Discours de Charles de Gaulle
Commentaire de texte : Discours de Charles de Gaulle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar antoine8686 • 5 Mars 2023 • Commentaire de texte • 2 549 Mots (11 Pages) • 442 Vues
Quelques heures à peine après l’adoption de la Constitution le 29 septembre 1946 par l’Assemblée constituante, Charles de Gaulle s’exprima : « Cette Constitution dont on peut dire qu'un tiers des électeurs l'a approuvée, un tiers l'a rejetée et un tiers l'a ignorée ». A travers cette citation, de Gaulle souhaite affirmer son opposition au projet, opposition déjà observée plusieurs mois auparavant. Il semble intéressant de se concentrer sur ces évènements passés permettant de comprendre la vision et l’opinion de de Gaulle sur ce sujet.
Le texte ici étudié est un extrait d’une déclaration à la presse de Charles de Gaulle datant du 27 août 1946. Celle-ci est retranscrite entre les pages 19 et 23 du tome II de l’ouvrage Discours et messages, édité à Paris aux éditions Plon en 1970. Cette déclaration politique est une critique formulée par Charles de Gaulle à l’égard du projet de Constitution sous la seconde assemblée constituante de la IVe République, siégeant entre le 11 juin et le 27 novembre 1946. Il traite notamment du rôle, de la place et de l’état du gouvernement si ce projet de Constitution était amené à aboutir.
Après la Libération, un comité français de libération nationale est mis en place, présidé alternativement par Giraud et de Gaulle. Par l’ordonnance du 3 juin 1944, un gouvernement provisoire de la République française est ainsi formé. Avec la question de la validité des actes pris sous Vichy se pose également la question de l’avenir du territoire français. Alors que certains sont favorables à un retour de la IIIe République et de ses institutions critiquées à juste titre, d’autres souhaitent se diriger vers un nouveau régime. De Gaulle, attaché au principe de souveraineté nationale, demande alors au peuple français de se prononcer par référendum au suffrage universel. Ainsi, deux questions sont posées : l’Assemblée élue doit-elle être constituante ? L’adoption d’une Constitution provisoire est-elle nécessaire ? Face à la réponse largement positive des citoyens français à ces deux questions, l’Assemblée propose le 5 mai 1946 un projet de Constitution qui sera rejeté à plus de 52%. Une nouvelle Assemblée constituante est alors élue, le mouvement républicain populaire arrivant en tête. C’est finalement au mois d’octobre qu’une Constitution sera adoptée par référendum, avec un préambule faisant toujours partie du bloc constitutionnel aujourd’hui. Cette Constitution permettra d’instaurer un régime parlementaire aux caractéristiques particulières. Durant toute cette période, les projets de Constitution présentés par les assemblées seront systématiquement décriés par de Gaulle qui a démissionné le 16 janvier 1946. La déclaration étudiée ici s’inscrit dans la continuité des idées affirmées lors du Discours de Bayeux le 14 juin 1946.
Il est nécessaire de comprendre comment de Gaulle attaque le projet de Constitution adopté par l’Assemblée nationale constituante et de quelle manière les éléments de cette future Constitution sont remis en cause. De plus, il est nécessaire d’observer les modifications que de Gaulle juge nécessaires pour que ce nouveau projet de Constitution puisse être en accord avec ses convictions. Il semble enfin indispensable d’examiner le projet de Constitution d’octobre 1946 et ses différents articles pour comprendre les divergences idéologiques avec la pensée de de Gaulle.
Sur quels fondements et procédés argumentatifs Charles de Gaulle critique-t-il le projet de nouvelle Constitution finalement adoptée le 27 octobre 1946 ?
Si le discours pointe un déséquilibre entre les différents organes du pouvoirs, la question de la responsabilité des membres de l’exécutif entraîne Charles de Gaulle à proposer un autre projet.
I) Un déséquilibre entre les différents représentants des prérogatives exécutives et législatives
Si de Gaulle met en lumière l’autorité quasi inexistante du gouvernement, il décrit également la force politique trop importante du Parlement.
A) L’autorité quasi inexistante du gouvernement
Charles de Gaulle indique que les termes « Gouvernement » ou « pouvoir exécutif » (l.7) sont absents du projet de nouvelle Constitution. Pour lui, « il n’y est question que de « Conseil des ministres » et de « Cabinet » » (l.8 et 9). Ainsi, cette terminologie qui peut sembler anodine a un impact certain sur le pouvoir exercé par ces organes. Ces entités politiques sont alors réduites à une simple fonction de « délibération » (l. 10), comme si le pouvoir exécutif n’était pas pleinement exercé. Ce dernier aurait alors seulement une fonction passive, avec une capacité de décision fortement réduite. Il est ici important de comprendre que, d’après le deuxième projet de Constitution de 1946, l’acteur principal au centre du pouvoir exécutif est non pas le Président de la République mais le Président du Conseil. Il est à la fois le chef du gouvernement et de la majorité parlementaire. Même s’il est vrai que le régime parlementaire proposé par cette Constitution laisse peu de place au pouvoir exécutif, quelques droits sont accordés au Conseil des ministres, comme celui de dissolution, accompagné d’un décret du président de la République. Cependant, cette dernière se retrouve dans la pratique vite inutilisée. Ceci est dû à une volonté des législateurs dans l’écriture de cette nouvelle Constitution : il est nécessaire que deux crises ministérielles soient observées en moins de 18 mois pour qu’une dissolution puisse se faire par la suite. L’expérience montre que la dissolution de la chambre basse, bien qu’inscrite comme un élément de rationalisation du parlementarisme, n’a été utilisée qu’une seule fois sous la IVe République, en 1955. Cette critique d’un pouvoir exécutif affaibli permet de comprendre de manière encore plus précise la conception gaullienne de la République : pour de Gaulle, le Président de la République est l’acteur au centre du pouvoir politique, comme cela est défini à l’article 5 de notre Constitution actuelle. De Gaulle déplore ici également le faible rôle du Président de la République proposé par cette Constitution. Cette considération est fondée dans le sens où il est prévu que le Président de la République soit élu pour 7 ans par les deux chambres à la majorité absolue. Il a peu de pouvoirs et tous ses actes doivent être contresignés par le gouvernement.
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