Lecture linéaire Manon Lescaut
Fiche de lecture : Lecture linéaire Manon Lescaut. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar zoenicosia • 31 Janvier 2023 • Fiche de lecture • 2 498 Mots (10 Pages) • 771 Vues
Texte 1
Manon Lescaut – Scène de Rencontre
Personnages en marge, plaisirs du romanesque
Introduction :
La Première partie de Manon Lescaut de L'abbé Prévost nous apprend que la scène se déroule durant l'été 1712. Publié en 1731, cette œuvre majeure du 18e siècle qui dépeint un terrible exemple de la force des passions s’inscrit dans le parcours : personnages en marge, plaisirs du romanesque. L'auteur l'Abbé Prévost (1697-1763) a eu une vie pleine d'aventures. Il nait dans une famille aisée qui lui permet une éducation soignée et une entrée chez les Jésuites. Il a beaucoup en commun avec un des personnage principal de l'histoire : Des Grieux. Agé de 17 ans à l'époque, le chevalier achève si brillamment ses « exercices publiques » qu'on lui propose d'entrer dans l'état ecclésiastique. Il raconte 4 années après les faits ses mésaventures à un homme nommé Renoncour qu'il a rencontré d'abord dans une auberge à Pacy, puis au Lion d'Or de Calais. Le chevalier des Grieux avait un destin tout tracé quand il confia « je me préparait à retourner chez mon père qui m'avait promis de m'envoyer bientôt à l'Académie ». Cependant, une rencontre pour le moins inattendue bouleverse le destin du chevalier : Manon.
Cet extrait est la scène de rencontre entre le chevalier Des Grieux et Manon Lescaut. C'est l'occasion pour le lecteur ainsi que pour le narrateur Renoncour, de découvrir Manon pour la première fois. Le roman présente des récits enchâssés : Des Grieux conte son histoire à Renoncour qui est lui même le narrateur. Nous apprenons dans cet extrait qu'elle est envoyé au couvent par ses parents pour « arrêter son penchant au plaisir ». Elle voit son destin comme une volonté divine et se résigne mais le Ciel la destine plutôt à une vie sentimentale tumultueuse avec Des Grieux. Nous verrons comment, dès la scène de rencontre, le roman met déjà en place un amour tumultueux, inégal et tragiquement marqué par la fatalité.
Lecture de l'extrait
Le texte étudié peut être organisé en trois mouvements. D'abord nous assistons à leur rencontre et nous comprenons rapidement au fil de l'extrait que leur amour naissant prend forme sous l'effet d'un coup de foudre (des lignes 1 à 12). Puis, on discerne que Des Grieux, aveuglé par l'amour et manipulé , est entrainé dans un engrenage incontrôlable (des lignes 12 à 22). Enfin, l'aveuglement du héros le prédestine à de nombreux malheurs inévitables déjà annoncés par un narrateur au courant de la suite de l'histoire car son récit est rétrospectif (des lignes 22 à 31).
1-La rencontre et le coup de foudre (1 à 12)
L'interjection « Hélas » suivit de l'exclamation « que ne marquais-je un jour plus tôt ! » nous fait comprendre dès la première ligne de l'extrait, que cet extrait retrospectif est vu sous le regard de Des Grieux qui exprime un vif regret.
« Mais il en resta une, fort jeune, qui s'arrêta seule dans la cour ».
Manon se détache clairement du reste du groupe de femmes qui descendent du coche d'Arras. La conjonction de coordination « mais » met en avant la jeune femme. Sa singularité est soulignée par le déterminant numéral « une » qui s'oppose à l'expression indéfinie « quelques femmes ». Elle est décrite comme « fort jeune » et n'agit pas comme les autres « s'arrête seule dans la cour » tandis que les autres se retirèrent aussitôt.
La proposition subordonnée de temps à valeur de simultanéité « pendant qu'un homme d'un âge avancé s'empressait de faire tirer son équipage des paniers » fait ressortir le contraste entre l'immobilité de Manon et le mouvement de « l'homme d'un âge avancé » ainsi qu'entre l'adjectif « jeune » qui qualifie Manon et le syntagme prépositionnel « d'un âge avancé » qui qualifie le vieillard. On distingue d'emblée que tout est mis en œuvre pour montrer le caractère unique de Manon.
« Elle me parut si charmante, que moi, qui n'avais jamais pensé à la différence des sexes, ni regardé une fille avec un peu d'attention ; moi, dis-je, dont tout le monde admirait la sagesse et la retenue, je me trouvai enflammé tout à coup jusqu'au transport ».
Des Grieux confie qu'il a été immédiatement séduit par Manon et montre la violence des sentiments qu'il a ressentit. La structure corrélative a valeur d'intensité « si charmante que » précédée du verbe de perception « parut » exprime l'incapacité de Des Grieux à résister à l'attraction exceptionnelle de Manon. Ici, l'adjectif qualificatif « charmante » précédé de l'adverbe d'intensité « si » peut avoir une connotation négative à cause de l'ambiguïté du mot « charmer » qui peut aussi se rapporter à l’ensorcellement et dévoile déjà une partie de Manon.
L'adjectif « enflammé » suivi du CC de manière « jusqu'au transport » exprimer les émotions violentes qui prennent possession du chevalier. L'amour fou et le coup de foudre sont traduits par la brutalité des sentiments de DG. La passage sans transition du pronom « elle » au GN « la maitresse de mon coeur » démontre la fulgurance de son amour alors qu'il la connait à peine.
L'effet inattendu de l'action est accentué par le portrait de jeune homme naïf qui ne connait rien de l'amour que DG brosse de lui même. L'opposition entre l'imparfait « J'avais le défaut » et le passé simple « je m'avançais » traduit le changement soudain d'attitude de DG.
2- DG aveuglé et manipulé entrainé dans un engrenage incontrôlable (12 à 22)
La proposition subordonnée conjonctive concessive « Quoiqu'elle fût encore moins âgée que moi, elle reçut mes politesses sans paraître embarrassée » nous présente une héroïne qui semble à l'aise dans les situations de séduction à l'inverse de DG. Il montre ici son étonnement face à l'aisance de Manon exprimée par le CC de manière « sans paraître embarrassée ».
« Elle me répondit ingénument qu'elle y était envoyée (au couvent) par ses parents pour être religieuse ».
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