pu gagner leur vie avec leur voix et que seulement 1% sont devenus célèbres. Les milliers d'enfants était à bien des égards lié à l'institution où ils étudiaient et à leur professeur, un groupe de professeurs de chant a émergé - Pistocchi, Farinelli, Bernacchi, Senecino, etc., à qui on attribué la perfection de leur art. Certains d'entre eux ont même créé des écoles par lesquelles passaient de nombreux autres noms célèbres. Les maitres napolitains étaient les plus prestigieux d'entre eux: ils enseignaient le contrepoint, la littérature et le chant, en particulier les techniques de respiration et d'ornementation. Avant 1750, seuls quelques chanteurs particulièrement talentueux étaient autorisés à quitter la chapelle pour la saison d'opéra. Et ce n'est que dans le dernier tiers du XVIIIe siècle que les parties de castrat se développent réellement sur les scènes lyriques internationales.

C) Farinelli : un castrat d’exception, éducation d’un prodige

Les castrats qui réussissaient étaient bien rémunérés, recevaient des cadeaux coûteux de la part des dirigeants et des nobles, se mêlaient librement aux classes supérieures et pourraient devenir célèbres dans toute l'Italie et l'Europe. Ce fut le cas de Carlo Broschi, surnommé Farinelli, il est un castrat né dans la ville d'Andria (province de Bari, alors intégrée au Royaume de Naples) en 1705 et mort à Bologne en 1782. Le jeune Carlo est issu d'une famille noble. Salvatore Broschi, son père, passionné par la musique décide de faire de ses deux fils des artistes ; l'aîné, Riccardo, comme compositeur, et le cadet, Carlo, comme chanteur. On peut donc penser que c'est lui qui prit la décision de faire subir à son plus jeune fils la castration qui devait lui permettre de conserver sa voix de soprano, qui était déjà exceptionnelle, mais selon d'autres sources il semblerait que cette castration soit postérieure au décès de Salvatore Broschi.Carlo suivit dès lors à Naples au Conservatoire dei Poveri di Gesù Cristo une formation dispensée par Nicola Porpora, le maître des grands castrats à Naples, qui développa chez son élève une prodigieuse voix de soprano. Précoce et virtuose, le jeune artiste débuta à l'âge de quinze ans, en 1720, lors d'une soirée donnée à Naples en l'honneur de l'empereur d'Autriche. Il y obtint le plus vif succès et y fit la connaissance de Pietro Metastasio, auteur débutant de sept ans son aîné, et qui allait devenir l'un des plus grands librettistes (auteur d’un livret d’opéras) de l'opéra seria ainsi que le poète officiel de la cour de Vienne, avec qui il a entretenu une correspondance tout le long de sa vie.  Farinelli était réputé pour pour l'étendue prodigieuse de sa voix (s'étendant du registre d'alto à celui de soprano) ainsi que pour sa technique virtuose, apprise de Porpora et servie par un souffle exceptionnel. .

...