Le Rouge et le Noir Partie I chapitre XV
Commentaire de texte : Le Rouge et le Noir Partie I chapitre XV. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar yannm66 • 11 Novembre 2021 • Commentaire de texte • 1 771 Mots (8 Pages) • 1 111 Vues
Les relations amoureuses sont au coeur de nombreuses intrigues romanesques du XIXème siècle. Le Rouge et le Noir, œuvre réaliste phare de Stendhal, expose les relations ambiguës entre Mme de Rênal et Julien Sorel, deux êtres que tout oppose mais que le destin va rapprocher. Le passage dont il est question ici développe des topoïs* fondamentaux qui vont structurer l’intrigue, à savoir l’éveil du sentiment amoureux, la mise en place d’un jeu de séduction et le regret final. Or, à la suite de cette première nuit d’amour entre les deux protagonistes, une grande souffrance s’empare d’eux et qui permet de se demander comment la vision du narrateur omniscient permet de créer ce rapport d’opposition entre les deux amants ? Pour apporter des éléments de réponses à cette question, il est judicieux de se focaliser tout d’abord sur les troubles internes qui assaillent Mme de Rênal et sa manière de réagir par rapport à sa faute ; en second lieu, l’analyse s’attachera à montrer les actes et les pensées de Julien qui, lui, est dans une perspective plus combative que réellement sentimentale.
Dès le début de cet extrait, le lecteur a la possibilité de connaître les affres* sentimentaux que connaît Mme de Rénal par l’entremise de la focalisation interne. En effet, commettre l’adultère au XIXème siècle – et bien que cela se pratique depuis toujours – était un acte très mal perçu par la société bien-pesante de l’époque. Particulièrement pieuse, il est facile de comprendre qu’un effroi la tiraille et que le remords commence à poindre* face à son péché. Ses émotions sont décrites de manières hyperboliques car elle est alors « mortellement effrayée » (lg.1) et « en proie aux plus cruelles alarmes » (lg.2) : l’effet ressenti provoque un décalage entre ce qui est vécu – autrement dit la présence physique de l’amant – et une sensation de danger imminent par rapport à ce qui est déroulé. Julien n’est plus apparenté à une figure humaine, il devient une « apparition », un fantôme qui erre dans la pièce et regrette son geste puisque ses « pleurs et le désespoir […] la troublaient vivement » (lg.2). Par ailleurs, la scène d’amour à proprement parler est traitée de façon désinvolte par le narrateur. En ayant recours à la périphrase « même quand elle […] refuser » (lg.3), presque un euphémisme, cela suggère que l’acte en lui même n’a que peu d’importance et que seule la réaction des amants face à leur faute n’a pas de valeur concrète. De manière analogue, Mme de Rênal a de curieuses réactions, faites de contradictions et d’attachement réel. Elle « repoussait Julien loin d’elle […] se jetait dans ses bras (lg.3-4) et cette antithèse démontre que les sentiments de la femme sont aussi sincères que contradictoires ; elle subit ses instincts naturels malgré sont « indignation » apparente (lg.4), le narrateur nous précise qu’ « aucun projet […] conduite » (lg.4-5), ce qui renforce l’hypothèse que Mme de Rênal est plus une victime qu’autre chose.
Elle est passionnément amoureuse et se sent désespérément fautive, ce que le champ lexical de la religion va considérablement appuyer. En effet « elle se croyait damnée […] la vue de l’enfer » (lg.5) a une forte valeur hyperbolique et traduit les tourments du personnage qui n’entrevoit le salut qu’à travers sa perte. Deux questions sont donc soulevées : peut elle être sauvées pour ce qu’elle a commis ? Sera-t-elle un jour pardonnée ? C’est sans doute pour cette raison qu’elle agit de manière incohérente avec son amant « en l’accablant […] de caresses » (lg.5-6), comme si cet acte de repentir lui assurerait le pardon de Dieu. Pourtant, le doute plane sur sa destinée à travers le champ lexical de la mort omniprésente dans cet extrait. « mortellement effrayée » (lg.1), « ses combats avec le remords qui la déchiraient » et « les transports qui l’agitaient » (lg.8-9) assure un sort issue funeste au protagoniste et oriente ses actions futures vers une fin inéluctable, à savoir une mort romantique.
En outre, une partie des sentiments nous est dévoilée avant que Julien ne quitte la chambre et le lecteur s’aperçoit que le mal qui ronge la pauvre femme ne le laisse pas insensible de prime abord. « Le bonheur de notre héros » (lg.6-7) – comme le sentiment du devoir accompli – est associé à des expressions à forte connotation sexuelle telles une « sensibilité brûlante » et la « femme qu’il venait d’enlever » (lg.7) qui vient renforcer l’usage du verbe très expressif « jouir » (lg.8). Cela prouve de manière tout à fait direct que Julien ne sait pas agir comme un homme dervait le faire dans cette situation et se contente de fuir le regard de Mme de Rênal au lieu de calmer son désarroi. En outre, l’usage du conditionnel « s’il eût su » (lg.7-8) renforce cette idée de d’impuissance du jeune homme à lui dévoiler son intériorité. Mais le veut-il vraiment ?
A ce stade de l’extrait, le lecteur assiste à une scission entre les deux partie dès le départ de Julien. Nous ne saurons pas ce que va entreprendre son amante, le narrateur préférant ne se focaliser que les réactions du fauteur de troubles. Ainsi, le caractère omniscient de celui qui narre l’histoire change de perspective dans ce passage. Nous l’avons dit précédemment, la focalisation interne est un moyen de traduire au plus près les émotions et les questionnements
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