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Les petites vielles, Baudelaire

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Par   •  30 Mai 2018  •  Analyse sectorielle  •  2 049 Mots (9 Pages)  •  3 082 Vues

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Les Petites Vieilles, Baudelaire

Les Fleurs du Mal, « Tableaux parisiens », CXXVI

Alors que la posture du poète était jusque là éloignée des êtres de la rue : de la tour d’ivoire dans « Paysage » à une déambulation solitaire dans « Le Cygne », Baudelaire s’intéresse désormais à des êtres réels. Dans « Paysage », poème liminaire de la section « Tableaux parisiens », le poète était encore dans sa tour d'ivoire, proche de l'Idéal, et composait une poésie idyllique qui refusait le réel de la ville. Dans « Le Cygne », le poète descendait dans la rue, mais le spectacle des métamorphoses de la ville n'était qu'un prétexte au surgissement des souvenirs des exilés et à une allégorisation de la ville. C’est ici le premier poème où les êtres peuplant la ville deviennent véritablement des objets de poésie.

Problématique : Ce poème change-t-il notre regard sur les vieilles ?

  1. Le poète nous invite à porter notre attention sur « les petites vieilles »
  1. Une posture d’observateur qui nous invite à y prendre part

Nous entrons dans le poème et découvrons la description au fil de la narration du poète.

Ce dernier se pose lui-même en spectateur :

  • Le premier pronom à survenir est celui de première personne du singulier « je » : « je guette ».
  • Lexique de l’observation : « je guette », « observé », « j’entrevois »

Puis, de ses observations semble naître une rêverie : « il me semble », « méditant » (v.29), « je ne cherche » (v.30).

Or, le poète s’adresse au lecteur, avec la première personne du pluriel vers 7 puis le pronom de deuxième personne « vous » (v.21). Il nous invite à y prendre part avec l’interrogation vers 21-22 : « avez-vous observé… ? ».

Ainsi s’installe une proximité entre le poète et le lecteur ; et ce dernier s’installe alors pleinement dans l’observation de la ville.

Le poète semble déambuler dans Paris au fil de sa description, ce que suggère le participe présent « traversant » (vers 26).

  1. La description prend place dans un Paris fourmillant

Le poème commence par un CCLieu : « Dans les plis sinueux des vieilles capitales »

         l’adjectif épithète de « capitales » rappelle le titre du poème. Il semblerait alors que le lieu se confonde avec ses êtres.

         « dans les plis sinueux » : syllepse de sens entre les rues étroites de Paris et les rides de la peau des personnes âgées

On trouve alors au sein du poème des références à ce lieu.

  • vers 26 : « Traversant de Paris le fourmillant tableau »  l’antéposition du CdN « de Paris » permet de mettre en valeur « le fourmillant tableau ». On retient de Paris son agitation, si bien que les « vieilles » apparaissent en contraste. « fourmillant » s’oppose en effet à l’adjectif « fragile » au vers suivant.
  • Vers 10 : les « omnibus » = symbole de modernité. Les personnes âgées sont alors ballottées par cette agitation moderne.
  • « Frémissant au fracas roulant des omnibus », « flagellés par les bises iniques »

 Lexique violent : « fracas », « flagellés » : l’environnement est rude

 Allitérations en [f] et en [r] renforcent la rudesse du lieu

Mais la ville semble se définir par une antithèse entre « horreur » et « enchantements ». Dans ce lieu en mutation et plein d’agitation qui peut être inconfortable, se trouve une certaine magie. Cette description laisse sous-entendre la description de ses habitants sur le même modèle.

  1. Le poète nous invite à observer des êtres en marge de cette agitation, les « vieilles »

Le titre oriente déjà notre regard : « les petites vieilles ».

Celles-ci sont annoncées par une périphrase : « des êtres singuliers, décrépits et charmants » qui confère à ces personnes un aspect mystérieux.

Ces êtres se caractérisent par :

  • LEUR LAIDEUR :
  • champ lexical de la laideur : « décrépits », « disloqués », « discords », « monstres » x2, « bossus », « tordus »
  • Périphrases : « ces monstres disloqués », « monstres brisés, bossus ou tordus »  informes

Leurs corps semblent porter les stigmates de leur vie passée.

  • Leurs vêtements accentuent cette laideur : « jupons troués »

  • LEUR FRAGILITE
  • « cet être fragile » (v.27)
  • « fantôme débile » (v.25)  ces êtres sont quasi irréels

  • LEUR SOUFFRANCE, LEUR ACCABLEMENT
  • Elles souffrent dans leur chair, ballottées par l’environnement : « flagellés », « frémissant »
  • Comparaison aux « animaux blessés » vers 14
  • Les verbes traduisent l’écrasement au sol : « Ils rampent », « se traînent »
  • Contre rejet  de « tout cassés » (vers 16)
  • Comparaison à des « marionnettes » (vers 13)  Elles ne se possèdent plus mais sont soumises aux aléas extérieurs.

Dès lors, on ne sait plus si ce qui est comparé à des reliques (vers 11) c’est leur sac ou bien elles-mêmes !

Alors même que ces êtres sont caractérisés par leur âge, leur laideur et leur souffrance, elles sont le sujet d’un poème ! Baudelaire nous invite alors à changer notre regard sur ces êtres singuliers.

  1. Le poète semble attiré par ces êtres singuliers sur lesquels il renouvelle notre regard
  1. Un regard attendri sur les vieilles

Le titre « Les Petites Vieilles » comporte un adjectif pouvant être pris pour une appellation affectueuse.

Et d’emblée, la description s’annonce en antithèse :

  • « horreur » / « enchantements »
  • « décrépits » / « charmants » (vers 4) = magiques, envoûtants

En effet, le poète nous interpelle par l’impératif : « aimons-les ! » (vers 7), alors même qu’il les appelait juste avant par la périphrase « monstres disloqués ». Le poète nous invite donc à aimer la laideur. Par exemple, leur trottinement devient une danse : « ou dansent «  (vers 15).

  • Portrait pathétique de ces femmes.
  • comparaison aux « animaux blessés »
  • adjectif « iniques » à la rime

 Le poète porte un regard attendri sur ces femmes.

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