La chambre de Rastignac
Analyse sectorielle : La chambre de Rastignac. Recherche parmi 302 000+ dissertationsPar tiago_mtvl • 26 Avril 2025 • Analyse sectorielle • 2 149 Mots (9 Pages) • 5 Vues
TEXTE 10 : Le chambre de Rastignac / La Peau de chagrin
Introduction :
Situation du texte : il se trouve dans la partie Il du roman intitulée « La Femme sans cœur », partie presqu'exclusivement consacrée au récit rétrospectif de sa vie (analepse) que fait Raphaël à son ami Emile lors du banquet chez Taillefer.
Après avoir décrit ses relations avec son père, la mort de ce-dernier « de chagrin» car ruiné à cause de la Restauration, sa vie de labeur et d'étude occupée à rédiger son Traité de la volonté dans la mansarde qu'il loue à Madame Gaudin et à sa fille Pauline, Raphaël narre son changement de vie après la rencontre Rastignac : celui-ci l'a fait entrer dans la haute société et lui a présenté la comtesse Fodora à qui il va vouer une passion dévorante (et non-réciproque) qui le conduira à entrer dans des dépenses importantes. Il cède finalement au « système dissipationnel » prôné par Rastignac et, après avoir quitté son modeste logement, attend ce-dernier dans la chambre.
Problématique : en quoi cette description prend-elle une dimension proleptique ?
Mouvement 1 de la ligne 1 à la ligne 11 : la description d'une chambre composite
L. 1-3. Le premier verbe du texte, « apparut », a une connotation fantastique qui fait écho au registre du même nom que l'on retrouve dans l'ensemble du roman. Le passé simple indique que l'action du verbe est de premier plan.
• Cette apparition du « système dissipationnel » prôné par Rastignac quelques lignes plus haut et que l'on retrouve avec l'expression « vie de dissipation » est exprimée par trois compléments qui, par leur rythme ternaire, ont pour effet d'imprimer plus fortement l'importance de cette révélation: 1 c.c de manière « bizarrement exprimée » dont l'adverbe, du registre familier, indique un certain scepticisme, 1 c.c de moyen « par la chambre » complété par une subordonnée relative complément de son antécédent « chambre » qui a une valeur de lieu. C'est donc la chambre de Rastignac qui va matérialiser cette « vie de dissipation ». La description qui va en être faite a donc une valeur proleptique et le lecteur peut y lire la matérialisation de l'existence future de Raphaël.
• L'oxymore « noble insouciance » indique d'ailleurs que Raphael est entré de son plein gré dans cette existence.
L. 3-4. L'entrée dans la description se fait par le verbe à l'imparfait « s'élevait ». Sa connotation méliorative permet d'évoquer la taille importante de l'objet ainsi comparé à un monument.
• Cette description est rapportée en focalisation interne. Ce que voit en premier Raphaël, c'est la pendule, ce qui, au point de vue symbolique, confirme la dimension proleptique : la pendule marque le temps et manifeste un compte-à-rebours qui sera ensuite exprimé par la peau de chagrin. Ce compte-à-rebours est aussi marqué par le « cigare à-demi consumé » qui reprend l'idée exprimée par dissipation à la première ligne.
• La réification de Vénus par l'antonomase du nom propre « une Vénus » peut évoquer le caractère séducteur de Rastignac. Les attributs de Vénus sont à la fois traditionnels (Vénus est souvent représentée avec une tortue sensée manifester le calme de l'eau de laquelle est sortie la déesse) et incongrus (le cigare ainsi que le participe passé accroupie qui sied peu à une déesse). Cette antithèse montre le caractère composite de la chambre et caractérise le « système dissipationnel » qui promet de jouir de tous les aspects sensuels de la vie.
L. 4- 6. En même temps que le regard de Raphaël se détache de la pendule et devient circulaire la description se poursuit sur le motif de l'antithèse : «élégants/épars » ainsi que « vieilles chaussettes/voluptueux divans » et met en avant deux caractéristiques essentielles : le laisser-aller (les vieilles chaussettes sont un élément très prosaïque) et la séduction amoureuse : le pluriel « meubles (...) présents de l'amour » indique bien que les relations amoureuses sont nombreuses et que Rastignac est très « recherché » par les femmes puisqu'elles lui font des « présents », tandis que « voluptueux divan » souligne que l'objet divan est détourné à des fins amoureuses.
L. 6-9. Le regard de Raphaël se concentre maintenant sur le fauteuil dans lequel il est « plongé ». La sensation agréable est en antithèse avec la comparaison née de l'objet : les griffures du fauteuil, comparées aux « cicatrices » d'un « vieux soldat », permettent une personnification hyperbolique « bras déchirés » qui introduit pour la première fois le thème de la souffrance: on comprend que la « vie de dissipation » n'est pas aussi joyeuse qu'elle y paraît au premier abord et qu'elle laisse des traces dans la vie de celui qui la choisit, traces matérialisées, par analogie, par la « pommade » et « l'huile antique » déposées sur le fauteuil par « toutes les têtes d'amis ».
L. 8-11. Cette souffrance amène ensuite le terme dépréciatif « misère », en antithèse avec « l'opulence ». La métaphore, née de l'animalisation créée par le verbe « s'accouplaient », lui-même en antithèse avec l'adverbe « naïvement », permet à Raphaël de faire une synthèse de ses observations puisque, dans une gradation croissante « dans le lit, sur les murs, partout », son regard embrasse maintenant toute la chambre et n'y voit plus que l'antithèse « opulence/misère ». Le mot « misère » a également un sens moral qui va permettre le passage de la description du lieu au portrait moral et psychologique de son occupant.
• La phrase qui clôt le passage descriptif et prend maintenant le lecteur à témoin avec le « vous » dresse une dernière comparaison manifestée par le conditionnel passé 2e forme « eussiez dit ». Cette comparaison, qui est celle d'un esthète puisqu'elle introduit le lieu, prisé des Romantiques, de l'Italie, permet de donner à la chambre de Rastignac une fonction plus générale : elle représente la société en elle-même, société qui fait se juxtaposer (« bordés ») deux classes sociales extrêmes : les immensément riches, évoqués avec « palais » et les immensément pauvres : les « Lazzaroni. »
Mouvement 2 de la ligne 11 à la 23 : le portrait de son occupant
L. 11-13. Le présentatif « c'était » amorce la conclusion
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