La propriété et la possession

PROPRIETE ET POSSESSION

« La possession est l’ombre de la propriété » affirmait le Doyen Carbonnier.

L’analyse portera sur l’étude de la propriété et de la possession. Ces deux notions, quoique distinctes, vont généralement de pairs.

Le droit de propriété est un droit réel, ce qui signifie qu’il porte sur une chose et non sur une personne. Le droit de propriété est défini par l’article 544 du Code civil comme « le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements ».

Selon la Constitution, il s’agit de l’un des quatre « droits naturels et imprescriptibles de l’Homme ». Le droit de propriété a surtout été théorisé entre le 16e et le 17e siècle par des auteurs comme Thomas Hobbes, John Locke ou David Hume. Sous l’Ancien Régime, le domaine royal se confond avec le territoire national. Le Roi confère des droits sur ses terres à ses vassaux. Durant la Révolution Française, le législateur opte pour la version libérale du droit de propriété, à savoir la propriété individuelle. La Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, l’article 17 affirme que « nul ne peut être privé de cette propriété si ce n’est la nécessité publique l’exige ou sous la condition d’une indemnité ». Renforcé par le Code napoléonien, le droit de propriété est caractérisé par un titre de propriété. Comme n’importe quel actif, ce droit peut être vendu, prêter ou gagé. C’est à l’époque de l’empereur Justinien que le droit romain a reconnu au propriétaire un plein pouvoir sur la chose en découpant les trois attributs du droit de propriété : le droit d’user de la chose (usus), le droit de jouir de la chose (fructus) et le droit de disposer de la chose (abusus).

A la différence du droit de propriété qui est une prérogative du droit, la possession est une relation de fait qui s’établit entre une personne et un bien. Selon l’article 2255 du Code civil, la possession « est le fait de jouir ou de détenir un bien par nous-même ou même par un tiers qui en jouit ou le détient en notre nom ».

Le terme propriété désigne le droit légal exclusif de posséder quelque chose. La propriété peut désigner la possession d'un objet, d'un terrain ou d'une propriété intellectuelle ; la propriété d'un bien est classée comme privée, collective ou commune. Déterminer la propriété d'un bien implique de décider qui a les droits et les devoirs sur ce bien. La propriété concerne un domaine vaste. Il existe la propriété immobilière, la propriété industrielle et commerciale, la propriété culturelle. La présente analyse ne prendra pas en considération les deux derniers domaines.

Le droit de propriété a trois principales caractéristiques : absolu (le propriétaire peut faire ce qu’il veut du bien), individuel (le bien ne peut avoir qu’un seul propriétaire) et perpétuel (existe tant que le bien existe)

La possession est étroitement liée à la détention, cependant ce point ne sera pas développé dans cette étude.

La possession d’un bien immobilier permet la propriété de celui-ci. La possession d’un bien meublé ne permet pas forcément la propriété de celui-ci. En effet, les meubles sont des biens mobiles et étant des objets de commerce, ils changent régulièrement de propriétaires pour lesquels la possession n’induit pas aussi directement la propriété qu’en matière immobilière. C’est sur cette complexité que cette étude sera basée.

On peut alors se demander si la notion de propriété et la notion de possession sont vraiment des notions indissociables ?

L’attention sera tout d’abord portée sur la distinction probante entre propriété et possession (I) pour finalement se terminer sur une inévitable corrélation entre ces deux éléments (II).

I La Distinction entre propriété et possession

La notion de propriété peut être différenciée de la notion de possession. Par conséquent, nous allons étudier le fait d’être propriétaire et possesseur (A) ensuite la différence notable entre les deux notions juridiques (B).

1. Propriétaire et possesseur

Nous pouvons être propriétaire d’une chose sans en être possesseur. Nous pouvons être possesseur d’une chose sans en être propriétaire. La possession est l’acte, l’état ou le droit de posséder quelque chose. La possession ne donne pas le droit de propriété. La possession se définit comme le fait de se comporter comme le propriétaire de la chose.

La différence principale entre la propriété et la possession est que la possession est la garde ou le contrôle physique d’un objet alors que la propriété est un droit par lequel quelque chose appartient à quelqu’un. Etant donné que ces deux termes désignent deux sens différents, propriété et possession d’un objet peuvent être par deux personnes.

Dans le régime des biens, la possession est l’état de fait découlant ce qu’une personne qui se croit propriétaire d’une chose mobilière ou immobilière se conduit publiquement en propriétaire. La possession est constituée d’un élément matériel, le corpus. C’est le fait de se comporter comme un propriétaire, d’exercer sur la chose l’usus, le fructus et l’abusus. On distingue deux sortes de possession : la possession corpore alieno et la possession solo animo. La première est le bien qui est détenu matériellement par un tiers qui possède pour le compte d’autrui. L’exemple le plus courant que nous pouvons cité est le locataire d’un appartement qui exerce le corpus pour le compte de son bailleur, qui a la qualité de possesseur corpore alieno. La possession solo animo, à savoir la seule intention du possesseur de se comporter en maitre de la chose immobilière, permet sous certaines conditions, de combler l’absence d’emprise physique sur le bien pourvu que celle-ci ait initié la possession. La possession, est également constitué d’un élément psychologique, l’animus domini. C’est le fait de s’affirmer comme le propriétaire. L’élément matériel ne suffit pas sinon il y aurait une simple détention. L’animus est l’élément intentionnel, la volonté de se comporter en titulaire d’un droit sur la chose. C’est un élément indispensable sans lequel il n’y a pas de possession.

Il est néanmoins des cas où la possession ne correspond pas à la propriété : il y a celui qui exerce un pouvoir de fait sur la chose que tout le monde croit être le propriétaire et il y a celui qui est titulaire d’un titre de propriété mais qui n’a pas la maîtrise physique de la chose.

Cette situation, qui est de nature à troubler la paix sociale, doit être réglée. Pour ce faire, le droit part du postulat que, en général, le possesseur se confond avec le propriétaire, raison pour laquelle il fait produire des effets juridiques à la situation de fait qu’est la possession.

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