Alcool, Apollinaire
Dissertation : Alcool, Apollinaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar debmed • 2 Octobre 2023 • Dissertation • 1 687 Mots (7 Pages) • 282 Vues
DISSERTATION ALCOOL DE APOLINAIRE
Le recueil Alcools d’Apollinaire paru en 1913 s’ouvre sur ce vers : « A la fin tu es las de ce monde ». Le poète, à travers cette affirmation, semble rejeter le passé et la tradition et vouloir se tourner délibérément vers le monde moderne qui l’entoure. Cette œuvre initialement intitulée Eau-de-vie et qui s’ouvre sur le poème Zone souffle indéniablement un vent de nouveauté. Ami des artistes modernes du Paris du début du siècle, de Max Jacob à qui il dédie son poème Palais à Picasso et ses Demoiselles d’Avignon, Apollinaire s’inscrit dans un courant d’avant-garde auquel il a lui-même donné le nom d’ »Esprit nouveau ».
Pourtant, Apollinaire n’est pas totalement en rupture avec le passé. Il a su, pour imposer son style nouveau, se servir et sublimer les thèmes et procédés traditionnels afin de s’affirmer dans une posture particulière, « entre-deux mondes » comme a dit de lui le critique littéraire Pierre Brunel.
Pbmatique.
Pour répondre à cette question, nous allons dans un 1er temps analyser les ressorts modernes de l’œuvre d’Apollinaire, puis de quelle manière son écriture s’enracine dans la tradition poétique, pour enfin comprendre l’esthétique propre au poète.
I. Un recueil symbole de modernité
A. Un hymne à la modernité.
Le premier poème du recueil intitulé Zone plonge dès le début le lecteur dans un monde nouveau et moderne. Ce poème apparaît comme un hymne à la modernité de la ville, de la ville moderne, avec Paris comme symbole.
- nouveautés technologiques :
La description faite par Apollinaire de la capitale parisienne met en avant tous les changements liés à son époque, celle de la Révolution industrielle. Il parle de voitures, d’avions, de gares, d’usines, de rues bruyantes, il parle de la presse, des affiches. Il rend hommage à la tour Eiffel, pourtant décriée et devenue par la suite symbole de modernité. Il utilisera à nouveau cette image en 1918 avec son célèbre calligramme nationaliste dont le but était de célébrer la force de la France face à l’ennemi allemand.
- scènes banales :
Il décrit des ouvriers et des sténo-dactylographe qui vont travailler, il décrit des scènes quotidiennes et banales de la vie des parisiens, ce qui est un thème nouveau dans la poésie.
- paysage urbain :
Les éléments du paysage urbain inspirent Apollinaire pour construire une poésie moderne et pour rechercher le Beau dans le Nouveau. Le thème de la ville est un thème récent en poésie, thème rejeté par les romantiques qui la trouvent laide et se réfugient dans la nature. L’univers urbain dont Apollinaire retient les aspects beaux et animés d’une vie intense est un thème audacieux à l’époque, et novateur : ce type de beauté est inconcevable pour un poète traditionnel. La ville moderne est devenue un melting pot où le poète mêle avec tendresse ses rencontres variées : femmes aimées, prostituées, tziganes, juifs, émigrés… La tzigane , la synagogue …)
B. Un recueil au style moderne
C’est aussi et surtout par les procédés employés que Alcool se diffère des autres recueils et entre de plein pieds dans le modernité.
- la déponctuation :
Ce qui frappe dès le 1er poème, c’est le manque de ponctuation. En poursuivant la lecture, on se rend compte que cette absence de ponctuation se retrouve dans tout le recueil. Si A n’est pas le 1er poète à user de ce procédé, il est le 1er à l’utiliser de façon absolue. Cet esthétisme est à rapprocher du courant futuriste de Filipo Marinetti qui, avec son Manifeste technique de la littérature futuriste de 1912 préconise déjà le rejet de la syntaxe courante.
On sait qu’A a décidé d’enlever la ponctuation à la dernière minute « parce qu’elle m’a paru inutile et elle l’est en effet… » a t-il écrit.
En rompant avec nos habitudes de lecteurs, Apollinaire provoque de véritables incongruités. Quand on lit quelques vers, on n’en comprend pas toujours le sens, on hésite, on relit, on ressent, puis on finit par comprendre.
- l’infinie variété de formes :
Ce qui surprend également à la lecture de Alcool, c’est l’infinie variété de formes. Il s’y trouve des poèmes très longs comme La Chanson du mal-aimé, d’autres très courts comme L’adieu. On y trouve des poèmes à la versification régulière comme Mai écrit en alexandrins et 4 strophes aux rimes embrassés ou en vers libres comme Zone qui mélange les genres, les rimes et les strophes.
Transition : Un recueil moderne, mais qui, sous bien des aspects, emprunte à la tradition ses procédés et ses thèmes.
II. Mais Alcool est également une œuvre qui ne rompt pas avec le passé et qui se sert subtilement de thèmes et procédés de la poésie traditionnelle.
A. Un recueil aux thèmes lyriques
Alcool est un recueil qui emprunte au registre lyrique ses principales thématiques.
- la fuite du temps :
Ainsi, la fuite du temps, thème cher aux poètes lyriques comme Verlaine ou Rimbaud, est symbolisée par l’écoulement de la Seine dans Le Pont Mirabeau.
Dans Mai, la souffrance de l’amour perdu est décrite par le retour du printemps et donc du temps qui passe mais également par des éléments qui témoignent de la fuite du temps : « la barque s’éloigne », « la roulotte traînée par un âne ». Apollinaire insiste également sur la beauté et la jeunesse qui ne sont plus, celle de Annie Playden, son amour perdu : « les pétales flétries sont comme ses paupières ».
- les amours impossibles :
Alcool est rempli de poèmes sur les amours mortes, les amours dangereuses, les amours impossibles. Blessures, douleur, angoisse, souvenir mélancolique… autant de sentiments évoqués par l’auteur pour parler de ses amours malheureuses avec la jeune anglaise Annie Playden puis Marie Laurencin (le Pont Mirabeau, Mai, Automne malade). Apollinaire hérite de Baudelaire une sorte de spleen propre au mal-aimé, à l’instar du poème La Chanson du Mal-Aimé.
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