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Etre libre c'est dire non?

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Par   •  26 Décembre 2022  •  Dissertation  •  1 459 Mots (6 Pages)  •  701 Vues

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Etre libre, est-ce dire non ?

L’expression de la liberté prend souvent la forme du refus : de la révolte à la manifestation, de l’action de grève au renversement d’un régime politique… les hommes ne cessent de s’opposer à ce qui, à leurs yeux, bafoue leurs droits. La plupart du temps, la conquête d’une liberté nouvelle est le fruit d’une opposition, d’un conflit et traduit le rejet d’une situation devenue inacceptable. Mais il ne faudrait pas en conclure trop vite qu’un être libre doit toujours s’opposer et dire systématiquement non à ce qui l’oblige ou à ce qu’il n’aime pas : cela reviendrait à se méfier d’une manière sans doute excessive d’autrui et de la société et à ne voir dans ma relation aux autres qu’un risque pour mon indépendance. Le refus systématique pourrait bien être aussi aveugle que la soumission inconditionnelle. Aussi la question se pose-t-elle : Être libre, est-ce dire non ?

Un premier moment montrera que l’homme est, par sa nature même, le seul être à être capable de manifester sa liberté par le refus. Cependant, nous montrerons ensuite que dire non pour le simple plaisir de contredire ou de refuser est moins l’expression d’une liberté que d’un caprice. Un troisième moment montrera que dire non, c’est bien manifester sa liberté, à condition que ce soit pour construire autre chose ; le non est alors la condition première de l’élaboration d’un projet ou d’un idéal.

  1. L’homme, par nature, est le seul être à pouvoir dire non

Pour le commun des mortels, être libre consiste à « faire ce que l’on veut ». Vivre sans entrave, sans obstacle, c’est être capable de refuser ces entraves. La liberté se vit donc comme indépendance et comme rupture avec ce que m’impose le monde ou autrui. Certaines situations l’exigent. Ainsi, CAMUS, dans L’homme révolté nous dit-il que l’esclave, à l’instant où il rejette l’ordre humiliant de son supérieur, refuse en même temps l’état d’esclave lui-même Le mouvement de révolte le porte plus loin que son propre refus.

Or, en ce sens, seul l’homme est libre, car lui seul peut dire non. Le propre de l’homme est de pouvoir nier ce qui se présente à lui. Contrairement à l’animal, enfermé dans un éternel présent, l’homme est capable de dire « non » à une situation. Ainsi selon SARTRE, l’homme est le seul être à ne pas avoir de définition fixe : il se transforme à partir de ce qu’il fait. Il n’a pas à se contenter d’un donné et peut toujours refuser la situation ou tel trait de sa personne dans lesquels on pourrait vouloir l’enfermer.

Par mon refus, j’aspire au changement. Tout accepter, c’est se condamner à ne rien dénoncer. Le danger du siècle ne consiste-t-il pas dans un tel relativisme : dire « à chacun sa culture », n’est-ce pas refuser de donner à l’homme un idéal de justice ? Pour STRAUSS, il est inadmissible de tout accepter au nom de notre incapacité à définir la justice absolue. Sans idéal, tout se vaut et rien ne se refuse.

Tr : Mais que l’homme soit le seul être à pouvoir refuser ne fait pas du refus en lui-même une réaction nécessairement saine.

  1. Cependant, dire seulement non montre moins une attitude libre qu’une réaction stérile

Dire seulement non, c’est risquer de bloquer une situation. De fait, refuser une situation pour la refuser, c’est se condamner à la frustration et à l’absence d’évolution. En effet, si l’adolescent exprime un refus pour éprouver sa liberté, il est nécessaire qu’il sorte de cette épreuve pour se construire. De même en politique, il ne convient pas de refuser simplement : abolir la monarchie était nécessaire pour construire une constitution démocratique. Mais la période de transition a entraîné une période de trouble et de violence connue sous le nom de « terreur » tant qu’aucune nouvelle constitution n’était rédigée. La stabilité politique était à ce prix, mais la révolte sans horizon n’aurait pu mener nulle part.

Ainsi le refus systématique entraîne toujours la frustration. C’est bien ce que nous montre Freud dans sa 2e topique (1920) : pas de Moi sans Surmoi, pas de contrôle du désir sans Censure. Dire toujours non à soi-même, c’est se condamner à ne pas exaucer ses désirs. Dire toujours non aux autres, c’est se condamner à ne laisser aucune possibilité de communication ou de relation sincère et durable. La construction de soi suppose donc une ouverture à l’autre et à ce qu’il me propose, et donc une possibilité d’accepter son point de vue sans nécessairement y voir là le signe d’un esclavage. Sans cette acceptation, nous ne serions libres qu’à la manière de Robinson Crusoë : sur une île déserte, sans aucune limitation de la part d’autrui, mais sans réelle possibilité d’exercer notre liberté non plus.

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