Commentaire de décision : Conseil Constitutionnel - Décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobre 2020
Commentaire d'arrêt : Commentaire de décision : Conseil Constitutionnel - Décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobre 2020. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Mariana Romling • 22 Avril 2024 • Commentaire d'arrêt • 2 428 Mots (10 Pages) • 146 Vues
Maíiana Romling Rotheia Andíade
TD Díoits Fondamentaux – Séance 6 Suípopulation caícéíale et dignité des détenus
Commentaiíe de décision :
Conseil Constitutionnel - Décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobíe 2020
Selon les professeures de droit Mme. Roman et Mme. Hennette, “la détention provisoire constitue le summum de l’atteinte à la sûreté, puisque, par définition, elle concerne une personne innocente privée de liberté parfois pendant des mois, dans l’attente de son jugement.”1 S’agissant sur la possibilité d’un recours effectif pour faire cesser des conditions indignes dans une détention provisoire, la décision du Conseil constitutionnel à commenter porte sur une question prioritaire de constitutionnalité relatif à la conformité des articles du Code de procédure pénale régissant les règles de détention provisoire.
En l’espèce, le Conseil constitutionnel (CC) était saisi, dans les conditions de l’article 61-1 de la Constitution française (procédure QPC) des questions posées dans l’affaire transmise par la Cour de cassation dans son arrêt du 8 juillet 2020. Elles portent sur la conformité des articles 137-3, 144 et 144-1 du Code de procédure pénale.
Plus précisément, il est reproché au législateur de ne pas avoir exigé, dans ces dispositions, la cessation, par le juge judiciaire, des conditions de détention provisoire contraires à la dignité de la personne humaine. Ainsi, il s’agit d'interroger en particulier le second alinéa de l’article 144-1 (résultant de la loi du 15 juin 2000) à la lumière de la Constitution, notamment la préservation de la dignité, la liberté individuelle et le droit à un recours effectif.
Dans son raisonnement, le Conseil constitutionnel tranche le problème en deux temps. Premièrement, dans une question d’interprétation, il pose des conditions au Conseil d’État et à la Cour de cassation pour se prononcer sur le caractère sérieux d’une QPC et il accepte de statuer sur une interprétation d’une norme internationale dans des conditions précises. Ensuite, sur le fond des constatations, il considère que les recours disponibles pour se[pic 1]
1 Droits de l’homme et libertés fondamentales, Stéphanie Hennette Vauchez ; Diane Roman. 5 ed, 2022, p.356
prévaloir dans une situation d’exposition à des conditions indignes de détention ne sont pas suffisants, dans la mesure où ces recours ne garantissent pas, dans les bonnes conditions, que la détention indigne cesse. La disposition est déclarée, ainsi, contraire à la Constitution.
De cette façon, il convient d'analyser dans un premier temps les raisonnements controversés du Conseil constitutionnel lors de son examen de la constitutionnalité liée à l'interprétation des normes internationales (I). Dans un deuxième temps, il est nécessaire d’examiner comment le Conseil constitutionnel s’empare du principe de la dignité humaine pour exiger un recours effectif pour faire cesser la détention provisoire indigne (II).
Les arguments controversés du Conseil constitutionnel dans son contrôle de constitutionnalité en relation à l’interprétation des normes internationales
Il faut d’abord comprendre l’interdiction problématique faite par le Conseil constitutionnel d’un refus de la Cour de cassation et du Conseil d’État de transmettre une QPC en invoquant leur interprétation d’une norme internationale (A). Ensuite, il est nécessaire de comprendre le consentement du CC de statuer sur une interprétation d’une norme internationale qui présente une portée effective sur la disposition contestée (B).
L’interdiction de non-transmission d'une QPC en raison d’une interprétation des normes internationales
Avant d’analyser la conformité des dispositions contestées à la Constitution, le Conseil constitutionnel réalise une interprétation des dispositions soumises à son examen. Il rappelle tout d’abord la volonté du législateur, de mettre la Constitution au sommet de l’ordre juridique interne, comme garantie du respect de celle-ci. Ensuite, en faisant référence à l’article 23-5 de la loi organique sur le CC, il évoque que l’examen du contrôle de constitutionnalité a une priorité par rapport à l’examen de conventionnalité d’une disposition législative aux engagements internationaux. En l’espèce, le CC s’adresse au Gouvernement qui a affirmé que ce n’était pas nécessaire un contrôle de constitutionnalité par le CC étant donné que la Cour de cassation avait déjà examiné les dispositions évoquées avec les décisions de la CEDH qui condamnent la France.
Le Conseil constitutionnel affirme que “le juge appelé à se prononcer sur le caractère sérieux d’une question prioritaire de constitutionnalité ne peut, pour réfuter ce caractère
sérieux, se fonder sur l’interprétation de la disposition législative contestée qu’impose sa conformité aux engagements internationaux de la France, que cette interprétation soit formée simultanément à la décision qu’il rend ou l’ait été auparavant.”2 Ainsi, il est possible de comprendre que le CC a posé des conditions à l’interprétation de la Cour de cassation et du Conseil d’État (CE) par rapport à l’analyse du caractère sérieux d’une QPC.
Or, comme l’a rappelé Bonnet et Gahdoun dans leur article à la AJDA3, rien dans la loi organique sur le CC donne la compétence au Conseil constitutionnel pour déterminer ce qui doit être considéré comme une QPC “sérieuse”. Il n’est pas indiqué non plus la compétence du CC de montrer à ces juridictions comment filtrer les questions qui leur sont soumises. Les professeurs indiquent, au contraire, que le législateur a bien voulu distinguer les dispositions du CC et celles de la Cour de cassation et du CE, afin de bien séparer les régimes.
De cette façon, il est possible de critiquer la position prise par le CC de hiérarchiser le contrôle de constitutionnalité en détriment du contrôle de conventionnalité. La volonté du législateur de prioriser l’examen de l’un avant d’examiner l’autre ne signifie pas une primauté. En plus, cette interdiction posée par les Sages est inefficace, faute de moyens de contrôler la motivation de la Cour de cassation et du CE en refusant une QPC. Pour Bonnet et Gahdoun, il est plus raisonnable d’argumenter pour la création d’une voie d’appel à la décision de non-transmission d’une QPC, que de sustenter la décision du CC agissant comme une juge de cassation qui définit la correcte interprétation des règles en matière de recevabilité.
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