Analyse de Saturne dévorant un de ses enfants

F Goya, Saturne dévorant un de ses enfants

        Ce tableau est inspiré du mythe de Cronos, fils d'Ouranos (le Ciel et la Vie) et Gaïa (la Terre). Il est le plus jeune des Titans et son père l’avertit qu’il sera détrôné par son propre fils comme lui-même l'a été.

Cronos épouse sa sœur Rhéa et il engloutit ses propres enfants au fur et à mesure que sa femme les met au monde pour éviter que la prophétie ne se réalise. Mais Rhéa sauve le sixième enfantet le cache en Crète, sur les conseils de Gaïa. Elle le remplace par une pierre que Cronos engloutit. Cet enfant s'appelle Zeus. A son tour, il renversera son père et le fera et le fera vomir pour sauver ses frères et sœurs. Dès l'Antiquité "l'avaleur", Cronos est rapproché de Chronos. Il est nommé Saturne chez les romains. On peut trouver une correspondance entre la tragédie et ce tableau car ce tableau car ce suscite l'horreur par différents procédés.

Tout d'abord, les dimensions du tableau de 146cm sur 83cm impressionnent d’autant plus qu’elles mettent en relief un personnage disproportionné qui occupe quasiment toute la toile : Saturne. Le Titan est peint en gros plan sur un fond noir qui fait ressortir le monstre chevelu et grimaçant.

        Ensuite, Saturne apparaît en pleine action alors qu’il dévore un de ses enfants. Outre l’horreur que ce geste provoque (puisqu’il s’agit d’un infanticide) les couleurs concourent à rendre la scène effrayante. La lumière fait ressortir le corps, la tête et les membres de Saturne, notamment ses mains qui enserrent le corps de son enfant. La couleur la plus claire fait apparaître le haut du corps de l’enfant sans la tête ; le père vient de dévorer cette dernière et le sang rouge vif s’écoule de la blessure occasionnée. La couleur rouge insiste sur la tragédie qui est en train de se jouer et le fond sombre, accentue le désespoir.

        Enfin la position de Saturne et l’expression de son visage sont également effrayantes. En effet le personnage qui ressemble à un fou saisi en pleine action accroupi, les yeux exorbités, il donne l’impression d’être terrifié par ses propres actes, d’être prisonnier d’un cauchemar, d’être la victime du destin, d’une malédiction.

Ainsi le tableau de Goya illustre parfaitement la tragédie de la destinée. Il suscite « horreur et pitié » chez le spectateur d’une telle scène, et selon Aristote, dans son œuvre Poétique, il répond donc à la fonction de la tragédie : purger, libérer l’homme de ses passions (la catharsis).

...