A l'écoute des Fleurs du Mal de Baudelaire

              A l’écoute des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire

1- L’auteur

Les « Fleurs maladives » comme les appelle Baudelaire dans une correspondance avec Théophile Gautier, considéré comme le chef de file du Romantisme, ont été condamnées pour outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs en 1 ; Baudelaire en a été très touché puisque il en a fait une seconde puis une troisième version inachevée sur un ton plus pessimiste et nous apparaît donc comme une personne sensible. Ceci s’explique par le fait qu’il ait perdu son père à l’âge de 5 ans et en a gardé un traumatisme.

De plus seule une personne d’une grande sensibilité est capable d’écrire de la poésie à sa façon...

On nous dit que c’est un poète déchiré entre l’aspiration au voyage et l’impossibilité de s’élever ; en effet, sa biographie nous apprend qu’il a été envoyé en Inde par son beau-père avec lequel il ne s’entendait pas avant de revenir en France dépenser l’argent de l’héritage de son père...ce déchirement le conduit au Spleen, lyrisme sombre dû à son perpétuel ennui.

L’orateur nous apprend que Baudelaire consommait du haschish et de l’opium ce qui pouvait l’entraîner dans des contemplations oniriques de paradis artificiels ; on retrouve cela dans le poème « Rêve parisien ».

Baudelaire aimait les femmes au vu des nombreuses maîtresses citées dans cette émission : Jeanne Duval, la métisse qui enflamma ses rêveries érotiques, Marie Daubrun qui lui brisa le cœur en le délaissant pour un autre poète, Madame Sabatier dite la Présidente à qui il demanda en vain de l’aide  pendant son procès sont autant de muses à l’origine de certains poèmes des Fleurs du Mal.

Il avait aussi des amis parmi lesquels on retrouve Théophile Gautier, Gustave Flaubert, Maxime Du Camp (à qui il a dédié le poème Le Voyage) et Victor Hugo et menait sa vie d’artiste et de dandy dans le milieu mondain parisien.

Baudelaire nous apparaît comme un personnage innovant puisqu’il a su créer son propre style de poésie, qui dérange puisqu’à l’époque il a suscité la désapprobation des bien-pensants d’où son procès et sa condamnation, et limite dépressif au vu de son spleen et obsession pour la mort.

2- L’oeuvre 

- C’est un ouvrage subversif, qui renverse les thèmes classiques du Romantisme ; hormis les principaux thèmes chers au Romantisme classique comme l’exotisme et le voyage, Baudelaire développe aussi dans Les Fleurs du Mal des thèmes plus sombres comme la sensualité et la violence amoureuse, l’obsession de la mort, le mal, le péché, l’errance dans Paris, la lassitude, l’ennui et son fameux Spleen.

- Dans Les Fleurs du mal, les images sont omniprésentes mais certaines privilégiées par le poète. Les images récurrentes dominant l’écriture poétique de Baudelaire sont :

- la comparaison animale :   les images du chat et du serpent reviennent souvent.

Le poème intitulé « Le Chat » est l'occasion, pour l'auteur, d'une comparaison entre cet animal et la femme aimée : « Je vois ma femme en esprit. Son regard / Comme le tien, aimable bête, / Profond et froid, coupe et fend comme un dard. »

Dans « la charogne » strophe 5 « De larves, qui coulaient comme un épais liquide » 

. La métaphore atmosphérique

Elle apparaît dans de très nombreux textes.

Dans « l’Invitation au voyage » : vers 7 et 8 «Les soleils mouillés / De ces ciels brouillés « 

Dans « le Voyage » strophe 4 : « La glace qui les mord, les soleils qui les cuivrent, »

Dans « la Chevelure » strophe 3 « Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève ! « 

Dans « A une passante », vers 7 « Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan, « 

Dans « La beauté » vers 6 « J'unis un coeur de neige à la blancheur des cygnes. »

Dans le recueil, de telles images sont souvent employées, soit pour montrer la coïncidence entre le monde extérieur et les états d'âme du poète, soit pour évoquer des époques de la vie (depuis le printemps, symboliquement associé à la jeunesse, jusqu'à l'hiver, synonyme de vieillesse et de décrépitude).

Les vers qui m’ont plu  :

3- L’approche critique

Jorge Semprun, en racontant qu’il a dit les vers qu’il avait en tête des Fleurs du Mal de Baudelaire à son compagnon, le philosophe et sociologue français Maurice Halbwachs sur son lit de mort en déportation en 1945, montre que la poésie prend la place d’une prière pour l’accompagner dans son passage dans l’au-delà, lui qui n’était pas croyant. Ces vers étaient une évocation de la mort tirés du poème « le Voyage » : « O Mort, vieux capitaine, il est temps, levons l’ancre ! »

Michel Butor intervient sur la nature de la poésie inventée par Baudelaire : il a ouvert la voie de la modernité avec une esthétique travaillée et une profonde réflexion sur les fonctions de l’art. Le poète a su tirer de ses expériences individuelles les conséquences et conclusions sur la nature même de la Poésie.

Georges Bataille affirme que Baudelaire, comme Kafka, a eu conscience qu’il se mettait du côté du mal pour écrire et se sentait donc coupable d’écrire. Il dit pourtant que si la littérature s’éloigne du mal, elle devient vite ennuyeuse...; écrire pouvait être perçu comme faire le contraire de travailler.

4-L’interprétation des poèmes

Dans l’Albatros, interprété par Léo Ferré, la musique évoque la tristesse, certainement ressentie par Baudelaire à l’évocation de cet oiseau mal aimé condamné aux moqueries des hommes. La comparaison entre l'oiseau maltraité et le poète incompris est rendue explicite par l'assertion « Le poète est semblable au prince des nuées » Baudelaire évoque dans ce poème le traitement que la société inflige au poète : l'oiseau capturé, ridiculisé et maltraité incarne l'artiste rejeté. La voix du chanteur, grave et calme au début devient ensuite forte et investie avec ses trémolos comme pour traduire sa colère envers un monde d'humains bornés et malfaisants d'autre part.

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