Lecture analytique Zone Guillaume Apollinaire Vers 1 à 24
Fiche : Lecture analytique Zone Guillaume Apollinaire Vers 1 à 24. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Solène M • 11 Mars 2017 • Fiche • 2 785 Mots (12 Pages) • 4 539 Vues
Zone, Guillaume Apollinaire
vers 1 à 24
Alcools, publié en 1913, rassemble les poèmes écrits entre 1898 et 1912.
Zone est l'histoire d'une déambulation poétique d'un matin (début du poème) vers un autre matin (fin du poème), dans un Paris entrecoupé d'évocations géographiques diverses.
Ce poème ouvre le recueil, ce qui ne correspond pas à l'ordre chronologique de rédaction, mais bien à un choix d'Apollinaire, ce qui oblige le lecteur à le traiter avec une attention toute particulière.
On entre à la fois dans un espace géographique, celui des villes qu'Apollinaire a parcourues dans sa vie, mais aussi dans un espace-temps mental, celui des souvenirs du poète, et enfin d'un espace poétique, une nouvelle “zone” de transition entre tradition et modernité.
Problématiques retenues :
Qu'est-ce qui constitue la modernité de Zone ? Qu'est-ce qui est novateur ds ce poème ?
Autres problématiques possibles :
-Prq Apollinaire a-t-il choisi de commencer Alcools par Zone ?
-Ds quelle mesure ce début de Zone peut-il être considéré comme un manifeste poétique ?
1. Un nouveau territoire
a) Titre et place du poème ds le recueil
Qui dit poème liminaire dit poème phare. C'est lui qui va éclairer l'ensemble du recueil, et ce jusqu'à son dernier poème, Vendémiaire, auquel il répond d'une certaine façon, puisque les premiers mots de Zone commencent par renvoyer à la fin de l'ouvrage (v.1 A la fin tu es las). Cette structure en miroir évoque l'idée d'un cycle ou d'une boucle; en fait, on peut le voir comme l'itinéraire du poète Guillaume Apollinaire, qui se dessine comme formant un tout cohérent et connotant le mouvement perpétuel, celui de la vie.
Le titre renvoie au grec zoné, qui signifie ceinture, boucle (mm idée que précédemment, donc). Il renvoie aussi à l'idée d'un territoire relégué au-delà des limites, des fortifications parisiennes par exemple, cad un territoire marginal, périphérique et vague, non délimité en tout cas.
b) L'espace géographique. Paris, la ville.
C'est ainsi que se dessine dans ce poème une géographie tout à fait originale, mêlant une multitude d'espaces réels, allant de villes en villes, européennes et pricipalement françaises, Paris y tenant un rôle majeur, notamment ds ce début : tour Eiffel, v.1; Port-Aviation, v.4; Située à Paris entre la rue Aumont-Thieville et l'avenue des Ternes, v.25. Il s'agit d'ailleurs d'un Paris intime, de lieux familiers au poète et surtout du Paris de la déambulation (le terme rue revient quatre fois en ce début de poème + une fois avenue). Ce contexte urbain est évoqué de manière positive (jolie rue, v.15; neuve et propre, v.16), qui appartient à une zone presque périphérique à proprement parler (v.24 l'avenue des Ternes se trouve à l'extrême ouest de Paris, presque en banlieue; de mm que les hangars de Port-Aviation). Apollinaire célèbre non pas les élégants quartiers historiques de Paris mais des quartiers industriels récents.
C'est donc au Paris moderne que le poète donne sa préférence; et c'est aussi en cela que Paris a une importance majeure ds le recueil (notamment à la fin, ds Vendémiaire, où Paris devient la ville suprême, porteuse des voix de toutes les autres villes et de celle du poète).
c) Industrialisation et nouvelles technologies
La modernité du Paris évoqué ds ce poème ne tient pas seulement à sa géographie. Apollinaire décrit les aspects les plus neufs de la ville. Bergère ô tour Eiffel (v.2) > cette tour est encore très récente à l'époque du poème (l'exposition universelle date de 1889 et le poème de 1912) et elle suscite encore des polémiques liées à son esthétique jugée douteuse. Apollinaire choisit, pour symboliser la modernité, un monument très controversé.
La modernité de la ville tient aussi à son activité industrielle et tertaire, le mouvement incessant d'une vie frénétique, souligné par les énumérations de professions diverses qui sonnent de manière presque exotique (v. 17. Les directeurs les ouvriers et les belles sténo-dactylographes), les énumérations temporelles au vers suivant, la personnification de bâtiments (la sirène y gémit, v.19; Une cloche rageuse y aboie, v.20; Les inscriptions [...] criaillent) et le lexique lié au bruit bien peu musical et harmonieux. Apollinaire valorise la cacophonie urbaine.
2. Un nouveau rapport à soi et au temps
a) Lassitude du passé
Le ton est donné dès le 1er vers où Apollinaire dit son impatience, son agacement (A la fin) et un certain désespoir beaucoup plus fort et plus sombre (tu es las).
Très rapidement, il oppose le monde ancien et le monde moderne : celui de l'antiquité grecque et romaine (v.2), des ponts napoléoniens (l'animalisation du v.2 est dégradante > le troupeau des ponts bêle) qu'il étend mm de manière provocatrice à certains objets les plus récents du monde moderne (Ici même les automobiles ont l'air d'être anciennes, v. 3).
Au mouvement incessant de la ville (déjà précédemment évoqué), Apollinaire semble opposer son propre immobilisme : il n'est jamais sujet de verbes d'action mais au contraire de verbe de perception (J'ai vu, v.15) ou de sentiment (J'aime, v. 23); et d'ailleurs il n'apparaît que très rarement et de manière brève sous la forme de pronoms personnels nus (je/tu); l'identité du poète semble se dissoudre ds le foisonnement urbain. Son seul mouvement est avorté (la honte te retient /D'entrer dans une église, v. 10). D'une certaine manière, il est séduit par le monde nouveau mais paraît comme englué sinon dans l'ancien et le passé du moins dans une espèce d'ici et maintenant : “tu es las” peut aussi s'entendre comme “tu es là”; le poème est majoritairement écrit au présent (d'énonciation ?) et des déictiques ancrent le discours ds l'immédiateté du moment de la parole (Ici, v.4;
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